Un fonctionnaire, ça doit fonctionner, autrement dit appliquer sans états d’âmes la loi. C’est au nom de ce principe qu’Alain Refalo, professeur des écoles à Colomiers vient d’être sanctionné par l‘inspection académique de Toulouse.
Le « crime » de cet instit est de ne pas vouloir appliquer la réforme Darcos dont il estime qu’ « elle est contraire au bon sens, ne tient pas compte de nos expériences professionnelles d’enseignants et nuit finalement aux élèves ». Conséquence, non seulement, il ne l’applique pas, mais il l’a conteste. Il a ainsi écrit, au début de l’année scolaire, une lettre à sa hiérarchie pour lui expliquer les raisons de son refus. Une lettre publiée sur internet que des milliers de pétitionnaires ont approuvé en y apposant leurs signatures.
L’administration a réagi à sa manière, c’est-à-dire de façon purement technique. Il n’est en effet pas question pour elle de s’engager sur le terrain de ce qu’Alain Refalo appelle « la désobéissance pédagogique ». La chose n’est ni négociable, ni amendable. Elle a donc envoyé plusieurs fois dans sa classe un inspecteur chargé de contrôler la bonne application des directives ministérielles. Le contrôleur a ainsi pu constater qu’au lieu de consacrer deux heures hebdomadaires à l’aide personnalisée en petits groupes, l’instituteur conservait sa classe entière à qui il proposait des activités éducatives comme monter une pièce de théâtre. D’où la décision de lui ôter de son salaire autant d’heures que de refus, soit à ce jour l’équivalent de 5 journées. « Je constate ( simplement) que M. Refalo est un fonctionnaire et qu’il ne respecte pas la loi. Le fait qu’il garde la classe entière contrairement à ses obligations le place hors la loi » explique Jean Louis Baglan, inspecteur d’académie.
Convoqué par sa hiérarchie, l’instit, accompagné du syndicat SNUIPP, n’a pas manifesté de remords. Au contraire même. « Ce ne sont pas les sanctions qui vont me faire changer d’avis » explique t-il. « les parents de mes élèves eux-mêmes me soutiennent et mon combat est devenu un combat collectif. Il y a en France plusieurs milliers d’enseignants qui comme moi refuse d’appliquer la réforme Darcos ». Dans la région parisienne, ils seraient prés de 600, et environ 2.000 à l’échelle de la France. Mais localement, l’inspection académique de Toulouse affirme que seuls deux réfractaires lui ont écrit pour manifester leur refus d’appliquer le texte ministériel.
Quoi qu’il en soit, l’administration redoute un effet tâche d’huile. Au départ l’action d’Alain Refalo est en effet purement individuelle. Elle relève pour cet adepte de la non-violence de l’objection de conscience comme celle qu’ont pratiqué avant lui les réfractaires au service militaire. Dans sa lettre, le propos, particulièrement mesuré et argumenté, a le ton « catho de gauche » qui ne cherche ni à donner des leçons, ni a provoquer l’adhésion comme le ferait un tract. Au contraire, tous les mots sont pesés d’où seule perce la détermination objective qu’il y a des raisons de se révolter parce qu’il ne veut plus être un simple outil, à qui l’on dénie le droit de penser.
Alain Refalo va donc poursuivre sans animosité son combat quoi qu’il lui en coûte. Même au risque de perdre son emploi ? « je fais ce métier depuis 18 ans, je l’aime, et je ne vois pas pourquoi je devrais le faire autrement ».