La plénitude de la conversion est devenue l’alibi d’une évacuation d’âme par la solution d’adjacence, par l’élucubration proxémique, par l’effacement, au profit de l’amas, des intervalles entre acteurs.
Agrandissement : Illustration 1
La Conversion de Marie-Madeleine, vers 1546-1548, huile sur toile, 117,5x163,5 cm, Londres, The National Gallery
Le saisissant de la Conversion de Marie-Madeleine de Paul Véronèse est qu’à couvert d’un prétexte thématique induisant l’attraction du regard par une catastrophe heureuse, par un coup de théâtre glorieux, par l’irruption anagogique, le peintre donne lieu, via un alliage radical de constriction et d’amplification, un effet de saturation proprement halluciné, inspiré, à l’avènement tonitruant de deux apparitions.
La première est celle du « crevé » de jour, encore un, côté jardin pour les sujets, encore une fois, celle de cette colonnade de sable doux où se penche celui qui est davantage un échappé qu’une vigie, davantage un écœuré qu’un crieur, un égaré exemplaire qu’une avant-garde, et dont le bras est au recours d’un pilier qui en aspire les forces dernières.
La seconde est celle d’un faisceau ahurissant de lignes de fuite, c’est encore le moment de le dire, qui, de façon presque comique, désignent, au contraire de la concentration sur le renversement évangélique, une distraction générale dont il est la victime picturale ostensible.
L’on n’est pas tant venu, au cadre, pour contempler Marie de Magdala, retour sur soi, s’éprouvant et se résolvant en l’être, que pour faire l’expérience d’une ochlophobie terrassante dont le résultat est un désir, pliant, ravinant les corps, de prendre la fuite.