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Billet de blog 28 janvier 2017

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Les primaires du PS sont elle devenues celles des Pieds Nickelés ?

Comment le parti socialiste s'est pris les pieds dans le tapis

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"Le Parti socialiste perd toutes les élections, y compris celles qu'il organise" a commenté drôlement Alexis Corbière, après les cafouillages du lendemain du premier tour. Le Parti socialiste n'a peut être pas encore perdu ses propres élections au sens figuré du terme mais il a semblé en avoir perdu les résultats littéralement pendant de longues heures. Pire, il s'est ridiculisé en diffusant le lundi 23 janvier des résultats présentés comme quasi-définitif mais qui étaient en fait extrapolés à partir de la répartition connue la veille au soir et déduite du dépouillement de 80 % des votes. Cette nouvelle répartition, exprimée en pourcentage, était donc identique à la précédente ! Le comble est que, visiblement calculé sur un coin de table en appliquant des pourcentages arrondis dont le total ne faisait pas 100, la somme de la nouvelle estimation des voix des candidats différait de 161 unités du total général dans une première version avant que les Ribouldingue, Filochard et Croquignol de service les attribuent à Sylvia Pinel (par féminisme à la Potemkine ?).

Pourquoi cette bidouille tellement grotesque qu'elle en devient comique ?

L'hypothèse de la fraude vient naturellement à l'esprit. Elle a d'ailleurs été suggérée par les portes-paroles de la gauche radicale qui se sont étonnés des inégalités dans les taux de participation entre les circonscriptions, et notamment des niveaux très élevés à Paris. Aucun élément n'est venu pour le moment corroborer la thèse d'une carambouille. Disons aussi que la pagaille et la fraude peuvent donner des fruits très ressemblants. Et puis les intentions bonnes ou mauvaises pourraient avoir été moins importantes que les contraintes externes qui disloquent peu à peu le Parti socialiste.

Ces primaires interviennent en effet bien tard dans la campagne car elles ont été conçues pour régénérer un Président déjà affaibli mais qui voulait descendre dans l'arène le plus tard possible, à la fois pour ne pas perdre trop tôt sa prééminence institutionnelle mais aussi, prosaïquement, dans l'espérance que la conjonction favorable des astres économiques - taux d'intérêt et prix du pétrole bas - ferait monter la croissance et rende in extremis les électeurs moins durs à son égard. Tout à son adhésion désormais totale au présidentialisme de la Ve République, le Parti socialiste a cru à ce conte de fées et se trouva fort dépourvu quand son auteur se sentit redevenir citrouille. Même François Hollande, boxeur politique exceptionnellement dur au mal à défaut d'être créatif intellectuellement, a dû admettre que sa capacité à encaisser et survivre politiquement aux coups n'était pas infinie.

La "Belle alliance populaire", parodie de feues l'"Union de la gauche" de François Mitterand et de la "Majorité plurielle" de Lionel Jospin, était d'autant plus anxieuse de réussir ses primaires que, à force de ralentir le peloton et de tergiverser, la "gauche de gouvernement" avait rendu possible les échappées en solitaire, dont une s'était effectivement produite et avait prospéré grâce à la désertion d'une partie de l'aile droite du Parti socialiste. Et puis, la droite avait placé la barre très haut, en obtenant plus de quatre millions de votes en septembre dernier.

Le taux de participation à sa primaire devenait en conséquence un enjeu majeur, ne serait-ce que pour impressionner les girouettes du Parti. C'est pourquoi, on crut opportun de se fixer un objectif ambitieux, aux alentours de deux millions de votant. Or, en 2011, dans une période un peu moins difficile, le parti n'en avait espéré qu'un million, prudence qui avait lui permis de présenter les deux millions et demi d'électeurs effectivement présents comme un succès (2).

Le dimanche 22 janvier 2016, les votants s'élevèrent finalement à 1,6 million. Pas un désastre, mais une défaite d'autant plus mal ressentie que, au soir, les résultats des dépouillements ne remontaient que fort lentement, à cause de difficultés informatiques dit-on, et ne portaient que sur 1,2 million de suffrages. C'est cette impatience à sortir des incertitudes au plus vite le lendemain, y compris en publiant des résultats faussement complets alors que l’on avait attendu le mardi suivant le premier tour en 2011, peut être aussi les effets délétères d'une nuit blanche et de l'absence de culture statistique qui ont conduit l'appareil du Parti socialiste à faire éclater sa décrépitude aux yeux de l'opinion dans un feu d'artifice de boulettes.  

(1) http://www.20minutes.fr/politique/1982835-20161218-primaire-socialiste-participation-organisation-union-trois-defis-primaire-gauche

(2) http://abonnes.lemonde.fr/a-la-une/article/2011/10/08/primaire-ps-le-scrutin-inedit-qui-va-changer-la-gauche_1584381_3208.html?xtmc=primaire_2011&xtcr=2301

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