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Le parti d'en rire

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Billet de blog 11 septembre 2010

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Easy Caravane-Riders

Comme chaque été, les politiques ne s’économisent pas dans le brassage d’air afin de ne pas être emportés dans la bourrasque du remaniement de la rentrée. Voilà pourquoi l’été fut frais.

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Comme chaque été, les politiques ne s’économisent pas dans le brassage d’air afin de ne pas être emportés dans la bourrasque du remaniement de la rentrée. Voilà pourquoi l’été fut frais.

La France a peur. Chaque année, des millions de personnes vont et viennent au travers de nos perméables frontières. Des gens, pas comme nous, qui confondent reblochon et fromage à raclette, qui mélangent soda et vin, ou, pire, qui préfèrent la mer à la montagne. Tout le territoire est accablé par ce fléau, et cette année encore, comme cela devient une habitude depuis l’été 1940, une horde de chars en provenance des Pays-Bas et d’Allemagne débarquent. Enfin, des caravanes essentiellement, bien que quelques engins volants aient été repérés malgré leur coque de transport. Tous prêts à prendre possession des zones qui leur avaient échappés lors de la Dernière, et ce en dépit des institutionnels rackets au péage. Les Landes et la côte méditerranéenne se voient alors transformées en camping géant – sans Dubosc, faut pas déconner non plus.

La propagande

Du fait de ces mouvements de population, la France a vraiment peur. Moi pas tellement j’avoue, mais l’IFOP ne m’appelle jamais alors… Heureusement, nos brillants gouvernants ont immédiatement localisé la source du problème – et inventé une loi au passage. La faute incombe évidemment à ces gens qui viennent de l’est, d’Allemagne ou d’ailleurs et qui refusent de s’adapter. A-t-on jamais vu un Bavarois célébrer l’heure de l’apéritif au Pastis ? Ou un habitant des bords de l’Amstel troquer son Heineken contre un rosé bien frais de par chez nous ? Bien sûr que non ! Ces gens-là viennent en caravane de trois ou quatre roulottes débordantes de vivres et restent à l’écart des autochtones le temps de leur séjour. Ce n’est pas la culture locale qui leur importe, simplement le climat. Ce ne sont que des peuples de jaloux.

Erreur de stratégie

Alors, comme l’a rappelé Harry Roselmack, qui n’a pas le crâne rasé pour rien, la France a très peur. Il faut dire que le ministre de l’Industrie met à mal celle du caravaning à force de plaidoyers en faveur d’une France plus belle, plus propre, plus sûr et qui ne bouge pas. Difficile donc de ne pas devenir suspicieux dès lors que l’on croise un Manouche ou un Hollandais. D’ailleurs M. Estrosi, le sémillant maire de Nice, semble s’être inspiré de l’émission Nice People qui avait élu domicile sur la Côte d’Azur. Il égraine les caméras de surveillance dans sa ville et tente, en vain, de convaincre ses homologues – qui sont rarement à droite hors de la région PACA. L’objectif de cette surveillance à distance est de lutter contre les névroses de nos cons citoyens, comme jadis la ligne Maginot avec le succès qu’on lui connaît. Il va de soi que la fourberie poussera les malfrats à contourner le champ de vision des vidéo-surveillants. Ce qui revient donc à déplacer un problème sans le résoudre. Des outils aussi efficaces que des blindés enterrés dans le sol comme nous les vîmes lors de la Bataille de France. Mais le dessein de cet arsenal n’est-il pas justement que les problèmes se déplacent, puisque personne ne sait les résoudre ?

Manque de patriotisme

Toujours est-il qu’en France, on a peur. Pas de nos chers ministres ni de notre président évidemment. Quoi que ? Vu tous leurs déplacements, on pourrait les catégoriser « gens du voyage », même s’ils fréquentent plutôt les hôtels de luxe que les campements avec douche collective. Je vois tout de même de leur part deux mesures en matière de traitement selon la provenance des caravanes. Et même un manque cruel de patriotisme. On croise fréquemment des campings, où stationnent des mobile home flanqués d’un NL ou un D, équipés d’une piscine, d’aires de jeux pour les enfants et situés à l’écart de la décharge municipale. Les convois français quant à eux sont loin d’avoir cette chance. Un terrain vaguement déblayé, un tuyau d’eau et une armoire reliée au réseau EDF : tout le confort du nomade moderne en somme.

Radio Londres

Cet été, nombreux furent les audacieux, et peu originaux, qui osèrent comparer les mesures de notre gouvernement aux évènements que l’on connut au nord de Vichy dans les années quarante. Qu’il s’agisse de l’O.N.U., du New York Times, ou de la presse française, tous s’accordent à dire que la Gestapo et ses rafles – qui sortira sous peu en DVD ! – sont remis au goût du jour. Les anglais du Times étaient jadis moins virulents à propos du délogement des calaisiens qui attendaient leur départ prochain pour l’île de la Reine, soit dit en passant. D’ailleurs M. Sarkozy n’a rien du maréchal Pétain, le premier « combat » l’insécurité depuis sept années sans résultat mais avec une persistance rare dans l’échec – que l’on ne connaît guère que chez les sélectionneurs d’équipe de France de football –, alors que le second secouait son mouchoir blanc après seulement vingt jours de conflit. On imagine mal notre Nicolas, Kleenex en main, dans la périphérie de Grenoble. Pugnace et opiniâtre qu’il est, il ne s’y résoudra pas. Surtout qu’il sait que s’il lâche du terrain, Marine s’en occupera pour lui ; et rien ne lui serait plus désagréable que de se faire battre par une fille.

Au final, il me semble bien avoir peur à mon tour.

Publié le 29 août sur www.leshainarques.org

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