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Billet de blog 29 décembre 2025

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Iran, fermes à Trolls et faux sondages, la manipulation en guise de voix du peuple

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

La crédibilité ne s’achète pas. On peut acheter des clics, pas la confiance. On peut manipuler les chiffres, pas les consciences.
Et si ces artifices trompent parfois dans nos démocraties, ils échouent face à la réalité brute d’une dictature comme celle de l’Iran, où la peur, la censure et la répression ne suffisent plus à masquer le rejet profond du peuple.


Les nouvelles fonctionnalités de X (anciennement Twitter) indiquant désormais la localisation des comptes, a provoqué une agitation soudaine En Iran et à l’étranger. Cette fonctionnalité, sans le vouloir, vient de porter un coup fatal à Reza Pahlavi, le fils exilé du Shah.

En quelques heures, de nombreux comptes supposés être ses partisans ont modifié leur localisation, passant opportunément de “Iran” au Canada, à l’Europe, à l’Asie ou aux États-Unis. L'ironie est flagrante. Reza Pahlavi a longtemps mis en avant son audience en ligne comme preuve de sa popularité auprès des Iraniens, malgré l'absence de toute organisation, que ce soit à l'intérieur ou à l'extérieur du pays.

Or cette agitation révèle un détail essentiel : X est interdit en Iran. Les Iraniens n’y accèdent qu’à travers des VPN, au risque de lourdes sanctions. Lorsqu’un utilisateur se connecte ainsi, la plateforme reflète l’environnement du VPN, et non l’application Android iranienne.
Dès lors, un fait s’impose : les comptes affichant encore cette application ne contournent rien.

Ils se connectent via des accès directs, forcément surveillés et contrôlés par l’État.
Publier par ce biais signifie appartenir à la cyber-armée du régime ou agir avec son accord explicite.


Cette réalité bouleverse donc la façade numérique monarchiste : une part non négligeable de cet écosystème est animée, tolérée ou purement fabriquée par la République islamique elle-même. Non par stratégie idéologique, mais par intérêt : promouvoir un « rival » inoffensif pour mieux diluer, fracturer et affaiblir l’opposition authentique.
Ce que les nouvelles fonctionnalités de X révèlent n’est pas seulement un subterfuge : c’est la confirmation que le régime construit et orchestre ses propres opposants de substitution. Un leurre destiné à détourner l’attention de celles et ceux qui, sur le terrain comme à l’étranger, incarnent un véritable danger pour la théocratie.


Faux comptes et fausses enquêtes. C’est un principe de base à rappeler alors qu’une enquête prétend mesurer la popularité du prince Reza Pahlavi en Iran, cette fascination pour la “science du chiffre” masque un biais fondamental : sous un régime autoritaire, la peur déforme tout.

Le mirage des chiffres sous la censure est le nouvel instrument de désinformation des sondages du GAMAAN (Groupe d’analyse et de mesure des attitudes en Iran), menés depuis les Pays-Bas, affirmant outrageusement refléter les préférences politiques des Iraniens.
Selon leurs résultats, Reza Pahlavi, fils du dernier Chah, serait l’une des figures les plus populaires du pays, juste avant des dirigeants du régime…. Quelques rares médias occidentaux ont repris ces chiffres avec empressement.

Mais dans une dictature, l’opinion publique n’est pas mesurable, puisqu’elle est par essence réprimée.
En Iran, répondre à une question politique, même en ligne, peut conduire à la prison.

Ceux qui participent à ces sondages, s’ils existent réellement, sont ceux qui se sentent protégés. Il s’agit donc de partisans exilés de courants tolérés par le régime. En revanche, le peuple iranien s’abstient. Les concepteurs du sondage ont assuré avoir “ajusté” les résultats pour refléter la démographie iranienne. Mais aucune équation ne transforme des réponses biaisées en vérité empirique. Ils font appel à une logique bien connue où sous prétexte de transparence, la méthode fabrique une légitimité scientifique à un discours déjà orienté. Ce biais technique dissimule en réalité un biais idéologique bien plus profond. Depuis des années, l’Institut GAMAAN s’efforce de réduire la complexité iranienne à une opposition simpliste entre deux pôles : la théocratie en place : le Cheikh et la monarchie restaurée : le Shah.


Ce cadrage binaire efface volontairement toute la richesse et la pluralité de l’opposition iranienne : mouvements républicains, syndicats indépendants, réseaux laïcs ou démocrates, Conseil national de la Résistance iranienne (CNRI), Organisation des Moudjahidine du peuple d’Iran (OMPI) ; autant de forces qui défendent une transition démocratique fondée sur le suffrage universel, la séparation des pouvoirs et les droits fondamentaux.
Le résultat de ce sondage apparaît alors pour ce qu’il est : une fausse évidence. Puisque le peuple rejette les mollahs, il serait censé se tourner vers le fils du dernier roi. Une conclusion biaisée, non pas tirée des données, mais qui les précède.
C’est ainsi que nous assistons, non pas à une mesure de l’opinion, mais à la fabrique d’un prétendant. Cette “opinion mesurée” s’inscrit dans un dispositif d’influence plus vaste. Une enquête conjointe du Haaretz, de The Marker et du Citizen Lab (Université de Toronto) a révélé l’existence d’une opération numérique coordonnée, soutenue par des intérêts israéliens, visant à promouvoir Reza Pahlavi.

Les chiffres de GAMAAN ne disent pas ce que pense le peuple iranien : « Ils disent ce que certains voudraient que le monde croie que le peuple pense ». Sous dictature, le silence est une forme de parole : Il exprime la peur, la prudence, mais aussi la résistance. Le réduire à une “non-réponse” statistique, c’est effacer la réalité de la répression. Ce silence, pourtant, contient la vérité la plus politique : « Celle d’un peuple qui n’a pas renoncé à penser, mais qu’on empêche de parler ».

L’histoire l’a montré : de la Résistance française aux dissidents soviétiques, la légitimité ne vient pas des sondages, mais du courage. En Iran, elle se trouve dans les prisons, dans les grèves, dans les rues et non dans les algorithmes ou autres instruments numériques servant à travestir la réalité pour promouvoir un régime despotique à la place d’un régime sanguinaire tout en appelant cela démocratie.


Conclusion : Il n’y a aucun désir de monarchie en Iran, simplement les désirs d’un monarque autoritaire prêt à toutes les manipulations pour que ses désirs deviennent réalités.

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

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