I.Crise de la légitimité et crise de l’efficacité :
Pour David Van Reybrouck : «Démocratie, aristocratie, oligarchie, dictature, despotisme, totalitarisme, absolutisme, anarchie- tout système politique doit trouver un équilibre entre deux critères fondamentaux : l’efficacité et la légitimité. L’efficacité répond à la question : combien de temps faut-il à un gouvernement pour mettre en œuvre des solutions réelles aux problèmes qui se présentent ? La légitimité répond à la question : dans quelle mesure les habitants sont-ils en accord avec ces solutions ? Dans quelle mesure reconnaissent-ils l’autorité du gouvernement ? l’efficacité correspond à la capacité d’agir, la légitimité au soutien des citoyens à l’action publique. »1 La dictature correspondant a la forme la plus efficace de gouvernant étant donné que la décision appartiens qu’a une seule personne, mais il est rare qu’elle bénéficie d’une légitimité durable. En revanche une démocratie délibérative jouirait de d’avantage de légitimité mais perdrait en efficacité car les décisions politiques demanderait du temps. Si la démocratie élective est la moins mauvaise des formes de gouvernement c’est précisément parce qu’elle essaie de satisfaire aux deux critères. Or il apparaît aujourd’hui que les démocratie dits représentatives sont confrontée simultanément à une crise de la légitimité et à une crise de l’efficacité. Pour David Van Reybrouck, « une époque où l’intérêt pour la politique s’accroît tandis que la confiance dans le monde politique diminue, a forcément une composante explosive. Le fossé s’élargit alors en effet entre ce que pensent les citoyens et ce qu’ils voient faire par l’homme politique, entre ce qu’ils estiment indispensable en tant que citoyen et ce que L’État néglige de faire selon lui. Il en résulte de la frustration. »2
Les gouvernement on aujourd’hui de plus en plus de mal a se former, et sont souvent moins stables de plus à l’issue de leur mandat les politiques, sont punis de plus en plus sévèrement par les électeurs. Ainsi les élections auxquelles participent de moins en moins de citoyens, font de plus en plus souvent obstacle a l’efficacité. En effet il semble que pour de plus en plus de personnes, l’élection n’a plus réellement d’enjeu car les États n’auraient plus le pouvoir d’agir face à l’Europe et sa législation, face aux traité internationaux, et aux puissances économiques, comme les agences de notation américaines, et les multinationales. La souveraineté nationale autrefois fondement de l’Etat nation apparaît diminuée, alors même que nous devons faire face à de nouveaux défis tel que le changement climatique, la crise économique, les déplacement de population... Autant de défis que ne semble plus pouvoir relever de façons adéquate les gouvernements nationaux. Pour David Van Reybrouck « l’impuissance est devenu le maître mot de nôtre époque : impuissance du citoyen face aux gouvernements nationaux, des gouvernement nationaux face à l’Europe, et de l’Europe face au monde. Chacun n’a que mépris pour les débris qu’il voit au dessous de lui et tourne ensuite son regard vers le haut, non plus dans l’espérance et la confiance, mais dans le désespoir et la colère. La hiérarchie du pouvoir aujourd’hui : une échelle pleine de gens qui s’invectivent. » 3
Enfin selon l’auteur le fait que le métier de politique ne s’apparente plus a une fonction attirante et estimée pour diverses raisons, débouche sur une situation « d’anémie » du parlement. Il deviendrait plus difficile de recruter des hommes neufs et enthousiastes.
II.La professionnalisation de la politique :
Pour Max Weber l'action politique professionnalisée prend la forme d'une entreprise, c'est-à-dire d'une action continue et organisée en vue de conquérir des positions de pouvoir. Pour Bourdieu le champ politique est le lieu d’une compétition électorale pour l’exercice pouvoir, elle s’effectue au travers l’obtention des voix des « profanes », ainsi le « gagnant » désigné par les urnes obtient le droit de parler et d'agir au nom des électeurs.
A l'origine la compétition politique doit s'organiser de manière à être ouverte, sincère et pacifiée. Ainsi pour qu'un système soit considéré comme « démocratique », il faut que les électeurs puissent voter « librement », c'est-à-dire en conscience et de manière « autonome ». Or cela nécessite la garantie des libertés politiques tels que : la liberté pensée, d'opinion, de réunion, d'association, d'information et de mouvement ainsi que la possibilité d'organisation du pluralisme aussi bien politique, partisane, idéologique et médiatique. La théorie voudrait que n'importe quel citoyen puisse se présenter aux élections. Or en pratique, on remarque que ces positions sont largement occupées par des hommes politiques, dont beaucoup sont engagés depuis de longues années dans une carrière politique. D'autant que beaucoup de dispositifs tendent à dissuader des "citoyens classiques" de se présenter à l’élection, comme le fait d'obtenir les 500 signatures de maires permettant ne serait-ce que d’accéder a la candidature présidentiel. De plus les candidats parvenant a se présenter ne sont pas mis sur un pied d'égalité encore moins d'équité, en terme de financement de campagne par exemple ou simplement de temps de parole quand il s'agit de représentation dans les médias officiels.
Pour Bourdieu la possibilité d’accession à la politique institutionnelle nécessite un capital politique. En effet la professionnalisation de la politique suppose alors qu'il y ait un apprentissage, celle-ci serait alors réservée à des « initiés ». En effet l’idée du gouvernement représentatif est que s’en dégage par l’élection uniquement des citoyens socialement distincts de ceux qui les élisent. En revanche les citoyens ordinaires sont tenus à l'écart de la plupart des activités et des décisions politiques, placés en position de « profanes », plus extérieurs aux lieux de pouvoir et moins informés (relativement, mais inégalement) des jeux et enjeux de pouvoir, la plupart de ces derniers interviennent principalement, de manière intermittente, par leur vote. Et même si en théorie chacun peu voter la sélection des candidat avait déjà eu lieu en faveur des élites. On ainsi remplacé une aristocratie héréditaire par une aristocratie élective qui tire alors sa légitimité des élections et non plus de dieu ou de la naissance.
De plus il apparaît évident que le capital social, économique et symbolique joue également un rôle primordial dans la compétition électorale et politique, cela nécessite aussi du temps libre, c'est à dire, en général, à un travail peu prenant ou l'absence de travail.
Enfin, il serait naïf d'oublier les nombreux intérêts privés en terme de prestige, d'aisance financière, de qualité de vie, de sentiment de puissance et d'estime de soi qu’apporte une positions de pouvoir et l’exercice légitime de la politique en tant que représentant.
Moins de 4 % de l’assemblée national à entre 25 et 40 ans, dans la population française 19 %, soit 4,5 fois plus à l’inverse 32 % des députés ont entre 60 et 70 alors que cette génération représente a peine 11 % des français, c’est presque 3 fois moins. Il se pose aussi le problème du genre, presque 80 % des élus dans leurs ensemble sont des hommes. De plus au États-Unis il ne sont pas élu par le peuple mais par 162 000 grands électeur soit 0,3 % des inscrits sur les listes électorales. Enfin, une partie de ces élus exercent plusieurs mandats à la fois, en 2012, on comptait 476 députés sur 577 (82%) et 267 sénateurs sur 348 (77%) en situation de cumul. Or moins d’élu pour un même nombre de poste diminue encore d’avantage la représentativité. D’ailleurs les propositions politiques récente de diminuer le nombre d’élu n’est en rien tendre vers plus de démocratie, c’est au contraire concentrer le pouvoir entre les main d’une élite dirigeante minoritaire encore plus minoritaire. Quand au cumule des mandat il ne favorise pas le renouvellement de la classe politique. Face a ce constat une lois a était finalement votée en 2014 rendant le cumule des mandats illégale. Un second projet de loi datant du 23 mai 2018 restreint le nombre de mandats consécutif, identique et complet à trois, et à 2 le nombre de mandat présidentiel. Mais l’application de ce texte n’est prévu que pour 2032.
1 David Van Reybrouck, Contre les élections, Babel, 2014, 224 pages.
2 David Van Reybrouck, Contre les élections, Babel, 2014, 224 pages.
3 Ibid., Page 24