Jusqu'ici, la secrétaire nationale des Verts s'était plutôt tenue à l'écart de l'effervescence qui entourait la structuration du rassemblement écolo. Une intervention fin mars à la tribune du Cnir une semaine après les régionales (lire notre compte-rendu), pour conclure une semaine de remue-meninges tous azimuts (lire notre article), mais sans entrer plus avant dans la discussion. Finalement, c'est ce dimanche que Cécile Duflot a pris la plume, en envoyant un courrier aux militants Verts et non-Verts d'Europe Ecologie.
Dans cette longue missive de cinq pages (lire ici en PDF), la désormais nouvelle présidente du groupe Europe Ecologie au conseil régional d'Île-de-France lance à son tour quelques «pistes de proposition» pour alimenter le débat organisationnel qui s'est entamé en interne, et qui devrait connaître sa conclusion lors d'une convention nationale de l'écologie politique en juin prochain. Toutefois, elle tient à prévenir: «Cette réflexion en cours sur l'avenir de l'écologie ne peut pas être un seul débat d'organisation.» Et pour le coup, l'état de sa réflexion sur la question interne semble pencher en faveur d'une mue progressive, plutôt que vers une profonde révolution structurelle.
De ces pistes proposées par la patronne des Verts, on retiendra des déclarations de principe, comme «il faut passer du rassemblement par le haut au rassemblement par le bas» ou l'évocation d'un «parti-société» plutôt qu'un «parti-supporter» ou un «parti-caserne». On notera également des héritages revendiqués, comme le «mouvement autogestionnaire», «la pensée du mouvement ouvrier», «les combats pour le temps libéré ou le féminisme», «les courants libertaires» et la «démocratie participative».
Puis elle fait prudemment état d'un embryon de position personnelle: «Il n'y aura pas de formule magique, mais je crois que la forme à naître doit être un mouvement polymorphe articulant à la fois un parti transformé et un réseau informel ouvert à toutes et tous, dont la priorité serait d'élaborer ensemble un projet capable d'être une alternative en 2012.» Quant aux désignations des candidats, elles devraient selon elle désormais être la conséquence de votes militants, et ce dès les prochaines cantonales de 2011.
Garante de l'avenir d'un parti qu'elle dirige depuis plus de deux ans maintenant, elle résume son point de vue sans cesse équilibré, entre tenants de l'ouverture «à la Cohn-Bendit» et partisans de l'importance du parti écologiste: «Les Verts n'ont aujourd'hui ni vocation identitaire, ni volonté de se dissoudre dans un ailleurs indéfini. Je nous crois capables d'engager notre propre mue en participant à une aventure commune.» Dans le même temps, elle fait attention à ne pas fermer de porte, quand elle évoque une réforme, voire une transformation des instances de direction. Elle lâche même: «Et pourquoi pas, sans a priori ni opération marketing et si le plus grand nombre le souhaite, être capable de changer de nom?»
Cécile Duflot fait enfin siennes trois autres initiatives déjà mises sur la table par d'autres, et qu'elle soumet au débat collectif. Elle évoque ainsi «un conseil fédéral provisoire», permettant d'échanger et d'élaborer et de décider, avec les Verts et Régions et Peuples solidaires (les deux partis jusqu'ici présents dans EE), mais aussi avec des «issus du PS, du PCF, du MoDem, de Cap 21 ou d'autres forces». Quant à ceux qui «veulent s'engager, mais pas s'encarter», elle estime qu'ils doivent s'organiser en «comités locaux» et «adhérer de manière individuelle à un réseau».
En parallèle, elle appelle à la formation de «parlements régionaux de l'écologie» pour effectuer le suivi des politiques locales. Elle approuve également l'initiative de Pierre Larrouturou de lancer des «états généraux de l'emploi».
Elle conclut son épistole militante par quelques mots sur ses partenaires politiques, alors qu'elle entend «créer une nouvelle majorité solidaire avec la gauche». Pour Duflot, l'enjeu qui se présente aujourd'hui devant Europe-Ecologie est de «construire une formation à vocation majoritaire», comme «creuset du projet de transformation sociale du XXIe siècle», opposant «l'émancipation, l'autonomie et le partage des richesses» à un «ultralibéralisme matiné d'autoritarisme», mais aussi qui ouvre des perspectives face à la «décrue et au renoncement de la social-démocratie» ou à «l'utopie communiste morte autant de ses emballements que de ses trahisons».