Neuf mois pour accoucher, cela n'étonnera personne.Lorsqu'il s'agit d'un projet ministériel cela peut même prendre des alluresd'étonnante rapidité. Pourtant, le bébé n'a rien d'un prématuré mais seprésente mal et les forceps sont à portée de main.
Le projet de loi « hôpital, patients, santé,territoires » ne semble pas convenir à ceux qui sont impliqués par cetteréforme, qui ignore purement et simplement des acteurs clés et complique encoredavantage les choses sur le terrain.
Parmi ceux qui ont eu la rare possibilité d'émettre un avissur le projet, le conseil de la caisse nationale d'assurance-maladie n'a pashésité à s'y opposer en l’affirmant dans un communiqué dès le 9 octobre dernier. Ceconseil en dénonce notamment « lerisque d'étatisation lié au regroupement des services et aux modalitésd'articulation des nouvelles instances avec l'assurance-maladie.» Lesreprésentants d'assurés sociaux, d'employeurs et de mutuelles qui y siègent ontvivement regretté « l'aspectpurement formel de la concertation préalable qui n'a pas permis de véritablesdébats. »
En effet, il faut bien reconnaître, que ce manque dedialogue a comme un arrière-goût « d'états généraux de la santé » quidéjà en février dernier s'étaient déroulés dans un premier temps en l'absencedes représentants des médecins spécialistes plutôt concernés par les questionsdébattues. Au-delà de la méthode, la physionomie du bébé où les contours duprojet ne laissent aussi personne indifférent.
Ce projet colorié de modernisation s'attaque en priorité auxressources humaines même si les économies restent un objectif comptableindéniable. Ce texte, dote les établissements publics de santé d'un conseil desurveillance et ceux qui dirigeront les plus grands hôpitaux de France que sontles centres hospitaliers universitaires, seront ni plus ni moins nommés pardécret en conseil des ministres. S'ensuit, une mécanique savamment complexedélayée dans plus de 50 articles pour expliquer qui nommera qui, surproposition de qui, et cela devrait occuper tranquillement tout l'hiver lessyndicats professionnels.
En ce qui concerne les médecins, les présidents des comitésmédicaux d'établissements semblent particulièrement désabusés. « Le gouvernement prendra sa décision, maisnous prendrons nos responsabilités, » annonce l'un d'entre eux. Après la création des pôles au sein deshôpitaux, réorganisation qui a déjà apporté la preuve de son inefficacité, cettenouvelle contrainte dirigiste au regroupement pour pousser les gens àtravailler ensemble ne semble pas être la recette adaptée pour faire collaborerles hospitaliers et les libéraux.
Du côté des directeurs d'hôpitaux, l'anesthésie semble déjàavoir agi puisque peu de réactions se font entendre alors que le réaménagementdu territoire en matière de santé, créé des communautés, qui d'un trait deplume leurs supprimeront toute autonomie.
La création de ces agences régionales de santé vouées« à rapprocher la gestion du risqueet l'organisation des soins » est présentée comme l'une des mesuresphares de cette réforme. Là aussi, on ne peut que s’interroger. Leur pilotageconfié à un « directoire »et à un « conseil desurveillance » donne naissance aux communautés hospitalières deterritoire. Cette organisation calquée sur le système bancaire laisseévidemment rêveur compte tenu des sombres heures vécues dans la communauté financière. Lespolitiques et le gouvernement donneront-ils à l’hôpital les moyens de gérer sespropres urgences ? Rien ne le laisse espérer. Le projet présenté ce matinen conseil des ministres prévoit notamment de faire disparaître les 350 hôpitauxpublics. Un premier pas, mais vers quoi ?