Je me suis endormie dans le nid, au milieu des couvertures, avant même la fin du film.
Puis une matinée à errer sur le web…
A 14h, il m’est venu une grande envie de pleurer. Je me sentais comme un dimanche après-midi pluvieux. Je me suis dit que tous les jours seront des dimanches après-midi pluvieux. Ces heures où l’on se sent seul et exclu d’un monde qui sommeille, qui se meut lentement. Je pense à la vie qui bat dans les autres appartements, dans ces espaces qu’on nomme des foyers. Je pense à la langueur que je mène de bout en bout de mes quelques mètres carrés, et je me sens vulnérable. Pour la première fois j’ai mal. Je vais être seule et ce sera douloureux.
Je suis allée chercher la peluche-hibou et je me suis mise en boule dans mon nid de couvertures. Les larmes ne sont pas venues, elles sont restées coincées, quelques part dans ma gorge.
J’ai du me relever une heure après, peut-être plus, je ne sais pas. Malgré la chaleur du mois de mars je me suis enveloppée dans un des plaids, et suis allée sur le balcon, le hibou toujours dans mes bras, un carnet dans une poche, une cigarette entre les lèvres.
J’ai toujours fumé ma contrariété. Il me semble d’autant plus compliqué d’arrêter que j’ai le sentiment que fumer m’est réellement utile en cas de surcharge émotionnelle. Une cigarette me permet de temporiser. D’appuyer sur pause, me réfléchir à ma réplique, de différer l’explosion, voire de l’endiguer. Je suis terrible avec ça. En plein milieu d’une dispute je suis capable de partir m’allumer une cigarette, et de planter l’autre seul avec son mécontentement. Forcément ce n’est pas toujours agréable.
Dans les rues le soleil cogne. On aperçois des passants masqués promenant leurs chiens. Au loin on voit quelques arbres s’agiter. Qu’est-ce que je pourrais bien faire de mon après-midi… Il faut que je m’occupe. Sortir un peu peut-être. Me dépenser.
Après être rentrée à l’intérieur, je lance une vidéo pour un programme sportif en quinze minutes. Le sport comme ça m’a toujours gonflée mais je me dis que je vais m’y habituer. Je cherche des baskets et retrouve une paire pas trop flinguée. Demain j’irai courir.
J’ai dessiné la rue déserte. Mais ça ne rend rien. Je téléphone, à quelques amis, rentrés dans leurs familles. A cette fille avec qui il aurait pu se passer quelque chose. Ça ne me rend pas vraiment triste. Mais je sens que quelque chose s'est perdu. J'ignore quand est-ce qu'on se reverra.
Le bruit court, appuyé par quelques prévisions de spécialistes, que le confinement durera 45 jours.
1 mois et demi. Il faut vraiment que je fasse un planning. C'est peu de chose mais ça rassure. Se prémunir contre l'ennui.
45 jours...
19h. Le jour décline. J'ai écouté I will survive. L'original puis la version de CAKE. C'est fou comme la musique peut faire du bien. Je me suis ouvert une bière et fais une omelette. Alors que j'écris, je pense à quand, dans une semaine, dans deux semaines, je relirai ces lignes en me disant "une omelette ? Sérieusement ? Quel intérêt d'écrire ça ?".
20h. Applaudissements. Des gens dansent aux fenêtres, ça fait du bien. Je remets Gloria Gaynor et je crie les paroles.
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