en réponse à un article sur le Binge Drinking en Irlande (Yolaine Maillet)
L'alcool du vendredi et samedi soir (voire du dimanche) est devenu une façon de vivre chez les jeunes par chez moi aussi, et aussi avec ce genre de boissons très sucrées qui font passer l'alcool. Je suis médecin généraliste, et le passage des 15-20 ans au cabinet n'est pas si fréquent que cela, surtout pour les garçons (pas de contraception pour eux...); alors il faut à tout prix saisir ce moment (une angine, un certificat de sport...) pour aborder le sujet avec eux. On commence par le tabac, c'est plus facile d'en parler... et l'alcool? ah! non, je ne bois pas, enfin, si, le week-end, comme tout le monde, avec les copains, quoi! (air béat de celui qui se rappelle sa dernière cuite...) J'essaie alors de démarrer une discussion (type entretien motivationnel), je leur demande ce qui leur plaît là dedans, comment c'est le lendemain, si leur copine trouve ça top, ... en grattant bien, ils se rappellent, qui d'un copain qui a fini en coma éthylique à l'hôpital, qui d'une soirée terminée au poste de police avec une arcade fendue sans trop avoir compris ce qui s'était passé, qui la copine avec qui ça ne marche plus trop et tourne le dos en se couchant. Certains même parlent de leur père que l'alcool a rendu irresponsable, mauvais, voire violent.
Un lundi matin, un de mes jeunes patients s'est effondré dans mon bureau en sanglotant. Il avait passé avec quelques copains une de ces soirées du samedi et avaient "réconforté" à leur manière leur pote qui s'était fait plaquer par sa copine. Puis chacun était reparti chez soi, bien alcoolisé. Sauf le jeune au chagrin d'amour qui avait fini la nuit dans sa voiture et s'était pendu au petit matin dans la grange à côté... Personne n'aurait pu imaginer qu'il allait faire ça. Il n'aurait pas du mourir, allait bien dans sa famille, il n'était pas dépressif, à 18 ans, même si c'est dur de se faire plaquer, on survit, ou alors personne n'atteindrait l'âge adulte...
pour les autres, aux cuites du samedi soir font suite au bout de quelques années un apéro, une ou deux bières le soir, puis le midi, et puis une partie d'entre eux devient alcooliques et bousillent leur famille, les autres juste dépendants (ils ne le savent pas mais ne peuvent rester plus de 3-4 jours sans boire, et d'ailleurs, à quoi ça servirait, hein?) ceux là, à 50 ans, quand on leur demande s'ils boivent de façon habituelle répondent "comme tout le monde" avec un clin d'oeil.
Et ceci n'est pas anecdotique, dans ma région, on n'aime pas produire les statistiques sur l'alcool. ça nous fait honte... Comme c'est bizarre, le suicide des jeunes aussi a le vent en poupe, et les accidents de voiture...
Et pourtant j'aime bien un bon verre de vin rouge de temps en temps...