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Billet de blog 10 juillet 2010

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Affaire Bettencourt: Les hommes du Président.

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Affaire Bettencourt : Les hommes du président

Le film l’Alan J. Pakula, avec Robert Redford, adapté dulivre des deux journalistes qui ont enquêtés sur le scandale du Watergate pourle compte du Washington Post, met de scène deux hommes traqués par la machined’Etat parce qu’ils en savent trop. Un film qui est étonnamment d’actualité, etqui fait froid dans le dos.

Clair T, celle par qui le scandale Bettencourt à pris desallures d’affaire d’Etat, n’est certes pas menacée de mort, mais quand on litle compte rendu de l’interrogatoire mené par les sbires zélés du Parquet, enpleine nuit, et en sans la présence de son avocat, on comprend tout de suiteque la machine d’Etat, n’est pas seulement venu enquêter, ou éclaircir uneaffaire, mais bien traquer un témoin qui en sait trop.

« Le mot pression mesemble tout à fait adapté. ... absolument scandaleux l' acharnement du parquetà son encontre » s'indigne maître Gillot le lendemain de l’audition de sacliente.

Cette nuit là, alors quedes officiers de la police judiciaire ont débarqué chez Clair T, voilà les premières questions qui luisont posées.

Pourquoi êtes-vous parti à Fourques ? demandel’officier de la police Judiciaire.

Je suis partie àFourques parce que je ne supportais plus la pression des journalistes…Je me sentaisharcelée… Sur les conseils de mon avocat, Me Gillot Antoine de nous mettre auvert, je suis partie avec mon époux et mes enfants chez les cousins de mon marià Fourques.

Vous avez faitun certain nombre de déclarations à Mediapart qui ont été publiées le 6juillet au matin. Les avez-vous lues? Les déclarations qui vous sont prêtéespar Mediapart correspondent-elles à vos échanges avec votre interlocuteurprénommé Fabrice?

Imaginez maintenant cette femme seule, interrogée dans lanuit, chez elle, sans n’avoir eu ni le temps, ni le choix de faire venir sonavocat, littéralement tétanisée par le scandale que ses déclarations ontproduit, seul face à la machine d’Etat, et à un procureur qui, elle le saitcomme tous les français, est luiaussi mêlé dans l’affaire…Comment dans ces conditions ne pas céder à lapression et revenir sur certaines déclarations et parmi ces déclarations,celles, les plus gênantes, qui mettent en cause le Président de la République lui-même ?

A l’aune de ces deux premières questions on le voit bien, lapolice n’est pas venu pour éclaircir un affaire d’Etat, mais bien pour savoir comment etpourquoi la comptable a parlée aux journalistes de Médiapart.

Rares sont ceux pourtant, parmi les intellectuels, lesmagistrats, les hommes politiques, et les journalistes de notre pays qui sesont émus de ces méthodes qui rappellent les jours sombres de notre histoire.« Des méthodes de Fascistes !» s’est exclamé Xavier Bertrand. Non paspour stigmatiser la manière dont un témoin avait été interrogé, en pleine nuit,chez lui,sans la présence de son avocat, mais au contraire pour dénoncer lacalomnie qui s’est abattue sur le gouvernement.

« Plus le mensonge est gros, plus il passe »disait Joseph Goebbels, et si méthodes de fascistes il y a, pour reprendre lesmots de Xavier Bertrand, c’est bien la machine d’Etat qui en fait usage danscette affaire.

Rappelons simplement qu’il y a des enregistrements, et untémoignage non pas sous X, comme ceux utilisés dans l’affaire qui oppose laPolice aux jeunes de Villiers-Le-bel, mais à visage découvert.

On le comprend, la stratégie du gouvernement estsimple : quand on vous met la pression, il faut que la pression change decamp !

Ils sont accusés, qu’à cela ne tiennent, ils accusent, ilsdénigrent, ils mettent en cause…Le mot « fasciste » insulte ultimeest lâché.

Sauf que, face à des enregistrements accablants, impliquantnotamment le procureur qui mène aujourd’hui l’enquête, leurs déclarations n’ontaucun fondement, et répondent à la qualification juridique de la diffamation, àl’encontre d’un journal qui a fait son travail, et d’un témoin, qui rappelonsle n’a rien à gagner si ce n’est son honneur.

Clair T l’avoue, ce n’est pas qu’elle voulait faire de ladélation à l’encontre d’Eric Woerth…Si l’on ne l’avait pas accusée d’avoir voléces carnets, elle n’aurait rien dit. Tels sont les propos de la modestecomptable.

Comment ne pas s’émouvoir sur ces fameux carnets de comptes,qu’on lui reprochait d’avoir volés et qui soudain réapparaissent dans les mainsde la police judiciaire qui vient l’interroger en urgence en pleine nuit ?

Quel effet cela à du produire sur son esprit de voirréapparaître subitement ces carnets qu’on l’accusait d’avoir volé, carnetsqu’elle retrouve… dans les mains des hommes du président ?

Il serait temps que les intellectuels libres de notre pays,s’il en reste, les journalistes, les hommes politiques, les magistrats,prennent la mesure de cette affaire, car l’indignation populaire est grande etsi rien n’est fait, ce sont les institutions de notre démocratie elle même, quiauront perdu toute crédibilité.

Evidemment, on comprend que c’est un moment difficile pourle gouvernement, et qu’il n’est pas facile de reconnaître que de tellespratiques ont eut lieu, il n’est pas facile de se couper le bras parce qu’ilest gangrené, il est difficile de rebrousser chemin lorsqu’on s’est engagé dansla voie du mensonge, mais ce quiest en jeu, c’est l’Etat, et l’ordre public, l’Etat qui dépasse ces différentsacteurs, dont on se souviendra qu’à l’aune de l’honneur avec lequel ils ontservi la France.

« Ils avaient le choix entre le déshonneur et laguerre, ils ont choisi le déshonneur et ils auront la guerre » disaitChurchill. L’UMP devrait réfléchir à cette phrase, car en se déshonorant pouréviter un scandale, ils n’auront certainement au bout du clavaire que scandale etdéshonneur.

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