Alain Refalo est un homme calme et déterminé qui persiste. Il a déjà perdu 19 jours de salaires pour avoir refusé d’appliquer la réforme Darcos, en particulier le dispositif d’aide personnalisée qui prévoit deux heures de soutien aux élèves en difficultés. Ce jeudi, il était convoqué en conseil de discipline. Le rectorat reproche à cet enseignant de Colomiers, prés de Toulouse, d’avoir remplacé ce soutien individuel par un travail collectif, notamment un atelier théâtre. Il risque – tout comme Bastien Cazal à Montpellier – un licenciement pour « insuffisance professionnelle » et « non respect de ses obligations professionnelles ».
En toile de fond de ce conseil de discipline, il y a une question de fond. L’enseignant est il oui ou non un citoyen qui, comme les autres, peut exprimer sur son lieu de travail une opinion. Pour le rectorat, le débat n’existe pas. Alain Refalo est un fonctionnaire qui n’a pas à discuter le bien fondé des lois et qui doit, par conséquent, appliquer le programme pour lequel il est payé. S’il ne le fait pas, il est hors la loi. Certes, « les fonctionnaires sont tenus au secret professionnel » estime Gérard Aschieri, secrétaire général de la FSU mais « la liberté d’opinion est (également) garanti aux fonctionnaires » explique t-il. Dans une lettre ouverte au rectorat, le syndicaliste estime que l’analyse d’Alain Refalo « entre en résonnance avec l’état d’esprit de la profession » et « le sanctionner pour délit d’opinion serait particulièrement inadmissible et créerait un précédent grave pour le droit syndical et plus largement les droits et libertés des fonctionnaires ». La FSU apporte donc son soutien à l’enseignant. D’autres syndicats réclament également « qu’aucune sanction ne lui soit appliquée », tout comme les 500 personnes réunis devant l’inspection d’académie pour le soutenir.
Initiateur d’un mouvement de résistance baptisé les « désobéisseurs », Alain Refalo estime que « le ministère a décidé de mettre un coup d’arrêt à ce mouvement en frappant à la tête. Mais je vous le dis : nous n’allons pas céder. Nous allons poursuivre cette résistance car nous ne pouvons pas continuer à nous renier et être complices de dispositifs porteurs d’un esprit individualiste, continuer à construire une société d’injustice où règne la loi du plus fort, car nos valeurs sont celles de la coopération, de la justice, de la solidarité, et ça nous ne le renierons jamais ». Commencé sans la moindre concertation, le mouvement d’Alain refalo regrouperait en France 2 807 « désobéisseurs », et de nombreux autres professeurs des écoles sont solidaires, sans pour autant s’être dénoncés à leur rectorat.
L’inspection d’académie de Toulouse devrait attendre quelques jours avant de faire connaître sa décision.