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Billet de blog 22 juin 2016

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Une manifestation de Bastille à Bastille ? Projet d’aménagement urbain

Non content de faire vaciller l’état de droit, le gouvernement redéfinit profondément l’espace dit public.

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Illustration 1
ER, Projet d'embellissement de Paris

D’abord un haut-le-cœur : après les manifestations en marge de la COP21, prohibées pour cause d’état d’urgence, une seconde manifestation se voit interdite à Paris. L’état de droit vacille.

Puis, une surprise : la radio annonce qu’après de sévères discussions, une manifestation non statique pourra se dérouler de Bastille à Bastille. Ira-t-on de l’Opéra à l’Hippopotamus ? A touche-pieds, pour ne pas aller trop vite ? Il faut un certain temps pour comprendre que les manifestants sont généreusement autorisés à faire le tour du bassin de l’Arsenal.

La raison d’un tel parcours ne fait pas mystère. L’eau d’un côté, des immeubles d’habitation de l’autre : peu à casser, en vérité. Mais la redéfinition de l’espace public est notable. Les zones les moins passantes peuvent être occupées par l’expression politique. La présence de commerces l’interdit.

Le système n’est pas nouveau. Il régit les grands centres commerciaux. Leur espace a beau paraître ouvert, et accueillir des flux considérables, il relève de la police privée. Et peut donc dûment interdire toute manifestation comme exclure tout indésirable. C’est ce système-là qu’un pouvoir dit socialiste entend élargir à la totalité de la ville. Ultime restriction du « droit à la ville » défini par Henri Lefebvre. Ultime restriction de l’aire démocratique au nom des biens et des marchandises.

De Bastille à Bastille, donc. En contournant le bassin de l’Arsenal. La formule pourrait être généralisée, et appliquée aux mouvements à venir, pour se substituer au République-Nation de la gauche archaïque. Ce qui peut susciter quelque proposition d’aménagement. Quelque chose comme un embellissement de Paris version 2016, ou une réponse un peu tardive au concours de Réinventer Paris.

Car, après tout, il reste encore des fenêtres sur ce parcours. Pourquoi donc ne pas le clôturer par de hauts murs, d’à peu près deux étages ? En faire, de la sorte, un véritable espace ? Bien identifiable… Et chaleureux !

A Rome, le Cirque Maxime compte environ 600 mètres de long, et de 80 à 200 mètres de large. Faites le tour. Vous n’êtes pas loin des 1,6 kms de manifestation annoncés. Il y a là un modèle, historique, renommé, qui ne demande qu’à embellir notre capitale. Des gradins peuvent même être aménagés, de pur béton naturellement, pour de possibles spectacles nautiques, ou une rentabilisation touristique des manifestations.

Esthétiquement, le classicisme de l’ensemble (à affiner jusque dans les détails), dirait assez l’archaïsme des défilés politiques. Structurellement, la ville serait enfin protégée de ce qui n’a rien à voir avec son ordre propre.

Enfin un monument digne de l’ère Valls ?

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