Billet de blog 22 juin 2008

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JPYLG,philosophe, docteur en histoire,

Abonné·e de Mediapart

Ma conclusion personnelle des 20 et 21 juin

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Beaucoup de choses à dire.

D'abord, le plaisir de la rencontre physique avec des personnes que l'on ne connaissait que virtuellement. Plaisir souvent accompagné d'une surprise : tiens, celui-ci, celle-là, je les voyais autrement. (Pourquoi, d'ailleurs, les voyais-je comme ceci ou comme cela ? Mystère). Rencontre avec les abonnés; rencontre avec les journalistes.

Mais, j'abrège là-dessus, pour des choses plus essentielles. Pour la chose qui me semble la plus essentielle : le rôle à jouer par l'abonné pour l'avenir de Médiapart.

De ce point de vue, je dirais presque que je suis déçu par ce qui me semble un excès d'implication des membres du "club", à l'égard de leurs "blogs". Pourtant, je suis de ceux qui en sont pratiquement venus à passer autant (plus ?) de temps sur le club que sur le journal. Sous cet angle, je devrais donc être satisfait. Cependant l'intérêt manifesté par les visiteurs-clubistes que nous étions m'a semblé excessif et se faire au détriment de l'intérêt pour le journal (qui s'est quand même, heureusement, manifesté aussi). Cet engoûment pour le club me semble avoir nui à une réflexion plus profonde, plus systématique, plus pragmatique quant au rôle à jouer par les abonnés au niveau du développement de Médiapart.

Edwy Plenel a donc annoncé clairement les résultats : près de 8.000 abonnés au bout de trois mois d'existence. Pas mal du tout. Mais presque inférieur de moitié à ce qui pouvait être espéré. Ce qui avait été espéré. Le directeur n'a pas manqué de dire non plus qu'il y avait d'autres critères d'appréciation que quantitatifs et que, du point de vue de la concrétisation d'une formule très originale, on pouvait parler d'un succès complet. Mais, il faut que ce succès perdure et pour cela, retour à la case précédente: les abonnements.

Vu les informations que l'on a bien voulu nous donner, quelles conclusions pouvons-nous tirer, nous abonnés, des trois premiers mois d'existence de Médiapart, mettant complètement de côté (au moins pour un temps) les satisfactions ou insatisfactions éprouvées en tant que clubistes-blogueurs ?

J'ai cru comprendre que le résultat obtenu pouvait à la fois susciter l'espoir ou l'inquiétude. 8.000 abonnés, ce n'est pas rien ! Ils auraient pu être 800, comme ici ou là, certains le souhaitaient en janvier dernier. En même temps, c'est quand même loin du résultat espéré, ce résultat espéré étant une étape par rapport au seuil fixé pour la pérennité de l'expérience, qui est, nous a-t-on dit, de 60.000 abonnés environ dans 3 ans.

La moitié du résultat espéré, cela ne doit pas être comparé à la bouteille à moitié vide ou à moitié pleine et être renvoyé à l'optimisme ou au pessimisme personnel de chacun. Il me semble qu'il ne faut pas raisonner en termes de succès ou d'échec, demi-succès ou demi-échec, mais en terme de réponse à une attente, ou de réaction par rapport à la mise en oeuvre d'une stratégie, en l'occurrence, stratégie de lancement. Il faut ensuite se demander si l'écart observé entre l'attente et la réponse - ou les réactions obtenues par rapport à ladite stratégie - nécessite des modifications par rapport à d'autres phases de la stratégie, disons les phases de développement, puisque Edwy Plenel a parlé de "phase 2"... Cette phase 2 devrait, notamment, passer par une nouvelle campagne de parrainage, sur des bases différentes, la différence principale étant qu'elle deviendrait permanente... D'accord, mais il y a peut-être lieu de se demander pourquoi la première n'a pas donné les résultats escomptés et si la raison principale serait qu'elle a été trop courte.

Je peux parler du cas que je connais, c'est-à-dire le mien, où a priori, je suppose que les quinze adresses électroniques que j'ai envoyées n'ont produit aucun résultat. Je suis tout-à-fait prêt à envoyer quinze nouvelles adresses électroniques pendant quelques mois, avant d'épuiser mes ressources; mais, je crains qu'elles produisent encore moins. En effet, je n'avais pas choisi les quinze premières adresses par hasard. J'avais sélectionné des gens dont je pensais qu'ils pouvaient être réellement intéressés par l'offre d'abonnement à Médiapart, et je le pense toujours. Mais je pense aussi que ces personnes n'ont simplement pas vu l'intérêt de la proposition. Ils n'ont même pas vu que c'était une proposition : ils ont vu une sollicitation, ce que c'était aussi, d'ailleurs. D'autres (ou les mêmes) verront-ils mieux une prochaine fois ?

Voila le problème : nous sommes dans un monde qui nous sature d'informations indifférenciées et de sollicitations indifférenciées. Par rapport aux unes et aux autres (informations et sollicitations), que d'ailleurs nous ne distinguons pas, c'est une réaction de défense presque instinctive que de dire non, sans en savoir plus.

Mes quinze contacts ont dû dire non sans savoir à quoi. Je ne sais pas comment les amener à dire oui la prochaine fois - ceux-là et un certain nombre d'autres - mais je pense qu'il faudrait trouver quelque chose de différent au niveau de la présentantion, (pas seulement au niveau de la durée). Je pense qu'il faudrait qu'ils entendent une offre, plutôt qu'une demande. Leur réaction première serait sans doute très différente si au lieu d'en appeler à leur adhésion, on leur faisait un cadeau. C'est rare qu'on refuse un cadeau.

Bien sûr, je pourrais, une fois de temps en temps, offrir le cadeau d'un mois d'abonnement à telle ou telle de mes relations. Mais je ne peux pas faire un cadeau de ce genre à 15 personnes tous les mois. Peut-être y a-t-il une ou plusieurs astuces à trouver ? Médiapart nous a parlé de son idée, d'ailleurs excellente, d'offrir l'abonnement à un certain nombre d'institutions, telles que les bibliothèques universitaires, moyennant un certain "bridage", c'est-à-dire l'impossibilité pour le lecteur se connectant de cette façon de poster des commentaires. L'idée, en effet, est fameuse, mais j'ai peur qu'elle ne produise des fruits qu'à moyen terme.

Donc, qu'est-ce que cela coûterait d'associer un tel système à la campagne de parrainage ? Les abonnés que nous sommes fournissent donc des adresses électroniques de clients potentiels et Médiapart ne leur demandent rien mais leur offrent l'accès au service - pendant une durée à déterminer... un mois ? trois semaines ? une semaine ? ...la seule restriction étant la même que précédemment : impossibilité de poster des commentiares.

Parallèlement - ce qui inciterait à choisir une durée relativement longue, par exemple trois semaines, chaque semaine le client prospecté, via sa messagerie, recevrait un petit matériel publicitaire au format pdf. (Celui qui existe déjà sous forme papier et qui doit coûter assez cher), ou un autre à mettre au point, sachant que, de toutes façons, le format pdf implique la gratuité. J'ai la conviction que, soumis à ce traitement, parmi les 15 noms que j'ai envoyés, au moins cinq se seraient abonnés.

Je n'ai pas fini.

J'ai fait allusion, le 20, aux séminaires de créativité appliqués au marketing - et dont, d'ailleurs pour notre plus grand malheur, s'est inspiré le marketing politique. Cette fois-ci, ce serait pour la bonne cause. Il y aurait beaucoup de choses à dire là-dessus. Il s'agit de véritables techniques : il n'y a pas que le journalisme qui soit une technique : la pub et le marketing sont également des métiers. Médiapart n'a aucun intérêt à néglier cette question. Mais j'abrège :

J'ai appris hier d'Edwy Plenel que celui que l'on considère généralement comme l'inventeur de la presse quotidienne, Emile de Girardin, (parce qu'il lance en 1836 le quotidien "La Presse" qu'il a l'idée de faire financer en partie par la publicité), s'était fait la main depuis 1826 en lançant un périodique intitulé "Le Voleur", fait d'articles piqués à d'autres périodiques. En somme, il avait inventé la revue de presse, avant même d'inventer la presse. Bref. Je ne conseillerai pas à Médiapart d'aller voler ses articles ailleurs, puisqu'il s'agit, justement, de créer une différence. Mais par contre, je conseillerais volontiers de piquer sans la moindre vergogne les bonnes idées publicitaires partout où on en trouve, puisque Médiapart ne manquera pas, à son tour, d'être copié. A titre, d'exemple, le 9 juin Rennes, l'hebdomadaire Marianne invitait les Rennais à assister à un débat sur la laïcité (thème qui m'est cher) entre l'incontournable Ségolène et l'incontournable Jean-François Kahn.

J'ai entendu qu'il était en projet d'organiser à partir de la rentrée davantage de réunions en province (puisqu'il y en a déjà eu) où Médiapart se présenterait. Je pense qu'il pourrait être plus bénéfique de choisir (sauf exception) comme thème de la réunion n'importe quel sujet à la mode du moment, choisir un ou deux spécialistes connus de la question, genre grosse pointure, questionné par un journaliste de Médiapart, sachant que la notoriété du directeur se transfèrera difficilement ,pour ce qui est des résultats recherchés. Pendant ce temps, des sbires de Médiapart, oeuvreraient discrètement pour distribuer au public ce qu'il faut pour mémoriser l'évenement, via l'abonnement. Appelons cela, le convertir.

A ce propos, un dernier mot: le terme d'évangélisation a été plusieurs fois prononcé, hier et avant-hier, avec des effets divers. L'évangélisation est également un thème qui m'est cher. Il se trouve que le terme est très fortement connoté; en trouver d'autres ? J'en ai cherché, à l'aide d'un dictionnaire analogique. J'invite ceux que cela amuse à faire de même. Tous les mots qui renvoient à l'idée de faire partager une conviction à autrui sont également connotés, plus ou moins fâcheusement. J'ai l'impression que le monde politique a détourné de son vrai sens la notion de "communication", justement pour dépasser cet obstacle du caractère négatif de la publicité-propagande.

Je ne dirai donc jamais - pour un boulet de canon - que j'ai envie de "communiquer sur Médiapart". Pourtant, il s'agit bien de cela... Eh bien, j'essaierai donc de faire quelque chose dont je ne sais pas comment cela s'appelle; mais dont je sais que cela a beaucoup à voir avec ce qui me semble une entreprise de salut public, notion à utiliser également avec modération, tant les divers comités du même nom, ont pu laisser des souvenirs mitigés, quel que soit le bien que certains pensent des "clubs" de 1789.

jean-paul yves le goff

http://www.lelivrelibre.net

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