Lettre ouverte à Patric Jean suite à sa tribune publiée dans l’édition du Monde du 18 février 2013, « L’Escalade des pères à Nantes cache une proposition de loi »
Le nouveau monde n'est pas la vieille Europe, comme le disait il y a quelques années monsieur Bush, à propos du refus des Français de s'engager dans une nouvelle guerre de religion. La Domination Masculine de monsieur Patric Jean est un documentaire ethnologique très intéressant qui révèle les dysfonctionnements dans les rapports entre les hommes et les femmes au Canada. Faut-il rappeler que les Français ont perdu le Canada au profit des Anglais depuis le 18ème siècle? Depuis chacune de ces 2 nations a suivi son parcours. Si des hommes et des femmes divorcent en Amérique du Nord, ils en font de même en Europe. Là s'arrête la comparaison. Ou presque, hélas! En France comme ailleurs, des femmes, des hommes et des enfants sont battus, parfois violés. Quelle grande honte pour nous tous. SOS papa, association de défense du droit des pères à voir leurs enfants, condamne fermement tous ces actes abjects qui s'opposent au sens même d'humanité.
Non, Monsieur Patric Jean, à SOS Papa comme dans de nombreuses associations de pères, nous n'avons pas la nostalgie de l'époque où les « vrais hommes » comme vous dites, en toute impunité se permettaient de battre des femmes, de violer des enfants et tabasser des « pédés », voire même de « ratonner ». Et nous ne voulons pas, non plus, dans notre association de nostalgiques du « pater familia ».
Les femmes travaillent, votent, possèdent un compte en banque, portent des pantalons et c'est tant mieux. Les homosexuels s'aiment et vivent ensemble au grand jour, et nous n'avons rien à y redire. Nous ajoutons que nous nous félicitons que le divorce mette fin à des unions malheureuses...
Le complot mondial des « Masculinistes » n'existe pas plus que le « Protocole des Sages de Sion ». Votre paranoïa du complot fait penser aux heures sombres où on voyait partout le complot judéo‐maçonnique ou communiste.
De quel bord êtes‐vous Monsieur Jean ? Assurément pas un féministe. Quant à SOS papa, ce n'est pas le « White Power » à la française, et nos adhérents et adhérentes ne se prennent pas pour John Wayne.
Si vous aviez fréquenté nos permanences, vous auriez simplement vu des hommes venir nous parler de leur souffrance. Ils sont parfois accompagnés de leur nouvelle compagne, mais aussi de leurs parents ou de leur famille. Nous ne poussons pas au conflit. Nous conseillons dans l’intérêt de l’enfant qui est le plus souvent de voir ses deux parents. Nous tentons d’apaiser ceux qui viennent nous consulter. Oui, Monsieur Patric Jean, les hommes sont vulnérables et ils souffrent d'être privés de leurs enfants. Et leurs enfants sont les premières victimes de cette absence du père, comme le montrent les chiffres de la dernière enquête de l'INED (Population & sociétés, n° 500, mai 2013).
Quand à votre négation du phénomène de l'aliénation parentale, apprenez monsieur, que des experts aussi divers que madame Marie‐France Hirigoyen (dans son ouvrage La Perversion Narcissique), ou encore le docteur Ben Sussan (dans un récent documentaire sur France 5), y font référence...
Enfin, pouvez‐vous sérieusement penser que nos élus qui viennent de montrer leur désir d'adapter la loi aux mœurs de nos contemporains, seraient assez pusillanimes ou réactionnaires pour accepter le chantage d'un soi‐disant lobby « masculiniste »? Croyez‐vous que nos élus veuillent un retour, pur et simple, au code de la famille du 19ème siècle?
De deux choses l'une, soit vous prétendez sérieusement ce que vous avancez, et vous êtes – pour le moins – mal informé. Dans ce cas, nous vous encourageons à prendre connaissance des travaux en sciences humaines concernant le sujet et nous vous invitons à « faire du terrain », à venir enquêter dans ces lieux que sont nos permanences et où des pères trouvent un refuge à leur douleur, à leur désespoir, à leur légitime besoin d'aide et d'écoute. Vous pourrez alors citer de vrais témoignages et parler de façon éclairée d'un sujet grave qui mérite votre respect.
Soit votre propos est purement publicitaire et c'est le seul moyen que vous ayez imaginé afin de faire la promotion de votre film. Et dans ce cas, nous appelons les adhérents de SOS papa à voir votre film, afin de pouvoir rejeter, en connaissance de cause, l'étiquette de « masculiniste » que vous voulez leur faire endosser.
À force de vouloir crier au complot et de stigmatiser l’expression – maladroite souvent, excessive parfois, exagérée rarement – de pères qui ne peuvent voir leurs enfants que 4 jours par mois, n’avez‐ vous pas peur d’aider à l’instauration d'une nouvelle forme d'exclusion? Voulez-vous mettre au ban de la société des hommes et des femmes qui réclament que les enfants puissent avoir accès à leurs deux parents ? Comment appeler cette volonté d’exclure un des parents en raison de son genre?
Vraiment, Monsieur Jean, si pour des raisons inégalitaires vous ne pouviez voir vos propres enfants que 4 jours par mois, n’auriez‐vous pas raison de vous révolter ?
Jean‐Michel Delacour et Richard Walter, militants de SOS Papa