Véronique Duval (avatar)

Véronique Duval

Abonné·e de Mediapart

Billet publié dans

Édition

Vert-tige

Suivi par 448 abonnés

Billet de blog 16 novembre 2019

Véronique Duval (avatar)

Véronique Duval

auteure, éditrice

Abonné·e de Mediapart

Chris de Stoop à Cognac pour Ceci est ma ferme

Rencontre avec Chris de Stoop, auteur de Ceci est ma ferme, au salon des littératures européennes de Cognac : dimanche 17 novembre. Un homme contraint de reprendre l'exploitation familiale en Flandres découvre ce qu'est devenue la paysannerie moderne. Edité chez Christian Bourgois, le livre a reçu le prix du Livre du Réel cette année.

Véronique Duval (avatar)

Véronique Duval

auteure, éditrice

Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Vendredi soir, je rencontre Chis de Stoop qui vient d’arriver au festival de littérature européenne de Cognac. Nous parlons de son livre, afin de préparer l’intervention prévue dimanche matin.Je viens de le terminer, je suis habitée par ce récit poignant. Face à moi, un homme au visage long et fin s’exprime avec infiniment de retenue.

Chris de Stoop est belge flamand, écrivain et journaliste. Ceci est ma ferme est paru en 2018, en néerlandais. Le livre a eu un grand succès en Belgique et aux Payx-Bas.Trasduit en français, il a reçu cette année le Prix du livre du réel*, décerné à la Maison de la Poésie à Paris. 

Issu de deux lignées de paysans, Chris de Stoop a grandi avec son frère dans la ferme familiale, situé dans les polders qui bordent l’Escaut, près du port d’Anvers. Il l’a quittée pour devenir écrivain et journaliste. Son frère avait la vocation et est devenu paysan, associé avec sa mère au décès du père. Après le suicide de son frère, le narrateur revient à la ferme et mène l’enquête sur la situation des paysans des polders, du côté du port d’Anvers.

Dans cette région gagnée sur la mer, les fermes sont installées depuis des siècles. Le paysage intègre une centrale nucléaire, un mega-complexe chimique et les porte-containers hauts comme des immeubles.
Le port veut s’agrandir. Des compensations écologiques sont prévues : pour chaque hectare de port, un hectare de « nouvelle nature ». Pour 800 hectares de port, 800 hectares sont attribués à une association écologiste pour créer de la  « nouvelle nature ». Ces  1600 hectares sont pris sur les fermes alentours. Les paysans sont expropriés. Les fermes centenaires sont détruites. Les paysages séculaires sont bouleversés. On coupe des arbres, on inonde des terres. 

1es  paysans protestent, manifestent, résistent. Rien n’y fait. Les habitants historiques de ce territoie sont chassés de chez eux, Au nom de l’économie, par une alliance  qui se proclame « pragmatique » de la mondialisation et d’une écologie bureaucratisée, passée à la moulinette d'une vision "écocentriste". 

Sans ce livre, d'une sobriété et d'une sensibilité lumineuses, qui raconterait cette histoire ? Hormis un reportage paru dans Libération sur la ville fantôme de Doel, je n'ai trouvé nulle part de tel récit. En revanche, j'ai trouvé plusieurs publications vantant la depolderisation, et des documents de la Commission européenne. Nulle part, la situation humaine n'est évoqué autrement qu'en terme de "résistance au changement".

*Créé en 2016 par la librairie Mollat et le journal Sud-Ouest, le Prix du Livre du Réel promeut des livres de non-fiction qui associent la littérature et l'enquête. Le jury est composé de : Florence Aubenas, Yves Harté, Jean Paul Kauffmann, Philippe Lançon, Florence Martin-Kessler, Olivier Weber, Pierre Coutelle et Sylvain Arrestier. 

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.