Billet de blog 6 mars 2013

Kai 3Ufer

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Le référendum alsacien vu d’Allemagne

Le référendum du 7 avril portant sur la mise en place d’un Conseil Unique d’Alsace n’a pas encore suscité la moindre réaction en Allemagne. Pourtant, un tel conseil pourrait changer la donne dans la coopération transfrontalière.

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Le référendum du 7 avril portant sur la mise en place d’un Conseil Unique d’Alsace n’a pas encore suscité la moindre réaction en Allemagne. Pourtant, un tel conseil pourrait changer la donne dans la coopération transfrontalière.

Les Allemands, même les voisins badois, ignorent tout de ce référendum qui pourrait avoir un impact majeur sur cette coopération transfrontalière qui, dans de nombreux domaines, bat de l'aile et risque de se noyer dans le mille-feuille institutionnel. Car l'un des problèmes de cette coopération transfrontalière est l’asymétrie des administrations de part et d’autre du Rhin.

Difficile de trouver un interlocuteur sur l’autre rive disposant des mêmes compétences et contraintes. Municipalités, conseils généraux, conseil régional, préfecture – autant d’interlocuteurs pour la coopération transfrontalière – comment s’y retrouver lorsque l’on ne parle pas ou très peu le français ?

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R. Ries, sénateur maire PS, à gauche toute, P .Richert (UMP) à droite, un vide entre les deux. © K. L.

Vue depuis l’Allemagne, on a l’impression que ce référendum prend la même tournure que celui sur le Traité pour une Constitution Européenne qui, en France, avait également tourné en un vote «droite-gauche». Or, il s’agit de l’avenir de l’Alsace, il s’agit de rendre les administrations plus efficaces, il s’agit d’améliorer les structures qui concernent aussi la coopération transfrontalière. Mais ce référendum semble se développer vers un bras de fer entre le président de la région, Philippe Richert (UMP), et le sénateur-maire de Strasbourg, Roland Ries (PS). Une opposition entre l’Alsace rurale dominée par l’UMP et l’Alsace urbaine dominée par le PS.

Est-ce que les responsables alsaciens seraient en train de rater un rendez-vous avec l’histoire ? Est-ce que la question d’une administration commune pour toute l’Alsace doit se noyer dans des sensibilités politiques ? Pourquoi est-ce que les élus alsaciens n’ont pas réussi à faire campagne ensemble ? Pourquoi ce référendum a été si mal organisé ? Est-ce qu’il n’y avait pas au départ un «Congrès d’Alsace» réunissant toutes les sensibilités politiques et favorable à ce Conseil Unique ? Où est donc resté le sens de responsabilité pour l’avenir de la région ? 

Au vue des manoeuvres politiques dans ce dossier, il ne serait pas étonnant que les Alsaciens boudent ce référendum le 7 avril. Voter «OUI» serait donc un vote pour la droite, voter «NON» un vote pour la gauche. Ennuyeux au possible. La gauche alsacienne, pourtant favorable au Conseil Unique dans un premier temps, craint maintenant que ce Conseil Unique puisse ternir le rayonnement européen de Strasbourg. Personne n’a daigné expliquer aux citoyens en quoi une administration régionale et efficace pourrait ternir cette image européenne de Strasbourg. La droite alsacienne, elle, préconise le «OUI» sans avoir présenté une vraie approche équilibrée tenant compte des intérêts des villes alsaciennes. Quelque part, ce référendum aura été très mal préparé, les positions ne sont toujours pas très claires.

Pour les voisins allemands, une administration unique d’Alsace faciliterait les échanges transfrontaliers, rendrait la coopération transfrontalière plus facile. Mais ceux qui suivent le dossier en Allemagne craignent fort que cette occasion de renforcer la région se perde dans la «guéguerre» de la politique régionale. Quel gâchis !

Kaï Littmann, directeur de Eurojounal.net ( Freiburg)

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