«Ca s’annonce comme la grève la plus importante depuis 2003, voire plus ». Ainsi parle Christian Bellinguer, du syndicat SNUIPP de la Haute Garonne. Selon les derniers décomptes effectués par le syndicat, le taux de participation des enseignants à l’action de ce 20 Novembre devrait avoisiner les 80 à 85 % dans le département. Plusieurs centaines d’écoles – de la maternelle au lycée – seront ainsi purement et simplement privés de tout enseignant. C’est dire la colère des professeurs contre la suppression régulière de postes dans l’Education Nationale.
La grève ne sera pas qu’un moment de protestation syndicale mais aussi un bras de fer politique contre le gouvernement et sa loi sur le Service Minimum d’Accueil instaurée par la loi du 20 Août dernier. Une loi qui créee face au droit de grève un véritable droit de garde et qui transfert son application de l’Etat vers les communes lesquelles plaident non coupable. «La loi est techniquement inapplicable » explique Gisèle Verniol, élue chargée de l’Education à la mairie de Toulouse. « Pour l’organiser, il nous faudrait trouver 1900 volontaires encadrants qualifiés en 48 heures ». En effet, du point de vue technique, il faut légalement un encadrant pour 12 enfants. « Quand on fait une sortie avec les enfants, il y a des conditions drastiques pour des questions de sécurité et là, avec cette loi sur le Service Minimum d’Accueil, n’importe qui, de non formé, pourrait accueillir les enfants. Le garde champêtre pourrait, dans l’absolu, se trouver avec 50 enfants à garder pour assurer le SMA » ironise Laurent Cadreils, instituteur dans le quartier populaire de Reynerie.
Nul ne sait non plus ce qui se passerait si d’aventure il y avait un accident. Les personnels d’accueil étant municipaux, la mairie serait-elle responsable, ou bien parce qu’ils agissent dans le cadre de l’Education Nationale, serait-ce l’Etat ? La loi ne répond pas à la question sur laquelle l’Etat s’assoit manifestement sans que cela lui pose problème. Le sien est en effet de réussir à imposer le Service Minimum d’Accueil. Et pour cela, il utilise tous les moyens.Tout d’abord, il présente l’accueil comme un nouveau droit offert aux parents et dément naturellement remettre ainsi en cause le droit de grève qui a toujours pour conséquence d’ennuyer quelqu’un. Ensuite, l’Etat utilise l’opinion public comme les fonctionnaires qui, chacun le sait, son des « nantis égoïstes ». Enfin, les préfets sont allés devant les tribunaux administratifs pour imposer le SMA. Celui de Toulouse a, par exemple, imposé à la ville la mise en place de ce service minimum. Mais c’est aussi le cas dans l’Aude, l’Aveyron, le Rhône, la Seine St Denis, les Hauts de Seine, L’Hérault, Paris, le Nord, etc… Ce qui fait dire à Bernard Dedeban, syndicaliste enseignant que l’Etat est plus prompt à imposer son SMA que la loi SRU sur le logement social. « le gouvernement met tout en œuvre pour nous imposer le service minimum, s’il faisait la même chose pour les 20% de logements sociaux dans toutes les communes de France, dont beaucoup sont tenus par des maires UMP, nous n’aurions pas les problèmes de logements que nous connaissons ».
Pour les villes de gauche, la bataille actuelle est une occasion en or de renouer avec une partie de sa base électorale. Le soutien n’est donc pas que technique. Pierre Cohen, député-maire de Toulouse, a ainsi écrit personnellement aux enseignants pour expliquer sa position. « Cette journée (…) est l’expression légitime des enseignants sur l’avenir de l’éducation » écrit-il. « L’équipe municipale que je conduis soutient sans réserve l’action des enseignants ». Reste une réalité. Certains parents d’élèves auront des difficultés à faire garder leurs enfants en ce jour de grève.