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À 89 ans, après près de 70 ans d’une carrière exceptionnelle, il a récemment annoncé qu’il mettrait fin à ses tournées, invoquant les effets de l’âge et quelques troubles de mémoire. Une décision qui serre le cœur mais que l’on reçoit avec gratitude et respect.
Johnny Mathis, c’est une élégance rare. Une voix de velours, un phrasé soyeux, une manière inimitable de faire vibrer chaque note comme si elle était la première. Depuis les années 1950, il a incarné un certain art de vivre la musique. Une musique faite de romantisme assumé, d’arrangements soignés, de ballades à faire fondre les plus endurcis.
Quand on pense à lui, des titres comme Misty, Chances Are, It’s Not For Me to Say ou The Twelfth of Never, Wonderful ! Wonderful ! And I Love You So, résonnent immédiatement.
J’écoute Johnny Mathis depuis toujours, ou presque. Il est l’un de ces artistes qui m’accompagnent sans jamais se faire pesant, dont la voix flotte dans mes playlists comme une ritournelle. Il fait partie de ces géants — Nat King Cole, Tony Bennett, Frank Sinatra — avec cette différence : il est encore là. Et c’est précisément pour cela que ce moment compte. Parce qu’il est encore vivant. Parce qu’il est temps, justement, de célébrer les vivants avec la même ferveur que nous célébrons trop souvent les disparus.
Son influence ne s’est pas arrêtée aux frontières américaines. En France, Johnny Mathis a su séduire un public fidèle, discret mais passionné. Il a chanté en français, collaboré avec des artistes de chez nous — on se souvient notamment de duos avec Mireille Mathieu, Nana Mouskouri, Michel Legrand, et de son passage très applaudi à l’Olympia dans les années 80. Il avait cette capacité à franchir les barrières de la langue, du style, pour atteindre quelque chose d’universel : l’émotion.
Johnny Mathis, c’est aussi l’histoire d’un homme qui a traversé les époques sans jamais courir après les modes. Une forme de fidélité à lui-même, à son timbre si reconnaissable, à une esthétique de la douceur. Dans un monde bruyant et fracassant, il est cette note suspendue, cette élégance désuète devenue précieuse.
En 1982, lors d'une interview, il a révélé son homosexualité, déclarant que c'était "une façon de vivre à laquelle je me suis habitué" . Bien que cette révélation ait suscité des réactions diverses, y compris des menaces, Mathis a poursuivi sa carrière avec la même grâce et discrétion qui le caractérisent.
Alors oui, il raccroche le micro des tournées. Et c’est bien. Car ce qu’il nous laisse, ce ne sont pas seulement des chansons, c’est une manière d’aimer, de chanter, de croire encore à la beauté des choses simples. Une retraite paisible, bien méritée, pour celui qui a tant donné de lui-même sur scène. Merci, Monsieur Mathis. Pour la musique, pour les frissons, pour les souvenirs. Votre voix restera, gravée dans nos cœurs et sur nos vinyles.
Et moi, je continue de l’écouter — en boucle.