Dans ce que l'on a appellé l'affaire Banier, et que l'on appelle désormais l'affaire Woerth, mais que l'ont retiendra sans doute comme l'affaire Bettencourt, la première question que le bon sens voudrait que l’on se pose est la suivante : Pourquoi un avocat aussi avisé que Maître Metzner à t'il choisi de transmettre les fameux enregistrements à la presse avant la tenue de l'audience du procès Banier ?
Le quidam serait tenté de répondre : Et bien, parce que Maître Metzner savait sans doute, eut égard au contenu desdits enregistrements, que l’on avait à faire à un scandale d'état qui dépassait largement l'affaire Banier-Bettencourt, et que, dans ces conditions, l'homme de loi a certainement considéré ne pas être en mesure de faire confiance à la justice de son pays.
Cette déduction si elle s'avérait exacte, serait un bien triste constat.
Or, regardons les choses de plus près : Comment en effet, le parquet de Nanterre, représenté par Monsieur Courroye, homme à qui Monsieur Sarkozy venait de remettre la médaille de l'ordre du mérite, et dont il est question dans ces enregistrements, pouvait il agir librement ?
Cette question maître Metzner a du se la poser, et nul besoin d'être une grand avocat, ni un fin stratège, pour comprendre l’opportunité de transmettre ces enregistrements à la presse…
La deuxième question que le bon sens nous invite à nous poser est la suivante : Quelle aurait du être la réaction de la justice en prenant connaissance de ces enregistrements ?
Dans une république où la séparation des pouvoirs est supposée réelle et non pas théorique, et eut égard à la teneur des enregistrements mettant également en cause Monsieur Courroye, n' aurait il pas été parfaitement normal que l'affaire soit aussitôt confiée à un juge impartial et non pas à monsieur Courroye lui même, qui est manifestement juge et parti ?
Enfin, troisième question et nous parvenons au cœur du sujet :Pourquoi Nicolas Sarkozy tient-il tant à maintenir le ministre Woerth à son poste malgré les faits accablants qui transparaissent dans les enregistrements? (Bien plus grave, il nous semble, que l'achat de quelques boîtes de cigares aux frais du contribuable, le montant fut il de 12 000 euros ! )
Et bien, un début de réponse vient de nous être fourni par le témoignage de celle qui fut pendant des années la comptable de Madame Bettencourt.
Monsieur Woerth, dans cette affaire, semble n'être qu’un exécutant. Il n'a pas agit que dans son propre intérêt, mais surtout dans celui de son patron et de son parti.
Nicolas Sarkozy apparaît au dire du témoignage de cette employée, comme le destinataire des largesses de Madame Bettencourt, et s’il y a eu petits(ou gros) arrangements corrélatifs avec le fisc, ce n’est pas pour le seul bénéfice de l’ancien ministre du budget, et ou de sa femme, qui y a trouvé un emploi.
Il est donc clair, au regard des enregistrements et de ce nouveau témoignage, que nous ne sommes plus dans une simple affaire individuelle, concernant un ministre trésorier de l'UMP qui aurait fait embaucher sa femme en échange de complaisances fiscales, mais bien dans un scandale d'état, qui ressemblerait davantage à un financement illégal de parti politique avec rétro-commissions et trafic d'influence ; scandale dans lequel, grandes fortunes, juges, et politiques sont désormais réunis.
Si les faits révélés dans les enregistrements et le témoignage de cette comptable étaient validés, ce qui semble être le cas, demander aujourd'hui la démission d'Eric Woeth serait donc totalement hors sujet.
C'est Nicolas Sarkozy et l'ensemble de son gouvernement qui devraient partir. Et pourquoi pas envisager jusqu’à une dissolution de l'UMP ?
Car au fond, c'est non seulement la France qui a été trompée, mais aussi les électeurs de L'UMP; En se mettant au service non plus du pays,ou de ses électeurs, mais des intérêts privés de ceux qui l'ont financé, l’UMP mérite il le statut de parti politique ?
Ce qui est sûr c’est qu’en refusant de donner des explications rationnelles, en se bornant à nier les faits, en occultant à ce point la réalité, les déclarations péremptoires des uns et des autres constituent une insulte permanente à la France, à la démocratie, et à l'intelligence de millions de français.
En niant les faits mentionnés dans des témoignages accablants, les uns et les autres donnent l'impression d’êtres solidaires devant la fraude et l'inacceptable.
Or, les Français ne sont pas dupes, et ne peuvent plus êtres trompés par quelques déclarations, aussi habiles soient elles. Et c'est là certainement une erreur d'appréciation très grave du gouvernement de ne pas comprendre cela. (Un manque de "Virtu" pour reprendre le mot de Machiavel qui signifie la faculté d'un gouvernement de prendre le bonnes décisions dans l'adversité.)
Face à autant de désinvolture et à l'hypocrisie d'un gouvernement qui les méprise, les Français sont, chacun de leurs côtés, en train de bouillir comme autant de cocottes minutes. En insultant constamment leur intelligence, les pros de la communication d'un gouvernement totalement déconnecté de la réalité, soufflent dangereusement sur les braises au moment ou des réformes difficiles sont mises en place.
Les limites ont été largement dépassées et il est clair que, au regard des évènements récents, ce n'est plus à Eric Woerth de démissionner, mais à Nicolas Sarkozy.
Car c'est son système qui est en cause, et son intégrité dont il est question. Je ne vois pas comment il pourrait en être autrement.
Il est peut-être trop tôt pour le dire, mais les institutions aussi devront être revues pour redonner de la crédibilité au futur gouvernement.
Que l’on nous parle plus de supprimer le juge d'instruction, comme l'a souhaité sans doute opportunément Monsieur Sarkozy. Commençons par redonner à la Justice les moyens de son indépendance et de sa dignité.
Si rien ne bouge, on peut considérer la république en danger, car l'exemple donné est celui du " tout est permis".
Le chef de l'état peut aussi choisir de rester, en continuant d'adopter la stratégie de la négation absolue des faits, auquel cas il portera le discrédit sur l'ensemble de la classe politique, Droite et Gauche confondues, et sur la démocratie elle même.
Comme disait le marquis de Lampedusa "il faut que tout change si l'on veut que tout demeure". La droite ferait bien de méditer sur cette phrase, si elle veut éviter une révolution.