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Billet de blog 1 juin 2016

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Commune de Paris. Séance du 6 mai 1871 (XII).

JOHANNARD. «Quand il s’agit de se disputer, toute une partie de l’assemblée ne manque pas d’assister à la séance; mais, quand il s’agit de faire des votes utiles, ils s’en vont se promener ou monter à cheval.»

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Illustration 1
Commune de Paris, Jules Johannard. © Eloi Valat.

(Suite de la séance du 6 mai 1871 [la Commune est réunie en Comité secret].)
URBAIN. Je vois avec regret qu’il n’est pas possible de rester dans les chiffres proposés par Avrial; cependant, je crois que Jourde se trompe lorsqu’il propose le chiffre de 20 francs, et je prends mon renseignement sur ce qu’il a dit: il remboursera 100.000 francs par semaine. En prenant les chiffres de Lefrançais, il délivrera des objets de 20 francs pour la somme de 8 millions; à 100.000 francs par semaine, cela demande 20 ou 21 mois; je crois, dans la situation actuelle, au lieu de se constituer le débiteur du Mont-de-piété…
JOURDE. Je n’ai pas dit cela.
URBAIN. Si je suis dans une erreur complète, il est indispensable que je sois rectifié.
JOURDE. J’ai dit que pour aider le Mont-de-piété, je pourrais mettre à sa disposition 100.000 francs. Je suis sans doute partisan de la liquidation, mais la liquidation entraînera une question de responsabilité. J’ai fait entrevoir ce que l’on ferait plus tard, mais je ne pouvais poser aucune transaction, ne sachant pas ce que vous feriez.
(La clôture!)
URBAIN. En s’arrêtant à 20 francs, on dépense 8 millions; en allant jusqu’à 30 francs, on dépenserait 10 millions. Cette différence de 2 millions n’est pas assez forte pour qu’on s’arrête à 20 francs. Voici l’amendement que je propose:
«Art. 1er. Tous les objets engagés au Mont-de-piété, jusqu’à concurrence de 30 francs par engagement, seront retirés gratuitement à partir du 10 mai.
«Art. 2. Les objets de travail, dont l’engagement dépasserait 30 francs, pourront être retirés par ceux qui ajouteront aux 30 francs le surplus de l’engagement.»
L’amendement, mis aux voix, est repoussé.
LEFRANÇAIS. Dans la proposition que je vais vous faire, il y a une question de moralité qui, me paraît très importante; je viens de relever les noms des membres présents à la discussion, et je demande qu’ils soient insérés à l’Officiel.
ANDRIEU. Moi aussi, je veux poser une question de moralité; comme dans le commencement de la séance, il y a eu toute une classe de citoyens attaquée par quelques paroles…
(Interruptions.)
LEFRANÇAIS. Si vous le désirez, je modifierai ma proposition, en demandant que ces noms soient insérés seulement au procès-verbal.
(À l’Officiel! À l’Officiel!)
ALLIX. Je proteste contre cette proposition; j’ai assisté à la discussion sur les monts-de-piété, mais je me retire pour ne pas être à l’appel nominal.
JOHANNARD. Dans la question des monts-de-piété,je demande que toutes les reconnaissances de 20 francs et au-dessous soient dégagées, quand bien même un seul individu en aurait plusieurs. Sur la question des noms, je demande à les insérer à l’Officiel. Quand il s’agit de se disputer, toute une partie de l’assemblée ne manque pas d’assister à la séance; mais, quand il s’agit de faire des votes utiles, ils s’en vont se promener ou monter à cheval. Si l’on adopte cette proposition, nos électeurs sauront à quoi s’en tenir sur notre compte et distingueront ceux d’entre nous qui sont réellement socialistes.
LE PRÉSIDENT. Je demande que la proposition Lefrançais soit réservée jusqu’à la fin de la discussion, et que la clôture soit mise aux voix.
BILLIORAY. Je propose une modification ainsi conçue:
«Les dégagements auront lieu à partir du … jusqu’au … Passé cette époque, il ne sera plus reçu de demandes de dégagements gratuits.»
Voici le but de mon amendement: Un certain nombre de citoyens ont jugé à propos d’abandonner Paris, et dans quelque temps ils pourraient trouver bon d’y revenir pour profiter de la faculté de dégagement gratuit que nous allons accorder; il faut les empêcher de jouir du bénéfice de notre mesure et c’est pour cela que je propose la fixation d’un délai.
LE PRÉSIDENT. Le citoyen Avrial a demandé la parole; mais, avant de la lui donner, je ferai remarquer que nous pourrions clore en ce moment la discussion générale, en réservant l’examen ultérieur des amendements.
(Oui! La clôture!)
LE PRÉSIDENT. J e mets donc aux voix la clôture de la discussion générale.
La clôture est mise aux voix et adoptée.
LE PRÉSIDENT. Nous passons à la discussion des articles. Je donne lecture de l’article premier.
BILLIORAY. Je demande que l’on intercale, dans l’article premier l’amendement dont je viens de donner lecture, car je tiens à ce que les gens, qui se sont sauvés de Paris, ne puissent pas en profiter.
LANGEVIN. Je voulais combattre l’amendement Billioray, mais je crois que c’est à peu près inutile. L’assemblée me paraît avoir compris qu’en voulant prendre trop de précautions, on compliquerait inutilement le projet.
JOURDE. Je tiens à démontrer combien l’amendement Billioray a peu de raison d’être. Ceux qui ont des reconnaissances de 20 francs ne sont pas, soyez-en assurés, de ceux qui ont quitté Paris. Si vous voulez entrer dans la voie des exceptions, vous n’en finirez pas. Tout le monde en proposera: moi-même, je vous en proposerais et nous arriverions simplement à rendre le projet impraticable.
(Aux voix!)
SERRAILLIER. Je propose, pour que la discussion ne se prolonge pas indéfiniment, que chaque amendement ne puisse donner lieu qu’à deux discours: un par l’auteur, pour soutenir son amendement, et l’autre par le premier orateur inscrit pour le combattre.
(Appuyé!)
LE PRÉSIDENT. L’assemblée vient d’entendre cette proposition. Veut-elle restreindre le débat de cette façon? Je demande seulement que ce ne soit pas un précédent.
L’assemblée consultée adopte la proposition du citoyen Serraillier pour cette fois seulement.

(À suivre.)

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