Avec le tremblement de terre, l'information en continu ne s'est jamais si bien portée en Chine: c'est le constat que dresse un professeur de l'université de Shantou, dans une tribune au Washington Post. Nous sommes loin de 2005 lorsqu'une usine de produits chimiques de Harbin avait provoqué, dans l'ignorance générale, une catastrophe écologique. Les 5 millions d'habitants étaient tenus de ne pas boire l'eau du robinet mais personne ne leur expliquait pourquoi, les médias locaux étant sommés de ne pas évoquer l'explosion d'une usine en amont. Les premières informations se sont propagées sur Internet et les médias, tous sous contrôle du gouvernement, ont fini par sortir l'histoire. L'épidémie du SARS avait elle-aussi été fortement sous-couverte, jusqu'à ce que l'OMS demande au président Hu Jintao d'alerter sa population.
Quand le tremblement de terre a eu lieu, l'information est tombée instantanément. Le premier ministre s'est rendu très vite sur les lieux, avec son escorte de caméras et de photographes. Pourquoi la Chine a-t-elle décidé d'offrir au monde une vision de l'intérieur de cette tragédie? Plus important encore, pourquoi a-t-on donné aux Chinois autant de détails sur cette tragédie?
BBC, AFP, Reuters, AP et de nombreux journalistes étrangers étaient sur les lieux et n'ont vraisemblablement pas été empêchés de rendre compte de la réalité. Souvenons nous bien de Melissa Chan, cette journaliste d'Al Jazeera qui a pu se rendre au coeur du foyer, dans les villages abandonnés, après quelques négociations avec les policiers locaux.
Le pays a su sortir son épingle du jeu en acceptant (à dose homéopathique) l'aide étrangère quand la Birmanie garde toujours sa porte fermée à double-tour.
Dépassé par les vidéos et les témoignages de chinois pleuvant en permanence et de toute part sur Internet, les médias ont joué le jeu de l'information en continu, rendant presque impossible le contrôle de l'Etat... sauf peut-être à l'occasion du deuil national de trois jours qui s'apparente à une reprise en main des médias, tenus d'observer des consignes claires de sobriété.
Quoiqu'il en soit, le scandale des écoles mal construites a très vite emmergé dans la presse (à ce titre, l'AFP parlait bizarrement de 7000 écoles effondrées tandis qu'AP parlait de 7000 classes... si un école dispose raisonnablement d'un minimum de 100 élèves, nous aurions eu 700 000 élèves enselevis dans la mesure où le tremblement de terre est survenu en pleine journée). Des histoires individuelles on été mises en avant, rendant ces victimes moins anodines à tel point qu'un deuil national de 3 jours à leur attention a été décrété; une première sachant qu'un tel hommage était jusqu'à présent rendu exclusivement à des personnalités du parti.
La culture serait-elle sur le point de changer? Attacherait-on, en Chine, plus d'importance à l'individualité comme c'est le cas en Occident?