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Billet de blog 24 novembre 2011

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Benshi : la voix impénétrable du cinéma muet

L'art évolue, change, se transforme. Il se nourrit de son environnement et de l'air du temps. Le cinéma, la musique, le théâtre et les arts plastiques s'influencent, puisent leurs inspirations les uns dans les autres et se mélangent pour créer de nouvelles tendances. Au Japon, il existe une exception : le benshi.

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L'art évolue, change, se transforme. Il se nourrit de son environnement et de l'air du temps. Le cinéma, la musique, le théâtre et les arts plastiques s'influencent, puisent leurs inspirations les uns dans les autres et se mélangent pour créer de nouvelles tendances. Au Japon, il existe une exception : le benshi.


Né au début du vingtième siècle, cet art, issu de la tradition théâtrale japonaise, se concentre sur la narration et l'analyse cinématographique. À ses débuts, le cinéma était exclusivement muet. Le benshi, qui désigne à la fois l'art et l'artiste, avait pour mission de parler à sa place, en commentant l'action et en orientant le regard du spectateur sur certains détails du film. Placé sur une scène à côté de l'écran et accompagné de musiciens, le benshi se glissait dans la peau des personnages à partir de dialogues écrits de sa propre plume. À l'époque, les benshi étaient de véritables "stars". Le public se déplaçait davantage pour assister à leurs performances que pour voir le film. Fort de son succès, le benshi serait à l'origine du retard du cinéma parlant au Japon, qui n'est apparu qu'en 1931.

Fermé aux influences

Cet art d'un autre temps continue d'exister. Il puise sa force dans le respect des codes et de la tradition. Il s'oppose ainsi radicalement aux arts modernes, fruits de nombreux métissages artistiques, parfois même liés aux nouvelles technologies. Le benshi est resté hermétique aux influences étrangères et il reste, encore aujourd'hui, exclusivement pratiqué par des Japonais. Cet art insulaire demeure intact, dans la pure tradition nippone.

Ouvert au renouveau

Si le benshi n'a jamais fondé une autre forme artistique, il a grandement influencé le travail des cinéastes. Au départ, les films japonais étaient très statiques, avec peu de mouvements de caméras. À partir des années 20, les plans se multiplient, la caméra devient beaucoup plus mobile, l'action n'est plus coupée, notamment dans les films de sabres. Le benshi serait à l'origine de cette "nouvelle vague" : son caractère théâtral s'illustre à travers la continuité et le mouvement.

Toujours populaire

Aujourd'hui, le benshi existe à travers la japonaise Midori Sawato. Il a bien sûr évolué, mais il reste fidèle aux codes traditionnels. Les représentations données par l'artiste dans le monde entier et la séance hebdomadaire qu'elle tient à Tokyo attestent de la popularité du benshi. Midori Sawato offre un répertoire composé non seulement de films japonais mais aussi de films issus du "continent muet". L'art de raconter (storytelling) ou "d'embobiner" est une technique de communication familière aux politiques. Cependant, ils ne semblent pas s'être inspirés de la poésie du benshi.

Si vous souhaitez découvrir l'art du benshi, Midori Sawato est présente au Grand T le 25 novembre dans le cadre de la rétrospective des studios Nikkatsu. L'occasion de suivre cette voix singulière dans l'univers de deux classiques du cinéma japonais : La marche de Tokyo de Kenji Mizoguchi et Jirokichi the rat de Ito Daisuke.

Jonathan Gerin, M2 InfoCom Nantes


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Légende photo : Extrait du film Jirokichi The Rat de Daisuke Ito.

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