Je m’interroge régulièrement sur ce qui pourrait expliquer qu’un citoyen lambda soit aussi fier de son pays et revendique si ostensiblement sa nationalité.
Dans mon cas personnel pas une once de mon corps ne vibre pour la France.
En tant que maman d’un petit garçon handicapé (et pour affiner l’étiquette autiste modéré) j’observe pour les parents concernés par le handicap ou la maladie de leur enfant un quotidien particulièrement abrupt et rempli de violence (*) où rien n’est fait (ou si peu) pour adoucir leur périple et apporter une lueur d’espoir.
Violence (*) : ce sont les paroles des professionnels qui étiquettent notre enfant (« aujourd’hui il y a un exercice incendie à l’école ; comme cela n’a pas de sens pour votre enfant il serait préférable que vous le gardiez » ; « un Ulis mais vous n’y pensez pas pour votre fils un I.M.E serait certainement plus adapté »), par la famille parfois («il est handicapé ? moi je ne supporterai pas d’avoir un enfant handicapé »), par les voisins (« votre fils nous empêche de dormir ») ; être parent d’un enfant handicapé c’est être susceptible de prendre en pleine face un nombre incroyable de 33 tonnes au quotidien et de rester debout.
Abrupt :
- Autisme le sommet émergé de l’iceberg : souvent l’autisme est associé à d’autres pathologies mais quand il est particulièrement sévère il prend toute la place et il faut souvent attendre 6 ans pour affiner les diagnostics et découvrir que le TSA n’était que le sommet émergé de l’iceberg ; dans tous les cas il génère d’autres effets secondaires ; dans notre cas c’est le sommeil ! sans mélatonine et Théralène nos nuits relèveraient d’un concept abstrait ; pour d’autres parents c’est manger et ils vivent dans l’inquiétude permanente de la fameuse « sonde gastrique » ; ça peut être le bain, le coiffeur, les vêtements, certains bruits…tout peut être source de complexité ; ne parlons même pas de la propreté pour nos enfants qui ne ressentent pas toujours les sensations associées.
- Le répit & le support de l’entourage : inexistant dans la grande majorité des cas ; garder une mignonne petite fille qui dessine des papillons bleus et chante en boucle la reine des neiges c’est assurément une expérience plus gratifiante que garder un petit bonhomme qui ne parle pas, qui n’est pas propre et qui passe sa journée à tapoter sans discontinuer 2 objets trimballant avec lui sa bulle sonore.
- Les prises en charge onéreuses ou inexistantes et assurément dans tous les cas un long parcours du combattant : les parents d’enfants handicapés qu’ils travaillent ou pas ont dans tous les cas des agendas dignes d’un premier ministre (le support de l’entourage serait appréciable) pour assurer toutes les prises en charge ou examens de leurs enfants mais pour autant certaines thérapies essentielles comme l’orthophonie dans le cas de l’autisme sont inaccessibles (« oui rappelez-moi dans 10 ans j’aurai peut-être une place à vous proposer entre 23H et 23H15 »)…et la scolarisation avec une éducation nationale inclusive …de la poudre de perlin pin pin !
Violence (*) toujours : quelles sont les 2 étapes clés dans la vie d’un enfant autiste modéré à sévère ? vous donnez votre langue au chat : en premier lieu une place en I.M.E jusqu’à l’âge adulte et en second lieu l’entrée dans un centre pour adulte handicapé où il finira sa vie. Pour avoir une place en I.M.E 7 ans sont parfois nécessaire pour certaines familles ; donc autant dire qu’une fois l’enfant intégré dans l’établissement il joue fort naturellement les prolongations d’autant plus que si rentrer en I.M.E relève du vœu pieux la seconde étape s’avère encore plus complexe ; il faut qu’une place se libère ; en d’autres mots qu’un adulte handicapé décède ; la bonne nouvelle c’est qu’en France l’espérance de vie déjà très basse d’une personne autiste (50 ans) est en train de baisser….chic des perspectives de places dans les I.M.E.
Alors est ce que j’aime la France ? mais à quel titre ? que fait l’Etat Français pour nos enfants ? notre quotidien est déjà compliqué mais devant le manque évident de structures et de prises en charge décentes nos nuits sont peuplés de cauchemars sur l’avenir à court terme ou à plus long terme pour nos enfants.
Je me rêve Suédoise ou Belge et je suis ouverte à n’importe quel pays où on ne répond pas à l’autisme avec de la poudre de perlin pin pin.
En France ce sont les footballeurs, les artistes, les personnalités politiques qui raflent toutes les légions d’honneur, les récompenses mais sans nul doute à mes yeux les vrais super héros du quotidien qui sont prêts à soulever des montagnes, à monter sur des grues, à s’enchaîner à des grilles, à mourir de faim et bien c’est nous parents d’enfants autistes….Hip Hip Hourra à vous tous qui ne pouvez compter définitivement que sur vous-mêmes…
….La France nous a assurément laissé tomber !