Billet de blog 18 mai 2011

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Sublimes paroles et idioties de Nasr Eddin Hodja.(2)

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“Sublimes paroles de Nasr Eddin Hodja”.(2)

Partout et toujours, c’est le même idiot majuscule qui s’adresse à nous dans cette langue universelle que partagent en secret les fous et les sages. Des récits qui jouent sur le registre de la subversion du sens, présentant la raison ordinaire comme une aberration, voire comme une folie, et la folie apparente comme la raison suprême.

Nasr Eddin croise dans la rue une bande de chenapans qui lui ont infligé plusieurs fois des plaisanteries d’un goût douteux et il aimerait bien leur donner une petite leçon.

Il leur lance au passage :

- Que restez vous là, vous autres, à ne rien faire? Vous ne savez donc pas que la femme du cadi organise une fête pour tous les enfants de la ville?

- Comment te croire Nasr Eddin?

- Que la barbe me tombe si je mens! Dépêchez vous, sinon il ne va rien vous rester.

Aussitôt les enfants se mettent à courir aussi vite qu’ils le peuvent vers la maison du cadi en poussant des cris de joie.

“ Et si c’était vrai? se dit Nasr Eddin en les voyant s’en aller avec tant d’enthousiasme. Par Allah! Il faut que j’y aille voir moi aussi!”

Et le voilà parti vers la maison du cadi, courant comme un gosse.

Nasr Eddin se réveille en pleine nuit, agité d’un pressentiment. Il regarde par la fenêtre et il voit, éclairé par la lune, une forme blanche de taille humaine qui s’agite dans le jardin. Il secoue sa femme :

- Réveille-toi, fille de l’oncle. nous sommes cernés par un voleur ou par un fantôme.

Khadidja, aussi terrorisée que son mari, se réfugie au fond des couvertures sans même répondre.

N’écoutant que son courage, qui ne lui dit d’ailleurs pas grand chose, Nasr Eddin sort prudemment sur le pas de sa porte et, ramassant une grosse pierre, il la lance de toutes ses forces en direction de l’intrus. Il fait mouche car la forme blanche tombe par terre, où elle reste immobile.

Nassr Eddine s’approche à pas de loup pour identifier la victime et il revient quelques instants après, tremblant encore de tous ses membres :

- Par Allah! ma femme, il s’en est fallu de peu que tu ne me revois pas vivant

- Pourquoi? Tu as été attaqué?

- Presque. J’ai abattu ma chemise que tu avais mise à sécher dans le jardin. Tu te rends compte, si j’avais été dedans!

- Nasr Eddin, vient un jour lui demander un paysan qui avait autrefois témoigné pour lui dans un procès, veux tu me prêter ton âne? Je dois porter du grain chez le meunier.

- Par Allah! Tu n’as pas de chance. Je viens justement de le prêter à quelqu’un d’autre.

A ces mots, l’âne de Nasr Eddin, qui n’en est pas à sa première bévue, se met à braire stupidement derrière la porte de l’étable.

- Hé! Hodja, je n’ai pas d’oreilles aussi grandes que lui mais ce que j’ai entendu, je l’ai entendu! Tu m’as menti.

- Vas-t-en de ma brise! gredin! Si tu crois plus la parole de mon âne que la mienne, nous n’avons rien à faire ensemble!

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