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Le 8 mai dernier, les bus parisiens arboraient tous fièrement le drapeau tricolore, c’est-à-dire le symbole national par excellence. L’association « 8 mai – drapeau tricolore » signifie donc sans doute que nous fêtions en ce jour la victoire de la France (et de ses alliés) sur l’Allemagne nazie. Le 8 mai serait donc avant tout une fête nationale, comme il en existe d’autres dans notre calendrier (le 11 novembre et le 14 juillet aussi, les bus se transforment en porte-drapeaux…).

Il n’est pas question d’entrer ici dans le long débat historiographie sur la part d’individus qui, au sein de la société française, furent résistants, collaborateurs, « sans-avis », ou un mélange des trois. Il ne s’agit pas non plus de reprendre le débat qu’avait lancé Valéry Giscard d’Estaing au cours de son septennat en tentant de supprimer cette date comme jour férié. Toutefois, on peut relever que le 8 mai n’est peut-être pas le jour le mieux choisi pour célébrer la nation française (et encore moins sur des bus où les drapeaux côtoient – ironie du sort – une publicité pour l’exposition consacrée à l’exposition coloniale de 1931 et qui se tient du 6 mai au 7 septembre 2008 à Paris…). Non seulement le 8 mai 1945 les Déat, les Doriot, les Laval venaient de perdre leur guerre, mais surtout - et c’est cela qui importe - le Président Jacques Chirac reconnaissait en 1995, dans un discours officiel, « les fautes commises par l’Etat » lors de l’occupation : par l’Etat donc, et non pas seulement par des Hommes isolés. Mais au-delà, quel rapport avec « la nation » ? Le 8 mai, c’est la fin d’une guerre que l’on commémore (ajouter « gagnée par la France » relèverait du mythe gaulliste), ce sont ceux qui, victimes, opposants, ou soldats, perdirent leur vie dans le combat contre le fascisme qui sont honorés (et des milliers de Français en furent) : c’est la fin du nazisme qui mérite d’être fêtée, pas la nation française.

Les bus parisiens et leurs drapeaux français sont peut-être plus le signe d’une sorte de « réflexe » patriotique (jour férié historique = célébration de la nation française) que d’une lecture politique de l’Histoire. Dans le cadre du 8 mai, cette présence ostensible montre néanmoins une incompréhension totale des enjeux de la Deuxième Guerre mondiale et du rôle délicat, complexe, de la France au cours du conflit. Plus grave encore, la compréhension de ces événements devient ainsi secondaire. Remplacer les drapeaux par un peu d’Histoire permettrait sans doute de comprendre un peu mieux quels furent les enjeux de cette guerre, ses raisons, ses acteurs et ses drames.

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