Le 20 mars dernier , Alain Bauer, criminologue et président du Conseil d’orientation de l’observatoire national de la délinquance , a remis un rapport – du type dense – à Nicolas Sarkozy. La sécurité globale, pas moins. Soit une pensée stratégique capable d’intégrer la défense nationale, la sécurité publique, la protection des entreprises ou la sécurité environnementale, remède envisagé à l’actuelle atomisation des compétences.Soit encore, pour nous autres citoyens, quelque chose qui va de l’attaque nucléaireaux catastrophes naturelles, en passant par le terrorisme international, la délinquance et la criminalité sous toutes leurs formes, y compris transfontière, les questions de défense, la violence routière, ou l’accident écologique. Le risque étant d’aboutir à une vision apocalyptique, à un monstre sécuritaire, susceptible de dérives, pas forcément efficace.Un piège que la commission Bauer a évité, estime Pierre-Victor Tournier, directeur de recherches au CNRS, membre de ladite commission et organisateur d’un colloque, et débat public, qui se tiendra le 10 juin prochain à la Sorbonne sur le sujet.
Après moult auditions ( militaires, grandes entreprises, gendarmes , policiers, chercheurs) la commission ne propose pas de fusion globale des institutions de recherche, tout le monde avec tout le monde, mais la création d’une superstructure, le CSFRS ( Conseil supérieur de la formation et de la Recherche Stratégique),chapeautant des mariages de raison. Côté Défense, l’IHEDN (Institut des hautes étudesde la défense nationale) fusionnerait avec le CHEAR ( Centre des hautes études de l’armement). Côté sécurité, l’INHES (Institut national des hautes études de sécurité) fusionnerait avec l’IERSE ( Institut d’études et de recherche pour la sécurité des entreprises). Ces propositions viennent de recevoir, il y a une semaine, l’aval de Nicolas Sarkozy, qui a missionné Alain Bauer pour une « préfiguration » concrète du projet.
Quid des questions pénales et criminologiques, là haut sous le CSFRS ? Intégrées, voire noyées, ou autonomes, voire revisitées ? C’est à cela que sera consacré, en bonne partie, le colloque du 10 juin. Création d’une entité propre ? Certains considérant l’Institut des hautes sur la Justice comme un haut lieu de la philosophie du droit, maispeu efficient en matière de politique pénale, envisagent la création d’un Observatoire national de la délinquance (OND) aux compétences très élargies, qui se muerait en Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales ( ONDRP). L’OND quitterait ainsi le giron du ministère de l’Intérieur, pour se retrouver sous la tutelle du Premier ministre. Avec, si possible, ouverture accrue aux chercheurs, universitaires.
Avantage : un suivi et une réflexion sur la question, sans l’habituelle césure Intérieur/Justice. Problème éventuel : reste à savoir qui figurerait au Conseil supérieur de la formation et de la recherche stratégique, garant de l’indépendance par rapport au pouvoir politique. L'OND a déjà connu quelques remous en 2007 lorsque l'un de ses membres, Cristophe Soullez, et Luc Rudolph, ex-conseiller de Nicolas Sarkozy à l'Intérieur, ont publié un opuscule à la gloire de la politique sécuritaire de celui-ci.
Colloque : La formation et la recherche en matière « stratégique », Défense, sécurité, questions pénales et criminologiques, mardi 10 juin 2008, de 9h30 à 13h, débat public , Cité Saint-Martin, 4, rue de l’Arsenal, Paris IV e, salle Van Gogh, métro Bastille.