En droit de la nationalité, on le sait, deux conceptions s’opposent, au fond.
L’une considère que la nationalité est produit de l’origine ethnique, linguistique, culturelle, géographique, du sujet. Elle promeut la race, la langue, l’habitus, la terre, l’Être. Elle distingue par naissance un individu comme « national ».
Elle promeut le droit du sang.
Là où prévaut cette conception naturaliste, "ontologiste", opère le droit du sang, c'est-à-dire le droit de tenir l’autre comme irréductiblement autre et singulier et de se définir d’autre part, comme irréductiblement autre et singulier.
Vienne une crise qui angoisse et cet autre singulier de l’autre singulier devient volontiers, quand il partage un espace donné, l’intrus inférieur d’un propriétaire supérieur. Alors prévaut le droit du sang, celui qui des veines passe en terre.
L’autre conception considère que la nationalité est produit juridique, démocratique, résultat du choix politique d’un territoire donné. Elle sait concéder la nationalité depuis un attachement second, celui de fait du sujet à une terre autre que celle où il est né, où se parle sa langue, prospère sa coutume, se féconde sa terre. Elle la concède depuis le constat d’une présence sur son sol. Comme un fait de droit, elle la décrète. Elle promeut le droit, la politique, le territoire, l’Existence.
Elle « indistingue » depuis le droit.
Elle promeut le droit du sol c'est-à-dire le droit de tenir l’autre, le différent, comme même et solidaire et de se définir d’autre part, comme même et solidaire.
Vienne une crise qui angoisse et ce même du même devient volontiers la fraternité surprenante et qui rassure d’un frère surprenant qui rassure. Alors prévaut le droit du sol, celui où, comme au carnaval, l’autre et le même dansent comme un même.
La France a, aux yeux du monde, consacré ce second droit. L’on y est le même étant l’autre.
Du point de vue de sa politique de nationalité, elle est cela, au monde.
Dans les années 1930 et sous l’occupation, le fascisme français nommait « anti-France », toute conception internationaliste, voyageuse, errante, de l’appartenance.
Il nommait « anti-France » la France, en somme, il était l’anti-France en la dénonçant chez l’autre.
Ces temps sont heureusement révolus et l’on se contente, aujourd’hui, en France, par l’expulsion, la déchéance, le signalement administratif discret, l'organisation de la prolifération censément opportune et fine de débats insidieux, de pratiquer sans dire, de faire sans « en connaître »…
Il y a quelque chose d'étrange à voir notre pays s'évertuer à ne point être ce qu'il est. Il y a quelque chose de comique et de pathétique à le voir s'essayer à une définition de son identité en la mettant en pièces.
Il semble que nous ne sous aimions plus.
Il semble que le temps revienne, irrésistiblement, du règne de ceux qui aiment que nous ne nous aimions point.