Les joueurs du XV de France devaient croire que le Japon était encore cette équipe de souffre-douleurs des années 1980/90/2000, courte sur pattes et faible devant, victime expiatoire permanente de branlées à 80 pions. Et bien, non. Et c'est très bien comme ça. L'ovalie voit à chaque édition de ses coupes de monde de nouveaux pays émergent rejoindre le haut-niveau. Désormais, le XV de la cerise en fleur est en passe de rejoindre les Îles du Pacifique ou l'Italie. Et s'est déjà hissé parmi les nations contre qui la victoire n'est plus une évidence, comme la Roumanie (qui a mené une heure durant contre l'Ecosse cette nuit -voir le résumé ici-) et la Géorgie, voire le Canada et les Etats-Unis. Même la Namibie a planté deux essais aux Fidjiens (voir le résumé ici)
Alors certes, les Bleus n'ont pas franchement brillé pour son premier match. Trop d'intentions décousues et maladroites, trop d'envie désordonné de briller au large quand il convient de d'abord dominer au près. Mais surtout pas assez de respect. Là où la Nouvelle-Zélande a su d'abord assurer le score avant de s'économiser (et marquer au final, moins de points contre les Tonga -voir le résumé ici- que la bande à Marco Lièvremont), les Coqs ont oublié de jouer simple, face à un adversaire bien compliqué.
Car les Japonais ont battu cette année les Tonga et les Fidji, ont une tradition de rugby à 7 bien ancrée, et un championnat au pays du soleil levant qui s'est fortement développé depuis le dernier mondial, accueillant notamment nombre de joueurs de l'hémisphère Sud (surtout néozélandais), en pré-retraite dorée. Bref, le Japon, c'est pas le Pérou, mais presque. Et comment ne pas s'agenouiller devant leur entraîneur, le mythique John Kirwan (ancien ailier Black aux cannes de feu), dont on se remémore avec émotion l'essaicontre l'Italie, en 1987…
Faute d'avoir voulu imposer sa domination physique avec ses avants, et d'occuper le terrain au pied, le XV de France s'est laissé piéger. Pas au point de s'effondrer, comme face à l'Italie lors du dernier tournoi, mais de tout de même chanceler à l'heure de jeu. Au final, la supériorité technique et l'endurance ont permis de limiter les frais. Un peu moins la casse, puisque le trois-quart centre Estebanez (qui a visiblement du mal à comprendre le mot «passe») et l'ouvreur remplaçant David Skrela sont déjà à l'infirmerie.
Au final, il ne sert à rien de s'effrayer (en 1999, la France avait réalisé une phase de poule très moche avant de finir en finale), ni de s'enthousiasmer (quelques beaux mouvements, mais toujours pas de plan de jeu véritable). Juste constater que l'élite se resserre, et que c'est très bien comme ça. En attendant la suite.
Le résumé du match:
Le bonus: Il faut saluer le geste très cinéphilique de l'ailier tricolore Maxime Médard, sur le premier essai français (voir ci-dessus, au début de la vidéo). En effet, comment ne pas penser à la vue de cette filouterie à la grandiose scène du match de football américain dans le non moins grandiose Mash, de Robert Altman. Ladite référence a lieu au bout de 8'51, mais autant se repasser l'extrait en entier…