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Billet de blog 15 août 2016

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Commune de Paris. Séance du 8 mai 1871 (XIII).

AVRIAL. «J’avais été nommé à la direction de l’Artillerie par le délégué à la Guerre; j’avais donc à obéir à Rossel. En y arrivant, je me suis trouvé en présence d’un comité d’Artillerie que je ne connaissais pas. J’ai eu toutes les peines du monde à le mettre à la porte et aujourd’hui il va revenir.»

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Illustration 1
Commune de Paris, Augustin Avrial. © Eloi Valat.

(Suite de la séance du 8 mai 1871.)

ARNOLD. Je ne veux pas incriminer le Comité de salut public, mais il me semble qu’à la suite de la discussion qui a dû avoir lieu 8 entre lui et le Comité central, il aurait bien dû venir nous rendre compte de ce qui avait été fait et surtout s’entendre, avec la Commission de la Guerre, sur les mesures que l’on prendrait avec le Comité central. Voilà ce qui, suivant moi, aurait dû être fait. La Commission de la Guerre, cela est certain, ne peut faire tout, à elle seule; à quatre, nous ne pouvions suffire à une telle besogne et nous devions chercher ailleurs des auxiliaires. Je m’étais déjà adressé, pour mon compte, au Comité central, en lui disant: «Cessez vos délibérations et devenez, en quelque sorte, le succédané de la Commission militaire. Mettez-vous en rapport avec Avrial, Varlin et moi-même, et exercez une surveillance et un contrôle efficaces.» Au lieu de cela, on a fait du Comité central un agent chargé de l’administration, au lieu d’en faire un contrôleur. C’est là un mauvais résultat. Les services de la Guerre s’organisaient peu à peu, à l’aide d’agents responsables, comme ceux que peut avoir Jourde ou tout autre délégué; le Comité central aurait pu être chargé du contrôle à l’administration de la Guerre, et non pas de l’administration; il aurait dû être un contrôleur, un surveillant, et non pas un agent pouvant ordonnancer, à moins d’une délégation précise à cet effet.
Je dis que si le Comité de salut public, comprenant que la délimitation des pouvoirs est indispensable, avait consulté la Commission de la Guerre, il aurait eu d’excellents renseignements. Le décret relatif au Comité central est vicieux. Il demandera, non pas à être rapporté, mais à être amendé. Il faudrait que le Comité de salut public, qui a commis la faute, consulte la Commission militaire et étudie un projet de délimitation des attributions, de façon à nous donner un concours utile.
JOURDE. Je demande à répondre un mot au citoyen Gérardin, qui a fait intervenir la politique dans le débat, d’une façon regrettable à mon avis. (Interruptions.) Il a dit que le Comité de salut public avait trouvé juste, habile même, en voyant que la Garde nationale allait lui échapper, de [se] servir, pour la retenir en ses mains, du Comité central. (Interruptions diverses.)
Je n’ai pas intention de passionner le débat, mais Gérardin a fait intervenir une question politique; je veux lui répondre. Il y a une institution qui est plus forte que le Comité central: c’est la Commune; et la Commune doit se faire respecter. C’est pour cela qu’elle avait nommé un Comité de salut public qui devait prendre des décisions violentes. Il n’aurait pas dû tourner autour de la question; il devait la briser. Le Comité central! Je n’y vois pas autre chose que l’association libre d’hommes qui défendent leurs intérêts. Si vous vous étiez servi des membres de ce Comité au point de vue individuel, rien de mieux. Vous venez vous-même de nous dire qu’il y avait des nullités et des capacités; et voilà des hommes que vous appelez à diriger la Guerre!… Je dis que vous avez dépassé votre mandat! Si le Comité central avait bien voulu se soumettre à l’autorité de la Commune, il n’aurait pas écrit la communication dont je vous ai donné lecture.
Eh bien! je ne donnerai jamais le droit à personne de discuter mon droit de représentant de la Commune. Je vous le dis, à vous, Comité de salut public! Vous avez introduit le loup dans la bergerie et, dans quelques jours, vous en sentirez les conséquences. Ainsi me voilà moi, votre délégué aux Finances, me voilà dans le plus grand embarras. Je reçois un ordre portant en tête: « Fédération républicaine de la Garde nationale» et je dois me rendre à cet ordre. Il faut que j’oublie que je suis membre de cette assemblée. Aucun délégué ne doit recevoir de pareils avis. Je veux bien recevoir les ordres du Comité de salut public, mais non d’un pouvoir que je ne connais pas.
AVRIAL. Le citoyen Jourde et le citoyen Ant. Arnold ont dit à peu près ce que je voulais dire. J’ajouterai cependant que tous ces changements à la Guerre sont très dangereux; vous en avez déjà vu les effets. J’avais été nommé à la direction de l’Artillerie par le délégué à la Guerre; j’avais donc à obéir à Rossel. En y arrivant, je me suis trouvé en présence d’un comité d’Artillerie que je ne connaissais pas. J’ai eu toutes les peines du monde à le mettre à la porte et aujourd’hui il va revenir. Comment pouvez-vous accorder confiance à des hommes que vous ne connaissez pas! Le Comité central, qui a fait la révolution du 18 mars, était nommé régulièrement; aujourd’hui, je nie qu’il y ait eu vote régulier. Il n’y a pas eu réunion de bataillons. Je dis [que] ces hommes-là sont des hommes sans mandat; ils n’avaient qu’à obéir aux ordres de la Commune. Il y avait un homme très intelligent; cet homme-là m’a dit : «Vous partez; je m’en vais aussi! Je veux jouer ma tête pour la Commune, mais non pour des hommes que je ne connais pas!»
ANTOINE ARNAUD. Je dirai tout simplement ceci: c’est que, quand il y a des choses qui étonnent, le plus simple c’est de s’en expliquer ensemble au préalable; quand on croit qu’un conflit s’élève, on va à la source et l’on n’en fait pas une affaire d’assemblée générale. D’un autre côté, le Comité central est chargé de l’organisation; entendons-nous bien…
UN MEMBRE. … de l’administration!

(À suivre.)

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