Billet de blog 25 avril 2011
Ethologie de l'écologie
L’écologie ne consiste pas exclusivement, pas fondamentalement, pas essentiellement, en un rapport critique de l’être au monde.
L’écologie ne consiste pas exclusivement, pas fondamentalement, pas essentiellement, en un rapport critique de l’être au monde.L’être écologique n’est pas en relation directe avec le monde ou, plus exactement, il ne vit pas avec le monde une relation sans médiation.La relation, le rapport écologique ne consiste pas, au fond des choses, en un rapport, insolent ou déférent, entre deux pôles, un sujet destructeur ou protecteur d'une part, une nature farouche ou domptée d'autre part.La dialectique écologique n’est pas principalement opposition de deux forces, elle ne se noue pas depuis une logique agonistique ou pacifique entre deux partenaires, une logique « extravertie ».Cette logique-là est seconde et, comme seconde, elle n’est suffisante que si le nécessaire est acquis, qui ne ressortit point à la dualité pure.L’écologie, en effet, est avant tout affaire réflexive, elle est le fruit d’un repli, d’une conversion à soi. Elle est, à l’orée, « rapport à soi ».Ce rapport à soi se donne sur deux plans. Le premier relève du mystère. L’écologie repose sur la concession au monde de la sensation ancrée de son autonomie, de son « quant à soi ». Il semble à l’écologie que le monde oppose à la conscience une façon de conscience, que le rapport au monde est le rapport à une liberté, à une aporie, à une insoumission, à un espace replié sur soi et qui, en quelque manière, « se pense ».Le monde de l’écologie, l’objet de l’écologie, n’est point objet pur.Il est objet rebelle, regimbant, se refusant, c’est-à-dire objet « ne réagissant pas en fonction ». L’écologie pense ou fantasme, sent que le monde est critique, qu’il est doué d’une capacité à constituer ses propres aisances de sujet face au sujet, qu’il est autre parce qu’il est le même, qu’il est sujet contre le sujet, qu’il est contradictoirement, librement, c’est-à-dire au titre de sujet.Le sujet écologique pense le monde comme un même, c’est-à-dire comme une limite fraternelle, sororale, de soi.En conséquence ou préalablement, c’est là le second plan, il se pense comme part du monde, « être du monde », part de « l’être du monde » comme tout et comme un. Il ne se pense distingué des choses qu’en tant qu’il s’efforce de les penser. Mais il ne pense la distinction critique que comme distance relative prise par rapport à une « mêmeté » qui, elle-même, ne se pense qu’en tant qu’elle se distingue, fait tempête, inondation, tremblement, réchauffement.L’écologie est, avant que d’être un rapport au monde, avant que d’être un sentiment du rapport à soi du monde, un rapport à soi senti du sujet, un rapport à soi pressenti du monde.L’affaire écologique ne met en présence sujet et objet qu’après qu’ils ont établi en eux un rapport critique de soi à soi qui les rend mêmes et distingués pour être « mêmes mieux ».Cette nature de l’écologie, ce dialogue entre deux sujets critiques, l’un par mystère, l’autre par conscience, ce dialogue entre deux essences semblables senties et pensées, vécues telles, vécues comme consubstantielles et autres depuis cet état de mêmeté, fait de toute chose et de tout être le surgissement d’une distinction au sein du même.C’est en quoi l’écologie peut à bon droit parler du champ social : en effet, si toute chose est même et m’apparaît depuis sa relative distinction de « chose critique », de chose en résistance, de chose limite affirmée de soi, tout être est, comme chose, comme part de l’être du monde, mon même, ne se distinguant que depuis une « pensée de soi », un « parti-pris de soi comme chose». L’écologie sociale peut être. Elle ne saurait ne pas être. Elle ne saurait consister qu’en une éthique, fondée en sensation de la « mêmeté » du prochain. Elle ne saurait partant consister qu’en une forme de solidarité fusionnelle, nécessairement internationaliste et radicalement sociale.Que l’on ne s’y méprenne pas, l’écologie ne chemine pas régressivement vers telle pureté, elle ne vise pas la Parousie, elle n’a pas en ligne de mire « l’âge de la bougie », elle n’entend pas boucler une boucle, elle affirme au contraire l’avenir profondément révolutionnaire d’un équilibre fondé en critique, d’un équilibre rationnel entre rationalité du monde et rationalité du sujet, d’un équilibre fondé en l’appréhension « surconsciente », profondément moderne, du monde comme espace du même, du monde comme espace de « l’être du monde » et non plus fondamentalement de « l 'être au monde ».L’écologie n’est pas quête de l’équilibre sujet-monde, fondé en sagesse obscure, des âges mythiques : elle est travail sur soi et sur le monde, recherche en conscience de l’affirmation, enfin, d’un « être du monde, du monde comme être ».
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