Longtemps je me suis posé ces mêmes questions, l’égalité entre être humain dans la société au sens large, moi qui ai perdu le chemin de l’école vers le brevet des collèges, j'ai bien entendu été plus souvent victime que bourreau dans le monde du travail (et plus généralement dans le vivre ensemble) et habitué à faire avec une situation plutôt que de la combattre, surtout quand la société elle même la cautionne, je suis pas Gandhi ni même Rosa Parks, il faut plus de conviction que je n'aurai jamais, pour ouvrir ce genre de route et faire changer les choses.
Ceci dit un petit billet pour dire que j'y pense, j'y pense à cette foutue inégalité qu'on me met devant le nez toute la journée sur les routes de Menton à Nice, quand je suis collé par une voiture qui me phare parce qu’elle na pas l'obligation de respecter les limites de vitesse, ce qui peut même être dangereux pour certains moins à l'aise au volant, il faut comprendre qu'avec les plaques monégasques le rapport de force police contrevenant n'est pas inversé mais presque, et l'impunité fait vite sentir ses effets sur le comportement routier.
----petit aparté sur le code de la route pour les plaques monégasques : la fin de l'impunité date de 2017, cela veut dire que c'est encore le cas, les accords entre les pays européens et Monaco mettent logiquement un peu de temps pour être mis en œuvre au niveau administratif, et en cas de flagrant délit, les résidents monégasques risquent quoi? une amende? une amende ça fait peur à ceux qui travaillent pour vivre---
Ensuite je réalise que cette voiture est une Mc Laren quelque chose... un truc dont je ne pourrais me payer l'entretien que si je suis les traces de Spagiarri mais j'ai pas son talent. Je m’arrête pour faire le plein de la Clio surannée et le prix est 10 ou 15 cents plus cher et pour cause, avec Monaco à 1 km, toutes les supercars et autres luxueuses montures, se fournissent en essence en France parce qu’à Monaco ça vaut beaucoup plus cher du coup les milliardaires en profitent pour économiser quelques dizaines d'euro sur un plein en même temps que faire grimper le prix, marché oblige, du coup je suis comparativement bien plus perdant sur mon plein qu'eux gagnants sur le leur mais bon tout le monde trouve ça normal, alors...finalement j'arrive au boulot, je suis peintre en bâtiment, mon boss a un chantier sur une colline de Nice, et comme je suis un peu remonté ce matin a cette idée d’inégalité qui tourne en boucle dans ma tête, mon attention se porte plus facilement sur les plaques monégasques, et devinez quoi, en première ligne devant les splendides villas de cette colline niçoise a 25 km de Monaco, beaucoup de plaques de Monaco.
Alors je danse une journée encore avec mon pinceau et l’idée qui tournait en boucle eh bien s'estompe avec la fatigue et je rallie les "c'est comme ça" le clan de ces putains de résignés dont j'ai une carte de membre permanent. NON pas ce soir ............. ce soir je réfléchis et je veux trouver ce qui me dérange, d’où viens ce sentiment que quelque chose ne tourne pas rond...... des riches y en a toujours eu, des belles voitures aussi, l'inflation des prix autour d'un lieu exceptionnel, l’ostentation, l'impunité, les passes droits, tout ça c'est commun, ça devrait pas mais c'est commun.....mais ça devrait pas...... l'accumulation peut être........ non j'ai trouvé : LE SYSTÈME.
Aujourd'hui pour une fois je souhaite être le porte drapeau d'une majorité silencieuse, silencieuse parce que muselée par un fonctionnement sociétal qui laisse finalement peu de place à la libre pensée, accaparés que nous sommes, nous indigents, par l'implication dans chacune de nos activités que notre condition ne nous permet de déléguer, intellectuellement manipulé par ce que l'on nous impose comme acceptable, obligatoire ou normal, et assaillis d'infos contradictoires de buzz et de réseaux sociaux qui nous abiment et nous détournent de nos raisons.
Alors pourquoi je pointe du doigt le système pour un problème qui semble local, eh bien parce ce qu'il faut se rendre à l’évidence, Monaco n'est pas une bulle paradis au purgatoire, pas un petit espace atypique et hors système qu'une poignet de de princes durant quelques générations ont réussi à préserver d'une perversion du système qui amène inexorablement les autres pays à l'endettement, au chômage et au final à la faillite. Non, Monaco est le système, il en est même le fer de lance, il est le résultat du système financier mondial dans ce qu'il a de plus pur, libéré de ses contraintes et des différentes règles imposés par les états. Il en est de même pour Nassau, le Liechtenstein et d’autres paradis fiscaux, qui sont de près ou de loin synonymes de Monaco. Ces paradis fiscaux sont l'effet inéluctable de la gestion financière et sociale de ce monde, comme les métastases d'une tumeur qui s'est généralisée.
De ce point de vue, et je le partage avec plaisir, Monaco n'est pas une cause mais une conséquence, un symptôme, une alerte.
Alors comment décrire ce cancer tel que je le vois, eh bien c'est assez simple au fond : un petit groupe de gens influents dans chaque pays capitalisent une partie non négligeable des revenus nationaux acquis par l’intermédiaire de placements, de dividendes, d'entreprises familiales, etc....... ces nantis ne réinvestissent qu'une partie de leur gains mirobolant et capitalisent le reste, argent qui pour des raisons souvent fiscales se retrouvent, par des jeux financiers très bien ficelés, dans des territoires avec peu ou pas d’impôts. Du vol me direz vous ? Moralement oui puisque le pays d'origine est pillé, mais le système financier est aujourd'hui suffisamment permissif pour que tout ça soit plus ou moins légal.
Le premier effet pervers est d'appauvrir le pays d'origine, le deuxième est de cumuler toujours plus de richesses sur des territoires toujours plus riches, et le fossé se creuse entre eux et nous. Bien entendu une économie parallèle pour milliardaire se crée, des services toujours plus délirants, des objets toujours plus chers et absurdes (j'ai vu un homme acheter une montre sertie de petits diamants à 350000 €, deux fois le prix de l'appartement que je ne pourrai jamais acheter, et ça sur un coup de tête), évidemment seul quelques chanceux profitent de cette économie qui en fait souvent réalimente les mêmes réseaux, oui les riches achètent les produits de luxe de leurs amis; autrement dit cet argent tourne en boucle, et la boucle est bouclée.
On en arrive au dernier effet kiss cool : cette économie bave littéralement sur l’économie locale des environs, prenons le cas non exclusif de l'immobilier, oui parce que le riche milliardaire aime les belles choses et évidemment il se fait fort de vouloir mettre la main sur les plus belle habitations avoisinant Monaco. Ce qui me gêne ce n'est pas que certaines habitations soient très chères comparativement au marché local, non les coins de paradis ça se paye, mais c'est que ces prix sont artificiellement décuplés par la proximité d'un puits à pouvoir d'achat illimité, certains quartiers de plusieurs villes et villages dans un rayon de 25 km autour de Monaco sont artificiellement survalorisés devenant dès lors intouchables pour l'autochtone.
Donc les amis, je résume, les "élites" se financent sur le dos de nos économies, créent une économie dont nous sommes exclus, y incluent par contre nos plus belles fiertés, et tous ça sous nos yeux admiratifs et consentants. En fait depuis le moyen âge l’état est resté féodal avec les grandes entreprises pour fiefs, sauf que cette fois-ci ce cancer grossi à vue d’œil et nous sommes trop occupés à faire des selfies ou à liker des conneries.
J'ai peur pour les générations à venir. Nous, on mérite ce qui nous arrive, la fin du 20ème siècle fut une période de changement où tout était possible, et voila ce que nous avons fait de notre futur radieux, une vie d'esclave moderne, enchainés que nous sommes à nos réseaux sociaux et à nos séries télé, et fouettés par nos mensualités de crédit sur une moitié de vie, on est bientot au milieu du 21ème et qu'avons nous fait des espoirs de nos pères, piétinés par excès d'arrogance, en pensant faire mieux finalement on a tout pourri.
J'avais 16 ans c’était hier, je pensais tout casser.........................................
Jean