En 2003, les abeilles tombent comme des mouches. La faute au Régent et au Gaucho disent les apiculteurs de Midi Pyrénées. Problème. Le tribunal de st Gaudens, au terme de 4 ans de procédure, vient de rendre un non lieu. Pour lui, il n’y a pas de « lien incontestable » entre la sur- mortalité des abeilles et la présence de Friponil dans le Régent.
Cette année là, les abeilles du rucher de Jean Claude Cauquil, apiculteur haut garonnais, perdent le nord. Après avoir butinées, elles ne retrouvent plus le chemin de la ruche, elles sont incapables d’y rentrées, elles meurent par centaines de milliers sans avoir fait le moindre miel. Dans d’autres ruches, le phénomène est identique. Plus de 20 millions d’abeilles sont ainsi touchées un peu partout en France. Les apiculteurs cherchent des causes à ce phénomène qui pour eux relève de l’intoxication. Et ils mettent en cause deux pesticides – le Régent et le Gaucho – qui depuis ont été interdits à la vente. Ils alertent aussi les médias sur la mortalité de l’abeille qui est un bio indicateur puisque elle butine toutes sortes de plantes et de fleurs. De plus, sans elle, il n’y a plus de pollinisation, autrement dit la disparition de l’abeille met en danger la production de fruits et légumes qui ont besoin de son travail quotidien. Devant l’ampleur des dégâts, ils portent également plainte « pour mise en vente de produits toxiques nuisibles à la santé de l’homme et de l’animal ».
Pour éclairer sa lanterne, le juge d’instruction sollicite donc l’avis des experts. Plusieurs rapports sont produits. Certains, comme celui du Comité scientifique et technique de l’étude multifactorielle des troubles des abeilles, publié en Février 2008, explique que l’analyse comparait de plusieurs abeilles exposées au risque neurotoxique lié à la présence de Fipronil « ne permet pas d’exclure des risques inacceptables ». Autrement dit, tout est possible mais rien n’est définitivement certain, prouvé. Ce qui dans la bouche des apiculteurs devient pourtant une certitude. Pour eux, le Fipronil fait courir « des risques inacceptables » aux abeilles. D’autres rapports vont plus loin dans l’absence de liens entre cette substance et la mort des abeilles. C’est pourquoi, « à l’issue de très nombreux rapports d’expertises acquis au dossier, il n’est pas envisageable d’affirmer un lien incontestable entre le Fipronil (principe actif du Régent) dans l’enrobage des semences et les sur mortalités des abeilles constatées au cours des campagnes 2002.2003 » explique la justice qui prononce donc un non lieu contre les producteurs de ce pesticide. Dans les deux cas, on note les circonlocutions des experts qui n’affirment rien de manière définitive et laisse donc toute sa place à la suspicion.
L’affaire est cependant techniquement entendue. Reste que, suivant leur zone géographique d’implantation, les abeilles continuent de mourir de manière anormale et inexpliquée. Les apiculteurs mettent en cause le frelon d’Asie et le Cruiser, un nouveau pesticide qui a été autorisé à la vente jusqu’à la mi mai 2009. Mais échaudé par l’affaire du Régent et du Gaucho, les soutiens dont les apiculteurs disposent sont aujourd’hui plus timides. Il y a deux ans, un livre « Abeilles, l’imposture écologique » signé Gil Rivière Wekstein expliquait même que les apiculteurs avaient dévoyé le principe de précaution en criant au loup contre le Gaucho et le Régent.