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Paroles syriennes

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Billet de blog 11 juillet 2013

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Les Syriennes, déesses de la vie

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Illustration 1

L'Association de Soutien aux Médias Libres vous présente dans son édition "Paroles Syriennes" la traduction d'un article publié en mai dans Henta, un journal Syrien de Salamiyye parrainé par ASML. Cet article sur les femmes syriennes est une collection d'histoires individuelles et de témoignages de mères syriennes rassemblées par Samo Al-Khatib, reporter à Henta. Bonne lecture.

L'écriture n'a jamais été un problème pour moi, car je me suis souvent exercé à aborder mon quotidien, et celui des autres, sous un angle littéraire et imagé. Mais j'ai compris une chose lorsque j'ai commencé à réunir ces dossiers sur les mères syriennes. J'ai compris, après avoir approché leur monde réel, qu'écrire au sujet de ces femmes qui tissent tous les détails de l'Histoire, est un tout autre genre d'écriture. La vie la plus réelle, avec ses nuances les plus sincères, c'est  celle d'une mère en Syrie. La mère syrienne, déesse de la ténacité et du défi, crée des miracles. En ces temps de mort quotidienne, elle est la source de la vie.

Illustration 2
Logo du journal Syrien "Henta"

Oum Khaled, du quartier de Tadamoun

Je me suis assis pour reprendre mes esprits, sous le soleil brûlant de midi, dans un des centres de refugiés du quartier de Yarmouk. C'est alors qu'elle s'est approchée de moi. Oum Khaled est une femme âgée dont le visage trahissait toutes les angoisses de la guerre, après les atrocités infligées à son quartier, celui de Tadamoun. D’une main tremblante, elle m'a donné un petit bout de papier sur lequel était inscrit un numéro de téléphone portable, et m’a demandé de l'appeler. Elle ne voulait pas parler elle-même, mais elle m'a chargé de faire comprendre à celui qui répondrait qu'elle allait bien, qu'elle ne manquait de rien et qu'elle se trouvait au milieu de voisins de leur quartier sinistré. Lorsqu'une voix me répondit, j'ai compris une part de la vérité: c'était son fils, réfugié dans une des villes des environs de Damas qui n'avait pas encore été touchée par la guerre. J'ai su par la suite que cette vieille mère, malade du diabète, s'était réfugiée dans cette école surpeuplée après avoir fui, seule, sous une pluie d'obus, pendant que son fils trouvait un autre refuge, pour lui et le reste de sa famille. Mais le premier souci de cette femme était de rassurer un fils qui, lui, n’avait pas pris la peine de s’enquérir du sort de sa mère. C’est cela la guerre : cruelle, dans ses détails et son quotidien, où ceux qui la subissent ne sont pas tous semblables à Oum Khaled, la vieille déplacée solitaire, mais toujours solide, tenace et tendrement inquiète pour celui qui l’a abandonnée au moment du massacre.

Louna de Salamiyeh

Je lui ai parlé hier, sa voix était lourde de soupirs, comme celle d’une mère profondément blessée. Elle avait ignoré les mises en garde de sa famille, qui lui déconseillait d’aller à Damas, où la guerre faisait rage dans certains quartiers, surtout près des centres de sécurité du régime. J’ai senti dans sa voix une détermination suicidaire. Elle voulait voir son fils enfermé dans la prison de Sayednaya, alors même que la durée des visites autorisées n’excède pas cinq minutes et qu’il lui fallait d’abord demander une autorisation dans un des centre de sécurité situé dans le quartier actuellement le plus « chaud » de Damas. Louna n’est plus que l’ombre d’elle même, depuis qu’il y a un an, son fils a été emprisonné après avoir été enlevé par les forces de sécurité pendant qu’il faisait son service militaire. Voir son fils est devenu une obsession pour elle, en plus des soins nécessaires à son mari, atteint d’une maladie incurable. J’ai compris, après de multiples tentatives de la dissuader, qu’il était vain de penser que la guerre puisse l’empêcher de rendre visite à son fils. J’ai du mal à imaginer ce qu’elle a du endurer entre le moment où son aîné a disparu et celui où elle a appris le lieu de sa détention. Mais j’ai encore plus de mal à imaginer son état durant les cinq minutes auxquelles elle a droit tous les deux mois. La Vierge Marie ne rayonnait sans doute pas plus, à la naissance miraculée de son fils, que Louna lorsqu’elle pouvait rencontrer son fils et caresser le bout de ses doigts. Etre mère de cette façon c’est comme vaincre la mort, c’est traverser le feu empoisonné comme si c’était de l’eau.

Samar, des environs de Homs

Je l’ai remarquée alors qu’elle se tenait dans la file d’attente pour la distribution de lait d’enfant. Elle n’avait pas l’air malheureuse et abattue comme les autres mères dans la queue. Je me suis approché, pour enregistrer les données concernant l’enfant de cette très jeune femme, dont le beau visage frappait par son calme. Je lui ai demandé l’age de son enfant pour qu’il ait le lait correspondant. Elle a sourit, ses yeux ont lancé un éclair et elle a dit : « mon fils est encore à Homs et je ne pense pas qu’il ait besoin de lait. Je ne suis là que pour aider, parce que j’ai de l’expérience pour nourrir les enfants ». Je suis resté hésitant devant son aplomb, mais mon embarras s’est dissipé quand elle a continué : « Lorsque les milices loyalistes ont attaqué notre village juste avant l’aube, je suis sortie inconsciente de la maison et n’ai pas pu prendre mon fils dans son berceau, mais certainement Allah a du envoyer quelqu’un qui l’aura porté hors du village avant qu’il ne brûle. Allah n’oublie personne, mon frère !». Elle avait fondu en larmes en disant ces derniers mots. Sa douleur réprimée m’a fait l’effet d’un couteau dans la poitrine. Mais elle a vite repris sa place dans la file, avec sa force impressionnante, comme si laisser sortir ces larmes lui avait ajouté du courage, me laissant stupéfait devant l’endurance miraculeuse de cette jeune mère.

Mountaha, des environs d’Alep

Elle n’arrivait pas à supporter le bouleversement de sa situation : habituée à vivre dans une maison semblable à un palais, elle devait désormais rassembler les membres de sa famille dans un petit bout de maison dans la banlieue de Jaramana. Elle pouvait éclater en sanglots devant un véhicule distribuant de l’aide, avant de prendre de la nourriture et de s’en aller, pliée en deux. Une nuit, des membres ivres des « Comités populaires » ont frappé à la porte de sa chambre. Elle a ouvert, la terreur se lisant sur son visage, pour s’entendre offrir l’abjection : de l’argent en échange de son honneur. Mais elle a réussi à leur dire, en souriant : « Je suis la veuve d’un martyre, et je n’achèterai pas de quoi réchauffer mes enfants au prix d’une trahison de notre engagement ». Leur vengeance fut une balle. Mountaha a rejoint son mari dans le ciel.

Le mariage de Ward

Le sort a voulu que la révolution ait commencé avant qu’elle n’ait pu trouver une épouse à son fils unique Ward. Lorsque les affrontements ont atteint Baba Amr, Souad et son mari ont quitté le quartier pour se réfugier à Hama, Ward restant sur place pour garder la maison. La famille ne pensait pas que la guerre allait durer, brûler son quartier et démolir leur petite maison. Ward a rejoint un groupe de l’Armée Syrienne Libre, alors que son père restait à Hama. Les mois ont passé et le siège s’est resserré autour du quartier. Une nuit, le téléphone portable de Souad a sonné. Un des membres du groupe lui a dit que Ward a été atteint par des éclats et qu’il y a peu d’espoir de le sauver. Pleine de courage et déterminée à résister, elle a loué une voiture pour se rendre là où son fils luttait contre la mort. Avec l’idée fixe d’assister au mariage de son fils avant toute chose. En chemin, elle lui a acheté un habit neuf et une bague. En arrivant à l’hôpital de campagne, elle a demandé à ses compagnons de préparer la noce. Elle savait qu’elle ne le reverrait pas vivant, car un cœur de mère ne se trompe pas. Son fils est mort durant l’opération chirurgicale. Sans le laver de son sang, elle l’a revêtu de l’habit de mariage et a passé la bague sur sa main ensanglantée, pour que ses camarades le portent, enveloppé dans le drapeau de la révolution. Fière de son fils, elle a poussé haut et fort les youyous accompagnant à sa dernière demeure le jeune marié.

Ci-dessous le texte original en Arabe:

آلهات الحياة السوريات
تحقيق سامو الخطيب
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لم تکن الکتابة یوما" ترفا" بالنسبة لي، إذ کثیرا" ما اعتدت تناول یومیاتي ویومیات الآخرین في سیاق أدبي مجازي. لکنني وحین شرعت في تدوین هذه الملفات عن أمهات سوریات، أدرکت بعد الکتابة عن واقع نساء یصنعن التاریخ بتفاصیله، أن الكتابة لهن أمرٌ مختلف، فالحياة الحقيقية بأصدق روائحها تصنعها أمٌ سوریة، إنها صانعة المعجزات وإلهة الصمود والتحدي ومصدر الحیاة في زمن الموت الیومي.
أم خالد من التضامن
في إحدی دور الإیواء في مخیم الیرموك، جلست ألتقط أنفاسي تحت شمس الظهیرة الحارقة. اقتربت مني أم خالد وهي امرأة مسنة ظهرت علی وجهها هموم الحرب والذعر جراء ما عاناه حي التضامن من فظائع. ناولتني بیدها المرتجفة ورقة صغیرة کتب علیها رقم هاتف جوال وطلبت مني أن أتصل به. لم ترغب في التحدث بل طلبت إلي أن أفهم من اتصل به أنها بخیر ولا ینقصها شیئ! وأنها محاطة بالجیران من الحي المنکوب. حین جاءني الصوت من الهاتف، أدرکت شیئا" من الحقیقة: هو ابنها اللاجئ إلی مدینة في الریف الدمشقي. 
حیث لم تکن الحرب قد امتدت إلیه بعد. علمت بعدئذ أن الأم العجوز المصابة بالسکري في مدرسةٍ تعج بالعائلات، هربت وحیدة من تحت وابل القذائف، فیما ابنها وفر لنفسه وعائلته ملاذا" دون هذه العجوز. کان همها أن تطمئن علیه، وهو لم یکلف نفسه عناء السؤال.
إنها الحرب: شريرةٌ بتفاصیلها ویومیاتها، من یحتملها غیر أمثال أم خالد بغربتها ووحدتها وصمودها وحنوها علی من تخلی عنها في لحظات المجزرة.
لونا من السلمية
تکلمت معها البارحة، وکان صوتها مشربا" بالتنهد والجرح الأمومي العمیق.
لم تعبأ بتحذیرات العائلة ونصائحها ألا تتوجه إلی دمشق، حیث الحرب في أوجها في أحیاء العاصمة وخاصة في جوار مراکز النظام الأمنیة. سمعت في صوتها إصرارا استشهادیا، فهي ترید أن تزور ابنها المحتجز في سجن صیدنایا، حتی ولو کانت مدة الزیارة لا تتجاوز الخمس دقائق، وبالرغم من أنه یتوجب علیها طلب إذنٍ للزیارة من أحد الأفرع الأمنیة الکائن في أکثر الأحیاء سخونةً. لونا هي لیست أکثر من ظل امرأة بعد سنةٍ من اعتقال ابنها الذي اختطفته قوات الأمن من خدمته الإلزامیة. یسکنها هاجس رؤیة ولدها علاوةً علی مرض زوجها العضال. اقتنعت بعد محاولات عدیدة أن الحرب لن تستطیع ثنیها عن هذه الزیارة، من الصعب عليّ تصویر المکابدة والشقاء اللذین حلا بلونا منذ اختفاء بکرها لحین معرفتها مکان احتجازه. ولکن من الأصعب علي تصور حالها خلال الخمس دقائق التي تمر علیها کل شهرین. لم تکن مریم البتول حین رأت وحیدها المعجزة أکثر إشراقاً من لونا حین تلاقي ابنها وتستطیع لمس أطراف أصابعه.
هذه الأمومة تهزم الموت وتمر فوق الحراب المسمومة کما لو أنها الماء.
سمر من ریف حمص
وقع نظري علیها حین کانت في الطابور المخصص لتوزیع حلیب الأطفال. لم تبد علیها علامات الشقاء والکرب کما هي حال بقیة الأمهات الواقفات في الصف بانتظار حصص الحلیب. اقتربت منها لأسجل البیانات الخاصة بطفلها، وهي سیدة صغیرة السن ذات جمال واضح ووجه یشي بهدوءٍ لافت.
سألتها عن عمر ابنها لأعطیها الحلیب المناسب. فابتسمت و برقت عیناها، وقالت: "ابني مازال في حمص، ولا أظنه بحاجةٍ للحلیب، أنا هنا لأعرض مساعدة فلدي خبرة في أمور تغذیة الأطفال. وقفت حائرا أمام اتزانها، فبددت حیرتي حین أردفت: حین اقتحمت المیلیشیات الموالیة قریتنا قبیل الفجر، خرجت من بیتي بلا وعي ولم أستطع حمل طفلي من مهده، لکن لابد أن الله أرسل له من یحمله خارج القریة قبل أن تحرق. إن الله لا ینسی أحدا یا أخي!"
لم تکد تنهي کلماتها حتی دلفت في بکاء مریر، أحسست أنها تشق صدري بسکین بتنهدها المکتوم.
لکن سرعان ما عادت لوقفتها الصلبة و قوتها الممیزة، وکأنما البکاء قد أمدها بمزیدٍ من الجلد والصلابة. وقفت في الصف، وأنا لازلت ساهما" مدهوشا من الصبر العجائبي لهذه الأم الصغیرة.
منتهی من ریف حلب
لم تستطع احتمال انقلاب الحال، فبعدما اعتادت علی العیش في بیتٍ أشبه بالقصر، هي الآن تحاول لملمة شتات عائلتها في رکن صغیر في أحد غرف مدینة جرمانا. أخذت تبکي أمام سیارة توزیع الإعانات، حملت بعض الأغذیة ومضت بانکسار. 
لیلا"، طرق باب الغرفة مجموعة من اللجان الشعبیة المخمورین، فتحت الباب بوجل و ذعر واضحین، عرضوا علیها بعض النقود مقابل شرفها. بوقاحة عرضوا علیها شراء شرفها، بابتسامة أجابت: أنا أرملة شهید، ولن أشتري دفء أطفالي بخیانة العهد. رصاصةٌ کانت انتقامهم، وانضمت منتهی لزوجها في السماء!
زفاف ورد 
=====
شاء القدر أن تندلع الثورة قبل أن تجد عروساً لابنها الوحید ورد، حین احتدمت المواجهات في بابا عمرو، خرجت سعاد وزوجها من الحي ولجأا إلى مدینة حماه، وبقي ورد لیحرس البیت. لم تعتقد العائلة أن الحرب ستطول وستحرق الحي وتدمر بیتهم الصغیر. انضم ورد لمجموعة تابعة للجیش الحر، في حین لم یزل والده في حماه. 
مرت الشهور و ازداد الخناق قساوةً علی الحي. في إحدی اللیالي، رن هاتف سعاد الجوال لیخبرها أحدهم أن ورد أصیب بشظیة ولا أمل من نجاته. بجسارة وعنفوان محاربة، استقلت سیارة أجرة وذهبت الی حیث ابنها یقارع الموت. ونصب عینیها أن تحضر عرس ابنها قبل أي شيئ آخر.
في الطریق، اشترت له بدلة رسمیة وخاتما، حین وصلت المشفی المیداني، طلبت من رفاق ورد تحضیر الزفة. قلب الأم لا یخطئ، لم تستطع رؤیة ابنها یودع الحیاة. فقد استشهد أثناء العملیة الجراحیة.
دون أن تغسله من دمائه، البسته بدلة العرس، والخاتم في خنصره المدمی، لیحمل بین رفاقه وعلم الثورة یلفه. وصوت زغارید أمه الفخورة بابنها العریس یصدح عالیاً.

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