Inutile de rappeler les faits, tout le monde connaît aujourd’hui les protagonistes du feuilleton Bettencourt. L’épisode qui nous intéresse ici, c’est la soi disant « rétractation partielle » de celle par qui l’affaire Woerth est devenue une affaire d'état.
Tout le monde connaît l’intègre sévérité des procureurs. Lorsque le parquet instruit une affaire, celui-ci instruit généralement à charge. Et bien, fait inédit, le parquet de Nanterre se comporte d’une manière tout à fait insolite.
« Le mot pression me semble tout à fait adapté. Je trouve absolument scandaleux l’acharnement du parquet à son encontre » s’indigne maître Gillot.
La personne qui fait l’objet de ces « pressions » de la part du parquet n’est ni Florence Woerth, ni Liliane Bettencourt. Mais un témoin, la modeste comptable parqui le scandale est arrivé.
Celle qui s’est vue en effet réveillée en pleine nuit, pour être interrogée une troisième fois en quelques jours, n’est ni Florence Woerth, ni Liliane Bettencourt, qui n’ont elles, toujours pas été entendues, mais Claire T, petite comptable qui fait trembler la république en affirmant que la politique est un océan d’argent liquide et que nos inénarrables donneurs de leçons se sont joyeusement baignés dedans !
Et voilà que la petite dame, paniquée, totalement dépassée par les évènements, réfugiée à la campagne au sein de sa famille, reçoit la visite nocturne d’un parquet inquisiteur qui a retrouvé sa trace. C’est flippant. On se croirait dans Les Hommes du président, le film d’Alan J Pakula, sur le Watergate.
Car voilà que le parquet a soudainement et étrangement retrouvé ces fameux carnets de compte que la comptable était pourtant accusée d’avoir dérobée ! « ce n’est pas que je voulais faire de la délation à l’encontre de Monsieur Woerth » s’excuse la petite employée face a des inquisiteurs pas commodes, « s’il n’y avait pas eu cette affaire de carnets je n’aurais pas parlé…» Gloups ! On à compris.
On comprend comment une simple comptable accusée de vol des carnets de compte de la première fortune de France, dans le cadre d’une affaire privée, à pu être à l’origine de ce qui restera sans doute comme le plus gros scandale politique de la Vème République, et qui n’est pas sans rappeler le Watergate. Et voilà comment on a su, ce qu’on aurait jamais du savoir…(Il est toujours dangereux de blesser l’honneur d’une femme.)
Au passage cette nouvelle révélation est aussi révélatrice des intentions avec lesquelles les sbires d’une justice aux ordres sont venus rendre visite à cette dame. Avec ces aveux en forme d’excuses, on peut imaginer les questions, et on comprend comment ces enquêteurs zélés ne sont pas rentrés à Paris avec des nouvelles déclarations incendiaires, mais avec des reniements…Car ce n’est pas la Justice qui est venue rendre visite a Clair T, c’est l’inquisition !
Nous ne serions pas si ému, devant la tournure des évènements, si l’on ne connaissait parfaitement les liens qu’entretiennent le juge Courroye et Monsieur Sarkozy. Si l’on ne savait pas que notre président à remit au dit juge la médaille de l’ordre du mérite, et si l’on ne savait pas non plus que les dits enregistrements opérés dansl’hôtel particulier de Madame de...font état d’un événement pour le moins troublant : Trois mois avant sa décision, le fameux juge à informé l’Elysée qu’il classerait sans suite une affaire qui jusqu’alors n’ était que d’ordre privée puisqu’elle n’opposait que Monsieur Banier à Madame de Bettencourt… Pourquoi donc un procureur informe t’il l’Etat des suites d’un procès insignifiant dans lequel l’Etat n’a rien àvoir ? Etrange, c’est le moins qu’on puisse dire, n’est ce pas ?
Cette question en amène une autre : Comment un procureur peut-il enquêter impartialement alors qu’il est désormais impliqué ?
Dans n’importe quelle démocratie digne de ce nom, une enquête parlementaire aurait été bienvenue pour répondre à toutes ces questions…Le minimum démocratique nous semble t’il! Mais l’UMP n’a pas jugé bon de donner suite à cette requête des socialistes qui sont plus simplement qualifiés de fascistes. Le problème des retraites est la priorité absolue dugouvernement répète t’on à l’unisson dans la majorité, comme si le simple fait de nier les faits pouvaient les conjurer.
Majorité qui fait évidemment bloc derrière son président en avançant l’argument du complot et de la calomnie, n’hésitant pas à faire appel au souvenir des heures sombres de notre histoire, et à déclarer la patrie en danger !(Alors que ce n'est que le Parti qui est en danger) Pendant ce temps, aucune plainte en diffamation n’a pourtant été déposée contre l’auteur(e) des déclarations incendiaires et le site Médiapart qui a débusquéle pot aux roses (pour ne pas dire le pot de vin). Et, il aura fallu attendre 48 heures pour qu’une procédure soit enfin engagée par Monsieur Woerth, sous la forme d’une insolite « plainte contre X » pour dénonciation calomnieuse !
Tout le monde se pose aujourd’hui la même question : si ces révélations sont totalement infondées pourquoi l’ensemble de la machine UMP est ainsi mise à contribution pour nier quelque chose qui n’a aucun fondement, quelque chose qui n’existe pas ?
Pourquoi donc perdre sa voix à se justifier, comme le fait Frédéric Lefèvre en disant que tout ceci n’est que le fruit de « l’alliance d’une opposition rageuse et sans idées et de certains médias aux relents d’extrême droite et de trotskisme mêlés, auxquels s’ajoute la vengeance de riches fraudeurs qui ne pardonnent pas à un ministre de les avoir combattus » alors qu’il suffirait d’une simple plainte à l’encontre d'un site d’information et d’un petite comptable ?
Ne croient-ils donc pas à la Justice de leur Pays ?
Les hommes politiques qui sont des grands professionnels de la communication savent très bien qu’en répondant, point par point, ils alimentent une polémique qui n’est pas prête de s’éteindre, et il en deviennent toujours un peu plus suspects…Ont ils pour autant le choix?
Je suis sûr que vous, innocents que vous êtes, vous auriez porté plainte immédiatement. Vous n’auriez même pas pris soin de répondre à ces histoires à dormir debout. Et la sentence serait tombée assez rapidement, car le droit français est très protecteur en matière de diffamation.
Au lieu de ça, à l’UMP, comme si le bateau prenait l’eau de toute part, on essaye de colmater les brèches. Une page de soutien à Eric Woerth vient d’être crée sur le site Internet. « Contre la machination politique destinée à salir la réputation d’Eric Woerth, la majorité est plus que jamais mobilisée. Vous aussi, apportez votre témoignagede soutien au Ministre du Travail. »
On se demande d’ailleurs pourquoi Nicolas Sarkozy, alors qu'il est lui aussi mis en cause, n’a pas lui, droit à sa page de soutien…
Dans la salle des machines du Titanic, les mécaniciens de l’UMP ont l’eau aux genoux, les sirènes retentissent, et la lumière vacille.
Parce qu’on est bien dans un Woerthgate, la question qu’aucun média n’ose se poser pour l’instant est au moins aussi inévitable que celle que soumettait il n’y a pas si longtemps, Roselyne Bachelot au président de la Fédération Française de Football après le fiasco des bleus en Afrique du Sud. Le président doit il démissionner ?