Eric Chalmel (avatar)

Eric Chalmel

Dessinateur de presse (Presse Océan, Nantes)

Abonné·e de Mediapart

51 Billets

0 Édition

Billet de blog 29 août 2015

Eric Chalmel (avatar)

Eric Chalmel

Dessinateur de presse (Presse Océan, Nantes)

Abonné·e de Mediapart

Pour un Label rouge du migrant

Eric Chalmel (avatar)

Eric Chalmel

Dessinateur de presse (Presse Océan, Nantes)

Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Une émotion durable pour une traçabilité du migrant

Tout le monde a pleuré le destin tragique des 71 migrants, « dont quatre enfants » comme le soulignent certains médias sensibles, morts asphyxiés dans un camion frigorifique et abandonnés sur la bande d’arrêt d’urgence d’une autoroute autrichienne.

Également submergée par l’émotion, la société Hyza, transporteur slovaque de volailles – impossible de ne pas voir son nom sur le flanc du « camion de la mort » -, s’est empressée de déclarer qu’ « elle avait vendu le véhicule il y a plus d’un an ». D’ailleurs, quoiqu’elle soit bien pressée de se défendre, cette maison ne saurait voir son honnêteté entachée par le gazage des malheureux migrants ; personne à ma connaissance ne l’a suspectée de confondre cargaison humaine et cargaison de poulets. Son slogan ne le proclame-t-il pas sur le véhicule : « Úprimné kurča », « poulet sincère », ce qui ne peut que rassurer l’honnête citoyen européen, qui pour être ému n’en est pas moins un consommateur averti ? Espérons que cette société n’ajoutera pas du scandale au scandale en ayant trempé honteusement dans le génocide par broyage ou asphyxie de millions d’innocents poussins, massacre qui a récemment ému toute la communauté européenne*. On sait quoi penser de ces sociétés agroalimentaires d’Europe centrale ou d’Europe de l’Est qui nous revendent sans scrupule du cheval pour du bœuf et qui n’ont que mépris pour nos exigences de conditions d’élevage humaines de la viande animale, exigences désormais admises comme des plus légitimes. Cet après-midi, place Royale à Nantes, j’ai encore vu de ces militants de la cause animale qui dénonçaient quelque massacre d’animaux. Leurs pancartes étaient larges ; sans doute masquaient-elles celles qui dénonçaient le sort fait aux 71 migrants syriens retrouvés morts en Autriche, car je ne les ai pas vues. Il faut dire que j’étais moi-même fort pressé, en ce samedi après-midi, d’achever mes courses avant d’aller me rafraîchir sur les bords de l’Erdre. C’est qu’il fait étouffant ces jours-ci.

Reste la question de fond : s’il y a « poulet sincère », le migrant serait-il « hypocrite » ? Ces gens, qui à l’évidence n’avaient rien à faire dans un camion frigorifique, ont-ils voulu nous berner ? M. Vidalies, secrétaire d’État aux Transports, pour être socialiste n’en est pas moins homme de bon sens : il se propose d’aller trier entre migrants sincères et insincères, au faciès, assurant qu’il préfère « discriminer pour être efficace ». Il ne dit pas comment il compte s’y prendre pour s’assurer d’un faciès sincère mais nous pouvons lui faire confiance. L’on sait bien comment s’y prendre pour s’assurer qu’un poulet est de Challans ou de Bresse, cela ne devrait pas être beaucoup plus compliqué de distinguer entre Syriens. Allons plus loin encore et suggérons à M. Vidalies la création d’un Label rouge du migrant, qui serait une garantie rassurante pour les Européens, en attendant la création d’une filière bio de passeurs. Dès qu’ils auront un moment, je suis sûr que nos amis écologistes s’en préoccuperont.

En attendant, bon appétit.

*Plusieurs parlementaires, dont M. Balkany, ont récemment déposé une proposition de loi pour mettre fin à ce scandale. Qui a dit qu'on ne pouvait rien faire ?

Article à lire aussi sur mon blog <etatsetempiresdelalune.blogspot.fr>

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.