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Billet de blog 21 août 2012

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Qui est François Hollande ?

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Que veut vraiment faire le gouvernement de François Hollande. La question se pose après les 100 premiers jours. Après avoir fais travailler « le meilleur d’entre nous » Laurent Fabius pendant 2 ans sur les 100 premiers jours, on aurait en effet pu s’attendre à une rupture qui si elle n’aurait pas été tonitruante aurait pu tout de même donner l’impression que nous avions tourné plus fortement la page de 10 ans de droites.

La question qui se pose pour le nouveau gouvernement est double : celle des marges de manœuvres et la question idéologique de ce qu’on veut faire. Pour ce qui concerne les marges  de manœuvres, la chose est entendue, y’a pas de sous. Il va falloir éponger 10 ans de cadeaux fiscaux aux plus riches et  payer en partie la crise. Cependant l’absence supposée de marges de manœuvres ne nous empêche pas de mener des politiques beaucoup plus redisctributrices. En effet, pour donner une part de gâteau plus grandes aux classes populaires, on peut soit agrandir le gâteau par la croissance soit redistribuer différemment les parts. Si on taxe et on a raison les riches pour combler en partie le déficit, je ne vois pas ce qui nous empêche de taxer plus le capital, en particulier le CAC 40 voir le SBF 120. Par exemple, si on décrétait une imposition exceptionnelle de 20 points de plus d’IS aux 40 entreprises les plus bénéficiaires, cela représenterait 14,6 milliards d’euros soit presque la moitié de ce qu’il faut trouver l’année prochaine pour combler le déficit. Si par ailleurs, le gouvernement décidait d’’étaler à un an de plus le remboursement de la dette c'est-à-dire passer de 4,5 à 3,7 puis à 3 au lieu de passer immédiatement à 3 cet impôt supplémentaire suffirait à lui seul.

Et non Mesdames et Messieurs, les profits ne créent pas mécaniquement des investissements qui eux même ne créent pas automatiquement des emplois. Une bonne partie de ces profits sont redistribués aux actionnaires ou utilisés en rachat d’action (ce qui revient au même) surtout dans les secteurs mono ou oligopolistiques comme l’énergie, les transports, l’eau, le bâtiment, les télécoms, …

Lula arrivé au Pouvoir en 2002 avait le même problème. Il se retrouvait avec une énorme dette à payer au FMI et des investisseurs internationaux qui n’avaient pas confiance en la gauche. La croissance au Brésil était quasi nulle et les marges de manœuvre du gouvernement étaient sans doute encore plus petites que celle du gouvernement de la gauche en France. Lula a donc décidé (c’est une stratégie comme une autre) plutôt que d’affronter les marchés et de refuser de payer la dette comme ce fut le cas de l’Argentine (dont la situation était bien plus compliquée il est vrai) de mener une politique redistributive et de prendre l’argent ou il y en a pour mener les premier programmes de Bolsa Familia (Bourses Familiales) des allocations familiales pour les familles les plus pauvres et lancé la politique de Faim 0.

Il est donc tout à fait possible étant donné le degré d’augmentation des inégalités depuis 20 ans de mener une politique de rééquilibrage et de trouver 20, 30 ou 40 milliards d’euros afin de les redistribuer sous forme d’augmentation de salaire, de recrutements dans la fonction publique qui en a besoin ou encore d’investir dans la recherche et l’enseignement supérieur.

Mais voilà qu’arrive le deuxième problème, qui, celui là, est idéologique. Il est difficile de cerner idéologiquement François Hollande, il n’a jamais vraiment eu de ligne tranchée sur la plupart des sujets mais était comme on dit l’homme de la synthèse. Que pense t il réellement de l’endettement du pays. Pense t il que c’est parce que nous n’avons pas mené les « nécessaire réformes » notamment du marché du travail comme il l’a dit au Congrès du SPD ou pense t il au contraire que l’austérité ne mènera qu’à la récession dans un cercle vicieux comme il le rappelle souvent. Les derniers épisodes ne nous ont malheureusement pas beaucoup éclairés sur le sujet. Plutôt que l’affrontement avec l’Allemagne, François Hollande à choisi le rapport de force tranquille qui s’il peut être plus efficace dans certains cas n’a pas franchement fonctionné jusqu’à maintenant étant donné la situation ni sur la création des euro-bonds ni à vrai dire au sujet du « Plan de Relance européen » qui n’en est pas vraiment un. Seul une intervention de la BCE massive sur les marché montrerait si l’alliance d’Hollande avec les pays du sud a porté ses fruits ou pas.

Malgré cela, on ne peut toujours pas répondre à la question de « que veut François Hollande ». Si le programme est relativement claire, la méthode de concertation permanente choisie avec les syndicats et le patronat peut laisser dubitative étant donné l’urgence de la crise sociale. De plus sur quasiment tous les sujets les positions des uns et des autres sont largement connues. S’il s’agit en échange de quelques amélioration à la marge d’augmenter massivement la CSG, la question se posera de la forme de CSG dont il s’agit (progressive ou non) et de qui la payera car on ne peut pas baisser les cotisations patronale pour un impôt salarial. La méthode de gouvernement ne permet donc pas aujourd’hui de savoir comment sera appliqué le programme de Hollande car selon qu’on diminue tel paramètre ou qu’on diminue tel autre, on a pas du tout le même programme comme on a pu le voir sur le retour à l’âge légal à 60 ans.

Je suis donc aujourd’hui toujours dans le doute. Si je me réjouis évidement de la défaite de la droite et du climat européen nouveau créé par la victoire de la gauche, je n’ai toujours pas répondu à la question : qui es tu François Hollande ?

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