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Billet de blog 7 juillet 2009

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Le dimanche, on promène son chariot à Martres-Tolosane

Ce n’est pas une zone touristique,ni une grande agglomération, juste un village de deux mille habitants à 70 km de Toulouse. Il n’y a rien qui puisse attirer là, la foule des grands jours. Rien, sauf une curiosité locale. Le magasin Super U– commerce d’alimentation – ouvre ses portes tous les dimanches, avec derrière les caisses enregistreuses, des étudiants et des salariés volontaires, et devant les portes, des manifestants FO et CFDT.

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Ce n’est pas une zone touristique,ni une grande agglomération, juste un village de deux mille habitants à 70 km de Toulouse. Il n’y a rien qui puisse attirer là, la foule des grands jours. Rien, sauf une curiosité locale. Le magasin Super U– commerce d’alimentation – ouvre ses portes tous les dimanches, avec derrière les caisses enregistreuses, des étudiants et des salariés volontaires, et devant les portes, des manifestants FO et CFDT.

Il est 8 H 45 ce Dimanche. Les salariés sont déjà dans le magasin. Devant, les opposants déploient leurs drapeaux FO et CFDT.Et les premiers clients arrivent. Ce sont majoritairement des papys et des mamies. Tous ont une explication pour justifier leur présence. Gérard rentre de voyage, « je n’ai plus rien à manger dans mon frigo » explique t-il. Nathalie aime bien se promener dans le commerce. Louise a des invités de dernière minute à qui elle veut faire un plat spécial. Mais « je suis contre le travail le dimanche » dit elle. Beaucoup hésitent à franchir le cordon syndical qu’il faut affronter pour entrer dans le magasin. La gêne est évidente mais plutôt que de rebrousser chemin, ils assument et passent sans rien dire. Certaines prennent le tract qu’on leur tend, les autres font comme s’ils étaient seuls au monde. Quand ils ressortent, ils ont dans le chariot, du pain, des pommes de terre, de la viande, des bouteilles de vin, des fruits. Bref, l’ordinaire des jours ordinaires.

Le directeur du magasin affiche la trentaine. Et face aux syndicalistes, il explique, sans rire, « qu’il ouvre pour rendre service à mes clients » et que « seuls 4 volontaires et des étudiants travaillent. Pour les étudiants, ca leur permet de payer leurs études, pour les autres, de gagner plus, ce qui n’est pas rien dans la situation actuelle ».Parmi les salariés volontaires et à temps plein, Patricia, responsable de la caisse accueil. Pour elle, le dimanche n’a rien de sacré. « Je suis là parce que j’ai signé un contrat pour travailler le dimanche matin. Je rentre à midi, j’ai l’après midi, et le mercredi je le passe avec mes enfants. Comme je suis payé double le dimanche, je travaille plus pour gagner plus » dit-elle. Paradoxalement, il ne lui vient pas à l’idée que si elle était mieux payée dans la semaine, elle n’aurait pas besoin de venir le Dimanche.

En fait, les syndicats sont là, « à la demande des salariés du magasin » assure Serge Armégniac de Force ouvrière. Pourtant aucun d’eux n’est là pour corroborer ses dires. « Le volontariat, c’est du bidon. Quand on n’a pas le choix, on travaille quand on vous le demande. Plus il y aura de chômage, plus il y aura de volontaires, c’est évident. Le risque, si la loi est adoptée, c’est la généralisation du travail le dimanche. Pourquoi refuserait-on à un patron toulousain, ce qu’on accorde à un patron marseillais. L’autre risque, c’est qu’une fois généralisé, il n’y aura plus de raison de payer ce travail en heure double puisque ca deviendra un jour comme les autres. »Pour le syndicaliste, les employeurs ont d’autant plus de facilité à « imposer » ce travail qu’il n’y a pas de syndicats dans l’entreprise. « On a fait des élections de délégué du personnel, vous n’avez présenté personne » lui rétorque le directeur du magasin qui touche là, un point sensible. En effet, en l’absence de syndicats, les salariés sont seuls pour déterminer quelle attitude adoptée sans risque. Livrés à eux-mêmes, ils arbitrent donc entre deux contraintes : le besoin de gagner plus pour vivre décemment et la peur de se démarquer des autres. D’autant que dans le commerce en général, « si vous êtes dissident, on peut facilement vous sanctionner » affirme Belkacen. Il travaille dans un magasin toulousain. « L’employeur peut vous refuser vos vacances aux dates qui vous intéresse ou vous faire un emploi du temps morcelé. Moi, si la loi passe, je pense que je vais changer de métier ». Les opposants plaident aussi pour que le Dimanche reste un jour de vie sociale riche en activité familiale ou associative. Et puis, ne rien faire est aussi un plaisir. Ce qui pour certains est synonyme d’ennui. « Nous avons chaque dimanche 5 à 600 consommateurs » affirme le directeur du magasin.

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