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Billet de blog 18 avril 2022

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Le vote utile est un pavé !

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Mutation de la participation politique :

Illustration 1
Graffiti : "le vote utile est un pavé"

On observe ces dernières années une mutation des formes de participation politique. La participation traditionnelles est sur le déclin, ainsi de moins ne moins d’individus adhérent a un parti ou a un syndicat, de plus l’abstention électorale est en constante augmentation ainsi que le recours au votes protestataires (vote blanc, extrême droite).

De plus la participation politique bien qu’elle apporte une forme de réconfort, plaisir retiré de l’activité militante, elle implique aussi un coût en temps, mais aussi coût en termes d'information ce qui explique que seule une partie de la population participe activement en politique (variable identitaire, socio-économique, culturel).

Cette participation, peut être conventionnelle c’est a dire institutionnel, légal sans remettre en cause la légitimité du système (ex :assistance à une réunion politique, vote, adhésion à un parti politique, candidature à une élection…) ou non conventionnelle (a la marge de la légalité). Les formes de participations sont variables selon les sociétés et les époques et dépendent de la conjecture économique, sociale, politique, local, national, international. Des événements particuliers qui marquent parfois des générations entières peuvent également influencer ces attitudes politiques ( exemple le mouvement de 2016 de la loi travail ).

Ainsi le déclin de la participation politique traditionnel, institutionnels ne signifie pas que les nouvelles générations sont dépolitisées, le niveau d’intérêt des jeunes a la politique serait en faite équivalent au générations précédentes mais se traduit différemment que par une expression dans les urnes. Selon David Van Reybrouck : « les études montrent au contraire que l’intérêt pour la politique est plus grand aujourd’hui qu’hier : les gens parlent plus souvent qu’autrefois de politique avec leurs amis leurs parents ou leurs collègues. »1 De plus si la participation politique traditionnelle est délaissée c’est peut être aussi parce que les individus adoptent une attitude critique voir même de défiance à l’égard du système politique et des institutions. Il semble également qu’ils préfèrent de plus en plus d’inscrire dans des actions directe et ciblée. Le modèle de l’engagement aurait donc changé, amenant les citoyens a une forme de désobéissance civile manifestant leurs mécontentement pour peser directement sur la décision publique: manifestation, grève, occupation illégale de terrain, boycott, barrage routier, pétition, cyber militantisme ….

Pour David Graeber le mouvement altermondialiste : « est un mouvement de réinvention de la démocratie. Il n’est pas opposé à l’organisation. Il s’agit de créer de nouvelles organisations. Il ne manque pas d’idéologie. Ces nouvelles formes d’organisation sont son idéologie. Il s’agit de créer et de rendre actifs des réseaux horizontaux plutôt que des structures du haut vers le bas comme les États, les partis, et les grandes compagnies privées ; des réseaux fondées sur les principes d’une démocratie consensuelle décentralisée et non hiérarchique. Il aspire a être bien plus que cela, parce qu’ultimement, il aspire à réinventer la totalité de la vie quotidienne. »2

C’est la faute de l’individualisme ?

Illustration 2
Graffiti : "élis-toi toi-même"

Le fameux individualisme tant décrier, qui affaiblit les institutions nationales, pas seulement les institutions politiques mais toutes les instances sociales, que ce soit l’école, les syndicats, les partis politiques ... conduisant non seulement crise de la légitimité politique mais également qui empêcherait l'intégration de la société et donc la bonne transmission des valeurs nationales et patriotiques si chère à la République. Platon, premier penseur de la République et de la démocratie, dénonce l'individualisation des mœurs qu'apporte la démocratie, selon lui, quand l'égalité est l'unique principe qui dirige les peuples et qui légitime la prise de pouvoir, la société deviendrait chaotique. Or l’individualisme est d’origine démocratique, la démocratie fait de l'individu le fondement de la société et des valeurs morales. Il est aussi « très fortement déterminé par le développement du capitalisme et du salariat lui même encouragé par des choix politiques des état de détruire le commun (...) avec la destruction du commun par l’État et la bourgeoisie, le peuple se trouve devant deux systèmes de propriété, privée et publique. Aucun des deux ne nécessite ni même encourage la démocratie (directe), ou l’anarchie puisqu’il n’y a plus de commun. Le privé est propriété d’un individu ou d’une personne morale (une compagnie privée), le publique est propriété de l’État et administré par la bureaucratie. Dans un tel contexte de dépossession, il n’est pas surprenant que les individus ne rêvent pas d’assemblées où débattre des affaires communes.Or si cette individualisme moderne rend la démocratie (directe) impossible ou impensable, il faut s’en inquiéter et non y voir un progrès »3

Selon Rancière, « Ce n’est pas l’individualisme qu’il (Platon) rejette mais la possibilité que n’importe qui en partage les prérogatives. La dénonciation de « l’individualisme démocratique » est simplement la haine de l’égalité par laquelle une intelligentsia dominante se confirme qu’elle est bien l’élite qualifiée pour diriger l’aveugle troupeau. »4. Ainsi l’individualité est jugé être une bonne chose pour les élites, mais deviendrait un désastre pour la civilisation si tous y accèdent. Ce que craint Platon en réalité c’est que la démocratie renverse toutes les relations de pouvoir naturelles entre les individus.

Et hormis dans une forme extrême l’individualisme n’est pas synonyme d’égoïsme et peut a l’inverse être bénéfique a la société. La vision pessimiste traduit l’individualisme par un affaiblissement du lien sociale (absence du sentiment d’appartenance/ conscience de groupe) et moins de solidarité entraînant « un déclin des préoccupation altruiste ». Alors que la version optimiste vois au contraire un progrès de la liberté de choix, favorisant l'initiative individuelle, l'indépendance et l'autonomie de la personne dont les opinions doit être le résultat d'une réflexion personnel et qui ne soit pas dictée par un quelconque groupe social. En effet il semble que l’appartenance a un groupe est de moins en moins revendiqué l’individu s’autonomise vis avis de sa famille, communauté, syndicats, partit politique, mais peut aussi parallèlement en revendiquer de nouvelles ( religieuse, ethnique, sexuel…).

En effet l'absence apparente de normes attribuées à l’individualisme ne signifie pas pour autant l'absence de toute intégration. Le lien social est devenu moins le produit du contrôle autoritaire et de la conformité aux normes établies par les institutions nationales que de l'invention commune par les individus de nouvelles formes de relations et normes collectives. Ainsi le dialogue et le compromis sont devenus le fondement des relations sociales. D’autant que l’individualité constitue une contradiction de plus en plus forte du néocapitalisme. Car celui-ci promeut les valeurs individualistes, stimule les désirs individuels, mais, dans le même temps, il ne peut y répondre que de manière appauvrie et réductrice sous une forme marchande, commerciale.

En conclusion l’individualisation des sociétés modernes a permis l'indépendance et l'autonomie de la personne ce qui ne se traduit pas nécessairement par moins de solidarité et de cohésion social, mais a changé notre rapport a la politique délaissant la participation institutionnel pour une forme de participation politique moins conventionnel mais plus direct, plus ponctuelle et plus ciblé qui peut influencer directement la politique d’un pays avec de nouvelles revendications et de nouveaux enjeux (environnementaux sociétaux …). La protestation est devenu un outil d’expression politique, loin de s’opposer a la démocratie, elle en est au contraire l’un des fondements symbole d’une citoyenneté active agissant conformément a ses valeurs et qui agit pour tous (ex : mouvement altermondialiste). Ces nouvelles formes d’engagements même si elles constituent une action politique au sens large, résultent d’une volonté des citoyens de se détacher vis-à-vis de la politique institutionnel. Ainsi l’individualisme présenté comme le grand danger de nos sociétés modernes, n’est pas si négatif que cela et est même nécessaire à la construction d’une véritable démocratie sociale.

La possibilité de « démocratiser »  l’État ?

Si l'élection n'est pas à proprement parlé démocratique car elle sous-entend que certains citoyens seraient plus amènes que d'autres à exercer leur pouvoir, il existe pour autant des moyens de rendre plus démocratique la représentation.

Le mode de scrutin :

Le tirage au sort, qui était dans la Grèce antique, l’un des piliers de la démocratie athénienne. C’est ainsi qu’était désigné les 500 membres de la boulé, dont le rôle était de recueillir les projet de loi émanant directement des citoyens d’Athènes. En France le tirage au sort est notamment utilisé pour désigner les juré d’assise parmi la population. Il a aussi était utilisé en 2011 pour réformer la constitution islandaise, le gouvernement à alors choisi de façon aléatoire 1000 citoyens de 18 à 91 ans afin de formée une assemblée constituante. Après une journée d’échange 700 pages de rapports on était rassemblé et pas moins de 12 000 propositions.

« Moi je pense qu’il faudrait plus de démocratie direct sur genre des assemblée des truc comme ça, ouais moi je pense qu'il y a agir sur les institutions nationales pour aller vers des modes de scrutins plus démocratiques comme ça existe ailleurs, ça y'a rien de vraiment très révolutionnaire »5

On entend aussi souvent en ce moment parler de « l’introduction d’une dose de proportionnel », ce qui permettrait selon les politiques favorables, d’injecter d’avantage de démocratie dans le processus du vote. En effet même si le vote ne peut pas à proprement parlé être qualifié de démocratique puisqu’il consiste en la délégation de son pouvoir politique, il existe cependant des modes de scrutin plus ou moins démocratique. Le mode de scrutin correspond aux modalités selon lesquelles l’exercice du suffrage et le mode de calcul des résultats électoraux sont aménagés.

En France c’est un scrutin uninominal (un seul candidat) majoritaire ( devant obtenir plus de 50 % des voies) a deux tours. Or ce mode de scrutin pose plusieurs problèmes, d’abord, l’issue du scrutin est largement influencé par l’absence ou la présence de petit candidat. De plus le problème essentiel du scrutin uninominale c’est qu’on dit pas ce que l’on pense de l’ensemble des candidats mais seulement d’un, on réduit la complexité au choix d’un seul nom. Pour Kenneth Joseph Arrow (1921-2017), un économiste américain, il ne peut exister de système de vote qui donne des résultats cohérents si on demande aux électeurs de comparer les candidats (théorème d’impossibilité). Selon lui le risque du scrutin uninominal est que le résultat de l’élection ne représente pas l’opinion des électeurs.

Condorcet proposait d’organiser les élections sous forme de duels par binôme (« la méthode Condorcet ». Or cela ne résout pas totalement le problème puisqu’on peut se retrouver dans une situation ou aucun des trois candidats ne peut gagner ces deux duel, dans ce cas il n’y donc pas de gagnant. En effet à partir de trois candidat (A, B,C) les résultat de ce mode de scrutin serait incohérent. On peut ainsi se retrouver dans une situation ou B est préféré à A qui est lui-même préféré à C qui est lui-même préféré à B (B>A>C mais parallèlement C>B), dans ce cas aucun des trois candidat ne peut gagner c’est ce qu’on appel le « paradoxe de Condorcet ». Ainsi les résultats d'une élection peuvent être modifiés par l'introduction ou le retrait d'une candidature, et ce même si le candidat concerné n'a aucune chance de gagner, dans ce cas le choix entre A et B ne serait pas le même selon que C est présent ou non. Typiquement en France, les élections peuvent faire arriver en troisième place un candidat qui battrait en duel les deux qualifiés du second tour. En ce sens le pluralisme politique (c’est à dire la reconnaissance et l’acceptation de la diversité des opinions et de leurs représentants) dans l’élection est contre productif alors même qu’elle est nécessaire a la démocratie. Ce constat est d’autant plus important qu’il rend possible la manipulation des élections, on peut ainsi imaginer des candidats payer un autre candidat pour qu’en ce présentant il fasse barrage a son concurrent directe. Ou à l’inverse un candidat négocier le retrait de la candidature, voir mener une campagne de dénigrement à l’égard du candidat qui risquerait de lui faire perdre l’élection. De plus c’est également ce paradoxe qui est a l’origine du « vote utile », conduisant à donner sa voie pour un candidat que l’on juge avoir le plus de chance de gagner même si ce n’est pas à l’origine notre premier choix, c’est d’ailleurs dans ce cas que les sondages sur l’intention de vote peuvent contribuer a faire évoluer les résultats.

Pourtant il existe des alternative même si celle ci ne sont pas parfaite et ne permette pas totalement d’éviter le « paradoxe d’Arrow ». Le « vote alternatif », qui propose d’éliminer un candidat par tours de scrutin, multipliant ainsi le nombre de tour en fonction du nombre de candidat. Ce mode de scrutin, est notamment utilisé en Australie pour élire la chambre des représentants ou encore en Irlande pour les élections présidentiels. Il existe aussi ce que l’on appel le « vote par approbation », celui -ci consiste à cocher les cases des candidats qu’on approuve et permet ainsi d’éviter le vote utile puisque les « petites candidatures » n’ont pas d’effet sur le résultat. Le seul problème c’est qu’il n’y a pas de gradation dans l’approbation, la solution serait de noter les candidat. Mais pour cela il faudrait s’accorder sur une échelle commune. L’autre souci c’est qu’on pourrait peser sur le vote en exagérant ses notes.

Or le constat du « théorème d’impossibilité » d’Arrow, qui démontre pourtant l’inefficacité de notre mode de scrutin, nous conduit a penser qu’il n’existe aucun mode de scrutin satisfaisant. Et est donc inutile de chercher à remplacer le scrutin uninominal, puisque les alternative ne sont de toute façon pas satisfaisante. Pourtant même insatisfaisant, ces alternatives, peuvent nous donner la possibilité d’exprimer notre avis sur l’ensemble des candidats qui se présentent a une élection et permettre d’enrayer la pratique du vote utile, ce qui est déjà une avancé.

Enfin il existe une dernière alternative, présentée comme idéale, répondant à tout les critères, permettant à la fois de traduire nos choix et nos opinion dans leur complexité, tout en ayant un résultat qui soit représentatif de l'avis de la majorité de la population, c’est le « jugement majoritaire ». Le Jugement Majoritaire est un système de vote conçu et proposé par Michel Balinski et Rida Laraki, chercheurs au CNRS et professeurs à l'Ecole Polytechnique. Ce mode de scrutin propose à l’électeur d’attribuer une mention a chaque candidat : Très bien, Bien, Assez bien, Passable, Insuffisant, A rejeter. Cela permet de remplacer une notation arbitraire par des mots du « langage commun » qui fasse consensus dans leurs sens. Le bulletin de vote pourrais ainsi se présenter sous cette forme :

Illustration 3
bulletin de vote jugement majoritaire

La « mention majoritaire », correspond à la mention minimal attribué par 50 % de la population a un candidat. Ainsi pour déterminer le gagnant d’une élection on agrège l'ensemble des mentions attribuées par les électeurs à un candidat et on trace une ligne correspondant à 50 % des votes exprimés. Le but ici n’est donc pas de nommer gagnant celui qui aurait obtenu la majorité des voies, mais celui qui obtient la meilleur mention majoritaire, c’est à dire la « mention minimum » pour laquelle au moins 50 % de la population est en accord.

Illustration 4
graphique jugement majoritaire

En attribuant une mention a chaque candidat on peut ainsi les classe par ordre d’appréciation. Lorsque deux candidats obtiennent la même mention majoritaire, ils sont alors départagé en déterminant pour chaque candidat le nombre d’électeur compris dans le groupe : « mieux que passable », c’est a dire le nombre de personne ayant donné une mention supérieur a la mention passable (Assez bien, Bien, Très bien ou Excellent). Celui qui obtient le groupe « mieux que passable » le plus important remporte l’élection.

Cela a aussi pour avantage de « dire » ce que la population pense de chaque candidat. Ainsi un candidat qui obtient un grands nombre de mention positives « excellent » et « très bien », et pas beaucoup de mentions négatives « à rejeter » et « insuffisant » sait qu’il est apprécié même si il n’a pas gagné l’élection. De même un candidat qui aurait beaucoup de mentions positives peut aussi avoir beaucoup de mentions négatives, mais très peu de mentions moyennes (« bien », « assez bien » et « passable ») comprend qu’il est clivant et divise l'électorat. En ce qui concerne les électeurs il peuvent exprimer leurs confiance envers un grand nombre de candidat comme leur désaccord envers quelques uns ou la totalité. En ce sens le vote blanc (sauf dans cas ou il exprime « une non opinion ») n’a plus de sens puisque ce mode de scrutin permet d’exprimer son rejet de tous les candidats proposés. On peut même imaginer que si l’ensemble des candidat obtiennent une mention majoritaire en dessous de « passable » que l’élection puisse être reportée avec de nouveau candidats. Ce mode de scrutin aurait peut être même pour effet de réduire l’abstention, sauf pour ceux qui ne croit pas au principe de la représentation.

Le mandat impératif

En politique, le mandat impératif désigne un mode de représentation, ou de la même manière que le mandat représentatif, le citoyen délègue son pouvoir soit à une organisation ou un individu élu. En revanche il s’en différencie dans la mesure ou il fixe un cadre préalable de l’exercice du mandat, l’action pour laquelle la personne est mandatée est ainsi définit dans la durée et dans la tâche, selon des modalités précises auxquelles il ne peut déroger, sous peine de révocation. De plus les députés élus sur un mandat impératif ne représentent que leurs électeurs et non pas l'ensemble de la nation.

Jean-Jacques Rousseau, dans Du contrat social, se montre critique de la démocratie représentative et préconise une démocratie directe utilisant le mandat impératif. « La souveraineté ne peut être représentée par la même raison qu’elle ne peut être aliénée ; elle consiste essentiellement dans la volonté générale, et la volonté ne se représente point. [...] Les députés du peuple ne sont donc ni ne peuvent être ses représentants, ils ne sont que ses commissaires ; ils ne peuvent rien conclure définitivement. »

La Commune de Paris de 1871, fut une période courte où fut expérimenté le mandat impératif. Il est aussi utilisé dans les assemblées citoyennes.

L'actuelle Constitution française indique dans son article 27, relatif aux membres du Parlement, indique que : « Tout mandat impératif est nul. Le droit de vote des membres du Parlement est personnel. La loi organique peut autoriser exceptionnellement la délégation de vote. Dans ce cas, nul ne peut recevoir délégation de plus d’un mandat. »

La consultation citoyenne, l’exemple du référendum

Enfin pour finir il existe aussi en dehors de mode de représentation des moyens de consulter la population de manière plus fréquente comme le référendum. On a notamment beaucoup entendu parler avec les crise des gilets jaunes du RIC (référendum d’initiative populaire) ainsi que du référendum d’initiative partagé proposé par Macron en réponse a cette crise. Mais d’abord qu’est ce qu’un référendum et à quoi ça sert ?

Tout d’abord le référendum est définit dans le droit, comme une procédure de vote, attribuée à l’ensemble des électeurs d'un État ou d'un collectif (le référendum est aussi employé au niveau locale dans les collectivité), permettant la consultation directe à propos d'une question législative ou constitutionnelle. Ce qui permet aux personnes consultées d'approuver ou de rejeter une mesure proposée par le pouvoir exécutif qui alors normalement l’obligation d’en respecter l’issue. Le référendum permet en ce sens au pouvoir exécutif d'obtenir l'aval du peuple. Mais cela peut aussi être une consultation à l’initiative des citoyens. En effet a l’origine les théoricien du référendum avaient imaginé cette technique pour permettre au peuple de s’exprimer sans intermédiaires. En France, le recours au référendum est prévu par la Constitution de 1958. Le droit distingue deux types de référendum. Le référendum constituant, prévu par l’article 89 de la constitution et dont l’exécution est à initiative du président de la République ou des assemblées, afin de réformer la Constitution. Et le référendum d’initiative populaire, qui comme son nom l’indique est à l’initiative du peuple et peut porter sur différents domaines (législatif ou constituant). Celui-ci n’est pas prévu par la constitution Française, bien qu’il existe en Suisse depuis le XIXe siècle, mais aussi en Italie et en Autriche. Si le texte recueille un certain nombre de signatures (au moins 500 000 personnes majeures, de nationalité française ou résidant régulièrement en France ) par le biais le plus souvent d’une pétition. Le pouvoir exécutif est alors tenu d’organiser un référendum, et si la réponse des citoyens est favorable, le parlement doit alors discuter d’une modification de la loi dans le sens indiqué par le référendum. Les gilet jaunes vont plus loin et demande un référendum d’initiative populaire non seulement législatif mais aussi constituant (permettant la modification de la constitution), abrogatoire (demande la suppression d’une loi), et révocatoire (possibilité de demande le départ d’un représentant politique). Le référendum d’initiative partagé, proposé par Macron est quand à lui est à l'initiative du parlement puis des citoyens dans un second temps, il a était adopté sous Nicolas Sarkozy en 2008, mais n’a jamais encore était utilisé. Le projet proposé doit réunir au moins un cinquième des membres du Parlement (soit au moins 185 députés et/ou sénateurs sur un total de 925) ainsi que le soutiens de 10 % du corps électorale (soit environ 4,5 millions de citoyens) dans un délai de 9 mois. A la suite de quoi le parlement dispose de 6 mois pour examiner le projet, ou le président de la République doit alors convoquer un référendum sur le sujet.

Or dans les médias et pour une partie de la classe politique le RIC est présenté comme un grand danger pour la démocratie et les libertés individuels et notamment celles des minorités. Celui-ci favoriserait des propositions réactionnaires, conservatrices ou extrémistes telle que la remise en cause de l’avortement. Ces critiques partent souvent du postulat que les citoyens ne seraient pas en capacité encore une fois d’exercer ce pouvoir. En ce sens la peur du référendum résulte d’une forme d’élitisme, ou de l’agoraphobie comme nous le verrons plus loin dans le développement. Pourtant le RIC existe bien dans d’autres pays et n’a jamais entraîné une montée en flèche de l'adoption qui iraient uniquement dans une seule et même direction politique. Les proposition en sortant serait plutôt ressemblante de la diversité des idées, et des opinions qui existe au sein d’une population. A l’inverse des décisions prises par l’assemblée nationale enclin à la corruption, elles cache des intérêts privés. En effet il est plus facile pour les lobbies de manipuler les membres stratégiques d’une assemblée plutôt que d’influencer ou d’acheter des millions de Français. En revanche il existe bien des limites au référendum, le souci principale c’est qu’il ne peut donner lieu qu’a une réponse binaire, les choix possibles étant « oui » ou « non », « accepté » ou « rejeté ». Par ailleurs c’est le gouvernement qui contrôle l’agenda politique et donc le calendrier ainsi que la formulation de la question posée. Or on sait que la période à laquelle ce fait un référendum peut jouer dans le résultat de celui d’autant plus si la question a à voir avec un événement récent suscitant une vive émotion. De plus comme tout décision politique, le référendum nécessite un débat politique rationnel et apaisé. Et cela d’autant plus que les sujets abordés sont parfois complexes et peuvent nécessiter une certaine expertise qui n'est pas forcément audible dans le débat public (nous le verrons par la suite dans la partie sur la sphère publique). De plus la formulation de la question comme dans un sondage est très importante. Enfin le référendum peut aussi être détourné en plébiscite, afin de consacrer la légitimité du président de la République et de sa majorité.

En conclusion le référendum s’apparente à un choix politique, un choix de société qui nécessite peut être une forme d’ « entraînement » régulier mais qui n’est pas en soi une menace pour la démocratie (sauf lorsqu’il est instrumentalisé par le pouvoir) au contraire. En revanche la démocratie ne doit pas se limiter à la consultation même régulière du peuple.

Que ce soit des changements concernant le mode de scrutin, l’exécution de mandat ou la consultation des citoyens, ces idées aussi bonne puissent-elle être « essentiel en politique n’est pas d’avoir des idées, mais du pouvoir. Et les détenteurs du pouvoir ne s’intéressent pas toujours aux bonnes idées, surtout pas si elle risquent de réduire leur pouvoir. »6

La consultation citoyenne, l’exemple des assemblées citoyennes

L’assemblée citoyenne, bien qu’elle soit à l’origine un outil de la la démocratie directe, est parfois aussi utilisé par le pouvoir dans certaines circonstances afin de consulter l’opinion de la population. Dans se cas cela consiste le plus souvent à réunir des citoyen.ne.s tiré au sort afin de débattre et possiblement de prendre des décisions sur des sujets diverses, comme par exemple sur les organismes génétiquement modifiés (OGM) comme se fut le cas en France, en 1998. Ici, il est donc question des assemblées citoyennes constituées à la demande d’un gouvernement ou d’une institution d’État, mais pas seulement, elle peut aussi être utilisée par différents organismes verticaux tel que les entreprises, les syndicats, les partis politiques ... Celle-ci parait d’autant plus facile mettre en place aujourd’hui grâce aux outils numériques, de manière plus régulière et sur une population plus large puisque qu’il n’y pas la contrainte de réunir physiquement tout les participants.

La consultation citoyenne comme processus de décision est d’ailleurs assez souvent mis en valeurs par les élus en se concerne l’aménagement du territoire. L’objectif est de recueillir les avis, opinions, attitudes des différents acteurs concernés, préalablement à la prise de décision. Pourtant dans les fait, ces consultation ont étaient souvent mise en place qu’après que le projets est étaient décidés, chiffrés, le budget trouvé et les acteurs économiques choisi, sans que la population locale n’est était consultée. Et même si consultation il y a, l’avis de la population pèse souvent peu de poids face à des projets qui mettent en jeu des sommes d’argent folles et des acteurs privées comme publics qui ont parfois des pratiques mafieuses. L’exemple des éoliennes est assez intéressant a se sujet. Le gouvernement dans un but de monter qu’il souhaite et qu’il peut agir rapidement face à l’urgence climatique, veut passer rapidement du nombre de 8000 éoliennes à plus de 14.500 sur le territoire d’ici 2028. Pourtant la population ne semble pas l’entendre de cette oreille et s’organise un peut partout une opposition a ces projets. Outre l’argument selon lequel les éoliennes défigure le paysage ce qui est subjectif puisque d’autres personnes ne trouvent pas éolienne esthétiquement désagréable. Si les Français.es semble restés favorable à l’éolienne leurs nombre et la zone d’implantation est importante est doit être débattu, de plus il ne faut pas invisibiliser les débats qui se font jour sur leurs réel impact environnemental sur les population d’oiseau ou les fonds marins. Ce qui semble poser le plus souvent problème ce n’est pas temps les éoliennes en eux même que la manière dont les projets d’installation ont était décidés sans une véritable consultation ni délibération citoyenne préalable à l’échelle locale comme à l’échelle nationale. C’est aussi l’attribution de ces marchés publiques par des entreprises privées soucieuses de faire de l’argent plus que de l’écologie qui pose problème. Si les élus, locaux se laisse convaincre en échange de revenu pour la commune, sans consulter les populations, ni même parfois le conseil municipal. A tel point que les recours en justice se multiplient.7

Par ailleurs les participants, qui se prennent volontiers au jeu de la démocratie délibérative et s’implique véritablement dans les projets, ressortent parfois déçu de ces consultations. Cela est notamment le cas d’un certains nombre des 150 membres de la convention citoyenne pour le climat, dont le but était à l’origine de déboucher sur une « Constitution écologique de la France » soumise au vote au parlement ou adopté par référendum. Celle-ci a était très productive et à débouchée sur pas moins de 149 propositions concrète certaines assez radicales visant à faire baisser d’au moins 40% les émissions de gaz à effet de serre d’ici 2030. Si le président de la République Emmanuelle Macron en a retenu 146 mettant son « veto » sur certaines de ces mesures, et que d’autres (mesures réglementaires) ont étaient adoptée en Conseil de défense écologique le 27 juillet 2020, il semble qu’il est renoncé a faire adopter le gros des propositions qui restent pour le moment sur le carreaux par la voie du référendum, préférant la voie législative.

Enfin les consultations citoyennes bien qu’intéressante pour redonner un vernis démocratique aux institutions posent de nombreuses questions sur la manière dont elles sont organisées. Si la consultation sur internet permet de recueillir rapidement un large ensemble d’opinions, elle ne permet pas toujours une véritable délibération. De plus ces pratiques, sous entend nécessairement la aussi des enjeux de « représentativité » de la population de par le nombre et la diversité des profils des participants. Or le problème est que les processus de sélection des participants reste parfois opaque, les organisateurs peuvent ainsi favoriser la sélection de certains profils à d’autres. La manière dont sont organisé les débats est aussi important, si il faut s’assurer que tout le monde puisse s’exprimer sans que personne ne monopolise la parole, les organisateurs orientent parfois les discussions, refusant que certaines options ou positions soit débattues. Enfin si il peut être nécessaire d’avoir recours a des professionnels ou des spécialistes (juristes, sociologues, scientifiques ...) pour « éclairer » des débats parfois très techniques, les interventions doivent être contradictoires pour laisser aux participants la possibilité a partir de ces éléments d’établir leurs propre réflexion et leurs propres arguments.

Si les institutions, publiques comme privées utilisent la consultation « citoyennes » comme moyen de revitaliser la « démocratie ». Pour Francis Dupuis-Deri, c’est parce que les élites politiques entre autres « ont compris que leurs décisions seront d’autant plus facile à imposer qu’elle sembleront plus légitime si le peuple à l’impression d’avoir était écouté. » En mobilisant les outils de la démocratie directe, et en invitant à d’avantage de participation, le tout dans le cadre constitutionnel, elles tentent d’inverser le processus de la contestation. En effet si « on peut y voir une démocratisation de l’État et l’inclusion du conflit social dans des instances officielles ou, au contraire, une ‘domestication » des mouvement sociaux et de leurs militantes et militants qui vont accepter, par calcul « pragmatique » ou par fatalisme, d’occuper des postes et des fonctions dans les institutions. Cela peut avoir pour effet de neutraliser leur esprit critique (on parle alors de « dépolitisation ») »8 Pour autant ont peut penser que ces consultations citoyennes peuvent amener de nouveaux public à se « radicaliser », elles peuvent amener certaines personnes à prendre conscience qu’elles ont la capacité de délibérer et de prendre des décision collectivement de manière autonomes sans encadrement d’une quelconque institution. De plus, l’organisation de ces consultations qui parfois ne débouchent sur rien ou pas grand choses, car les idées les plus radicales sont écartées voir carrément « interdites » à la discussion, peu entraîner de la frustration. Et cela d’autant plus lorsque saute au yeux que, les élus, à qui reviens la décision finale en ce qui concerne le devenir des propositions, sont d’avantage préoccupés à briguer ou à renouveler leurs mandats, ou a lever des financements de campagne, plutôt qu’a se risquer à mettre en place des mesures originales et radicales.

Pour David Graeber, l’expression État démocratique a toujours constitué une contradiction. « Durant ces deux dernier siècles, les démocrates ont tenté de greffer les idéaux du gouvernement directe du peuple sur l’appareil coercitif de l’État. Au final, ce projet s’est révélé tout simplement impossible. Les États, en raison de leur nature même, ne peuvent pas être véritablement démocratisés. Il ne sont rien d’autres que des moyens de réguler la violence les fédéralistes américains étaient très réaliste quand ils affirmaient que la démocratie ne convient pas à une société fondée sur des inégalités de richesse, dans la mesure où un appareil de coercition est nécessaire pour protéger les richesses, dans la mesure où un appareil de coercition est nécessaire pour protéger les richesses et pour tenir en respect cette « populace » à laquelle la démocratie prétend donner le pouvoir. »9 Pour lui il faut abandonner l’idée que la révolution doit conduire à la prise du pouvoir sans remettre en cause l’appareil coercitif de l’État. Il faut au contraire substituer à l’État une refondation de la démocratie par « l’auto-organisation des communauté autonome ».

1 David Van Reybrouck, Contre les élections, Babel, 2014, 224 pages. cit. p.15

2 Francis Dupuis-Deri, La peur du peuple Agoraphobie et agoraphilie politique, Humanite, 2016, cit. p.85

3 Francis Dupuis-Deri, La peur du peuple Agoraphobie et agoraphilie politique, Humanite, 2016, cit. p.147

4 Jacques Ranciere, La haine de la démocratie, Paris, La Fabrique, 2005

5 Entretien étudiant Licence 2 histoire

6 Francis Dupuis-Déris, Nous n’irons plus aux urnes, plaidoyer pour l’abstention, LUX 2019

7https://www.franceinter.fr/emissions/l-edito-politique/l-edito-politique-02-juin-2021

8 Francis Dupuis-Déri, La peur du peuple Agoraphobie et agoraphilie politique, Humanité, 2016, cit.p.345.

9 David Graeber, La démocratie aux marges, Lormont, Le Bord de l'eau, coll. « La Bibliothèque du Mauss », 2014, 120 p., préface d'Alain Caillé, traduit de l'anglais par Philippe Chanial, cit. p.111.

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