Pas toujours facile de concilier travail et passion... Celle de Malick Seck, 19 ans, que le P'tit Luther a interviewé, c'est la politique, qu'il pratique tout en suivant une formation en droit en prépa. Entretien.
Quel a été ton parcours jusqu'à aujourd'hui ?
J'ai commencé mes études au Sénégal, dans un collège privé catholique. En seconde, j'ai déménagé en France, et je suis arrivé dans un lycée public à Nîmes. J'ai fait ES, et après mon bac, je suis parti à Paris. Actuellement, je suis en deuxième année de droit constitutionnel et économique au lycée Turgot, en prépa. Mais j'ai aussi 4h de cours par semaine au Panthéon, ce qui est plutôt agréable. Une fois mes études terminées, j'ambitionne de devenir avocat.
Quelles différences vois-tu entre les systèmes scolaires français et sénégalais ?
Dans mon cas, il n'y a eu pas eu tant de changement que ça, même si je suis passé du privé au public. Mais j'étais dans un milieu plutôt aisé, ce qui peut expliquer certaines choses. Après, c'est au niveau de la discipline que le contraste est plus marqué. Au Sénégal, les profs sont très stricts, en classe, on entend les mouches voler ! Ici, les enseignants sont plus ouverts. Et ce n'est pas le système de la pensée unique : au Sénégal, on a moins de libertés. Alors qu'en France, contrairement à ce que l'on peut croire, on peut réussir en pensant différemment.
Ensuite, pour moi, le gros problème du système sénégalais, c'est l'orientation : jusqu'en Terminale, on n'est pas très bien informé. Il a peu de lien entre ce que l'on fait au lycée, qui est très scolaire, et ce que l'on peut faire après. Et il n'y a pas beaucoup de choix ; c'est soit L, soit S. En France, ce qu'on étudie peut nous donner une idée de ce que l'on veut faire plus tard. Le système d'orientation est plus développé, et il existe un large panel de filières possible, même si certaines sont des « voies de garage ». Après, c'est aussi aux jeunes de se faire entendre, s'ils veulent les améliorer et changer le système scolaire.
Justement, comment t'es venu ce goût pour la politique ?
Ça m'est venu extrêmement progressivement. J'ai toujours aimé participer, faire des choses collectivement. Et je n'aime pas trop que l'on décide pour moi. Et je trouve que la politique est le moyen le plus concret pour avoir des idées et les faire valoir. C'est à plusieurs que l'on arrive à faire bouger les choses. Alors je m'engage à mon humble niveau, et si tout le monde le faisait, on pourrait réussir à se faire entendre. L'union fait la force. Nos gouvernants ont leur idée de la société, nous avons la nôtre, il faut les confronter. C'est comme ça qu'on participe au rayonnement de la cité.
La politique me permet aussi de me battre contre les préjugés. Par exemple, au premier abord, les gens ont tendance à me regarder bizarrement. Et quand ils voient que je parle bien français, que je fais des études, leur regard change. Ça m'exaspère. C'est pour cela que je milite contre les idées reçues, pas seulement contre moi, mais contre tous ceux qui peuvent être victimes de stéréotypes.
Alors, pourquoi avoir choisi le parti radical ?
Effectivement, quand j'ai commencé à vouloir m'engager pour mon pays, tout me prédestinait à choisir la gauche. Mais je ne raisonne pas dans dans une logique de droite ou de gauche. Il ne faut pas rester dans le dogmatisme : l'UMP va glorifier le bilan de la droite, dire que tout était bien, alors qu'un socialiste va le jeter à la poubelle sans le regarder. Le parti radical est plus pragmatique :il y a des idées à prendre à gauche comme à droite. Son histoire m'a aussi marquée : c'est le plus vieux parti de France, il a toujours lutté pour la laïcité, le droit de femmes, avec la loi sur l'IVG de Simone Veil par exemple. C'était aussi le parti de de Valéry Giscard d'Estaing, mon père spirituel.
Aujourd'hui, sa taille a beaucoup diminué. Mais je pense que c'est encore le seul parti humaniste, libéral, social, et surtout profondément européen. Et j'espère que le nouvel UDI [union des démocrates et indépendants, englobant le parti radical] pourra continuer à transporter ses valeurs à une plus grande échelle. Et peut être devenir un jour le premier parti de France. Qui sait ?
Propos recueillis par Possumus