Pour le collectif ALERTE qui regroupe 34 fédérations et associations nationales « Cette trajectoire de réduction de la dépense publique, couplée avec la réforme du RSA et la suppression de l’allocation spécifique de solidarité, est très inquiétante et les plus pauvres sont à nouveau mis sous pression alors que les coûts alimentaires et de l’énergie pèsent considérablement sur ces personnes. »
L’écologie (2,2 milliards) est le secteur le plus durement touché, rendant caduque la déclaration présidentielle d’en faire la priorité de son quinquennat. Ainsi, pour le Réseau Action Climat, « en supprimant 400 millions d’euros au Fonds Verts qui finance, par le biais des collectivités territoriales, la transition écologique des territoires l’État met en péril la capacité d’investissement local, pourtant l’un des leviers les plus efficaces pour la transition écologique. »
Déjà le 24 janvier, dans une lettre ouverte au premier ministre, 19 acteurs associatifs pour la protection de l’environnement
rappelaient « l’urgence d’une action d’ampleur en faveur d’une transition écologique et socialement juste ». Ces coupes budgétaires massives sont le signe d’une orientation tout à fait différente.
Le secteur associatif est frappé directement par cette coupe budgétaire. : la culture (204 millions), le sport (50 millions), la jeunesse et la vie associative (130 millions)... le Comité pour les relations nationales et internationales des associations de jeunesse et d’éducation populaire (CNAJEP) exprime sa plus vive inquiétude.
Imaginez vous un monde sans éducation populaire, , sans éducation à l’écologie, sans éducation au féminisme, sans éducation aux médias, sans éducation à l'avortement et à la contraception, sans éducation à l'alimentation, sans éducation à la consommation, sans activités d'aide aux anciens, aux enfants, aux migrants, aux personnes malades ou handicapées, sans éducation à la non-violence, sans activités artistiques et culturelles, sans pratiques sportives pour toutes et tous, sans conseils d’enfants et de jeunes, sans activités de découvertes scientifiques, sans espaces ni processus de participation des jeunes, sans colos, sans foyers de jeunes travailleurs, sans centres sociaux, sans MJC, sans scoutisme, sans chantiers de jeunes bénévoles, sans animateurs et animatrices, sans centres de loisirs, sans échanges internationaux, sans auberges de jeunesse ...
Pour le Syndeac, dans un courrier aux parlementaires, « 10% de budget en moins consiste à supprimer purement et simplement
des spectacles, des milliers d’emplois, et aboutira à faire tomber dans la pauvreté des milliers de professionnels en situation déjà très précaire, notamment celles et ceux qui bénéficient du régime de l’intermittence. »
NOTRE SOCIÉTÉ SERAIT A L’ARRÊT, SANS LE TRAVAIL DES ASSOCIATIONS
Les coupes budgétaires massives dans la politique de l’emploi (1,1 milliards), l’aide au développement (742 millions), l’enseignement supérieur (904 millions), l’éducation nationale (692 millions), la politique de la ville (50 millions), la solidarité et l’insertion (307 millions), les aides à l’accueil et à l’intégration des personnes migrantes (174 millions)... remettent en cause les programmes d’aide et de solidarité envers les
personnes les plus démunies.
Elles ne font que confirmer les orientations politiques de l’État qui rendent les associations et leurs fédérations totalement asphyxiées, et assujetties à la commande publique. La mobilisation des Centres sociaux en est l’illustration. Le 31 janvier, ce qui est extrêmement rare, ils sont descendus dans la rue.
Dans un article paru dans Ouest-France , Tarik Touahria en appelle « la cohésion sociale dans notre pays et de notre capacité à faire société ». « Malgré la reconnaissance de la qualité des réponses apportées par les acteurs de la société civile – associatifs notamment -, les moyens ne suivent pas. Les structures ne peuvent plus faire le grand écart entre des demandes sociales qui ne cessent d’augmenter et un investissement public qui n’est plus à la hauteur. »
« Sans association, pas de vie locale, pas de pacte sociale ». « 25 000 associations d’Éducation populaire remplissent, à travers leurs activités, des missions du quotidien précieuses pour la société et sa cohésion... Nous attendons de la part du gouvernement et des financeurs publics des signes de reconnaissance et de valorisation d’un secteur qui le mérite ».
Hexopée, syndicat des employeurs de l’animation, du sport, de l’ESS... appelle à la mobilisation afin d’obtenir « des moyens pour les associations à la hauteur de leur bénéfice pour la société ! »
« les associations d'Éducation populaire sont dans une situation financière fragile, qui met en question l’existence de nombre d'entre elles... » et demande une conférence des financeurs pour retravailler les modes de financement (subventions, contrats pluriannuels, fonds de soutien...)
DE QUOI CES COUPES SONT-ELLES LE NOM ?
On pourrait multiplier les déclarations des acteurs du champ associatif, on voit bien que le mal est profond. Il fut un temps où les associations constituaient un des piliers de l’État providence. Les politiques industrielles, économiques reléguaient la protection sociale à l’État via les services publiques et l’intervention des associations organisées. Ce temps d’une croissance infinie qui permettait une redistribution vers des politiques sociales est bien fini. Non pas parce qu’il n’y aurait plus de production de richesse (les actions des entreprises du CAC 40 ont progressé de 16,5 % en 2023) mais parce que, sous l’effet des politiques du tout-marché, l’espace du social est devenu lui-même un espace
économique.
Il y a un antagonisme profond entre un monde associatif qui parle démocratie, qui pense intérêt général, et un pouvoir exercé par une petite élite économique tissant des liens étroits avec les décideurs politiques qu’ils ont contribué à installer au pouvoir. Ces oligarques (actionnaires, investisseurs, et acteurs politiques) peuvent sciemment s’approprier les richesses produites car dans cette vision néolibérale l’État n’est plus l’acteur central des politiques sociales. Ce sont dorénavant de nouveaux acteurs économiques, ceux de la Start-Up nation, qui cherchent à s’emparer de ce nouveau marché et en capter de juteux retours sur investissement. L’État quant à lui en construit les outils financiers, comme ces fameux Contrats à impact social qui ne sont économiquement intéressant ni pour l’État, ni pour les bénéficiaires, mais pour
les investisseurs et les nouveaux entrepreneurs. Il est urgent de repenser l’État social ! Le monde associatif, celui de l’éducation populaire et des
associations citoyennes.