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Billet de blog 6 décembre 2018

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Il faut lever l’immunité parlementaire de Monsieur Ruffin !

La banalisation du mot « haine » est insupportable et criminelle. Dans un brouillard ou chacun va à tâtons, manipule des armes dont il ne contrôle pas le fonctionnement (les réseaux sociaux), que Monsieur Ruffin jette en plus le mot haine, est extrêmement coupable. C’est pourquoi l’assemblée nationale devrait s’autosaisir et lever l’immunité parlementaire de ce député.

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J’avais été plus qu’étonné de lire dans le Monde une tribune de François Ruffin qui comportait dans son titre puis à plusieurs reprises dans le texte le mot haine. Une récente tribune du même dans Libé reprend ce terme destiné à Macron pour lequel il est normal, recommandé d’avoir de la haine.

Or les mots ont un sens, et l’histoire s’est chargé de nous enseigner (nous ensaigner serait mieux dire) qu’il résiste à la banalisation. Celui du mot haine est sans ambigüité, il contient un appel au meurtre. Il est presque impensable qu’il puisse disposer d’un accès si facile à l’espace médiatique. Je ne le fréquente guère mais ai entendu sur France culture, dans l’émission « du grain à moudre » un universitaire parler de la haine qu’inspirait Macron, comme s’il s’agissait d’une vérité constatée par cet éminent personnage et qui, par conséquent, peut être répandue sans façon. Sait-on le risque que l’on court en caractérisant par un mot si fort le ressentiment des français qui se sont pris d’amour pour les rond point ? Ceux qui n’auraient pas pensé qu’ils étaient porteurs de haine, qui n’étaient qu’en colère, vont maintenant savoir qu’ils peuvent être haineux sans crainte de se sentir seul. De la même manière que les sondages nous informent, après avoir interrogé 935 personnes, de ce que nous pensons d’une question que nous ne nous posions pas, nous savons maintenant que le mot haine est de droit courant. Certains mots aident à franchir des seuils. Honte, trois fois honte à ceux qui les emploient et pas la moindre haine pour eux, ils sont des nôtres. Nous ne pouvons rien refuser de ce qui fait l’humanité, la haine y fait depuis longtemps des ravages, nous pouvons espérer et travailler à ce qu’elle ne soit pas notre guide : je ne l’écris pas en allemand.

La haine est un aveuglement, une manière de se tromper soi même. Elle n’est d’aucune utilité pour bâtir la société équilibrée à laquelle aspire, si j’ai bien compris, ceux qui enfilent le gilet fluorescent rendu obligatoire dans les voitures pour signaler un danger sur la route, et utilisé assez astucieusement il faut le dire, pour signaler une société en danger.

Une société qu’il faut repenser, rebâtir, chacun en est conscient. Une société qui doit faire face à de multiples enjeux plus ou moins contradictoires, ce qui exige un immense travail en commun. Il faut l’entreprendre, se saisir, entre autre, du projet de débat proposé par le gouvernement, et ne pas imaginer que les problèmes vont se régler, pour le cas ou nous disposerions d’assez de volonté pour les régler, en quelques semaines.

Mais loin c’est aussi tout de suite si la conscience (elle est faite pour cela, elle est fille du temps, elle sait qu’il faut du temps) nous montre un chemin qu’il faut emprunter vers un but. L’essentiel est de se mettre en marche (sans rire). Pour arriver il faut partir et choisir la direction n’est pas chose facile. Il est plus facile de trouver un coupable qui nous empêche d’avancer même si nous sommes incapables de dire où nous voulons aller, et pourquoi pas de transformer notre impuissance en haine. Car l’enjeu est bien que la société se saisisse de son destin, cesse de le remettre entre les mains des puissants. C’était le projet déclaré de la gauche qui n’est pas parvenu à le concrétiser. Elle a permis des avancées sociales, surtout quand elle n’était pas au pouvoir, mais n’a pas su insuffler un sentiment d’appartenance à la communauté indispensable pour réaliser ensemble ce qui éventuellement semble ne pas nous avantager individuellement. Ce travail que nous devons fournir pour vivre ensemble, avec ou sans Macron, avec ou sans les riches, ne peut pas se contenter d’être contre Macron et les riches, comme s’ils étaient seuls responsables d’être Macron ou riches, n’avaient été produit que par eux-mêmes et non par une société qui, mal fagotée comme elle est, est tout de même produite par une collectivité qui ne fait pas communauté.

Faire croire qu’il est possible de réparer cette collectivité en jetant certains de ses sous produits sans avoir à fournir, chacun de nous, un effort pour qu’elle cesse d’en produire est une pure tromperie. Peut être qu’il faut jeter Macron et les riches, j’en serais plutôt partisan. Qu’un tel acte suffise à animer nos capacités à fonder une société libre, juste, digne envers chacun de ses membres rendus à la dignité, qui peut le croire ? Pour y parvenir quel immense travail de remise en cause devrions-nous consentir ! Y sommes-nous prêt ?

Les formes d’action sont nouvelles, mais n’est pas nouveau le besoin de désigner des coupables qui dispensent des penser ses responsabilités. Le dire n’est pas sous estimer les difficultés qui engendrent la fronde actuelle mais prévenir contre les facilités de la protestation, contre les illusions, les espérances trompeuses. La duplicité de Monsieur Ruffin est patente, il ne peut pas croire ce qu’il dit. Il ajoute de la confusion à la confusion, comme bien d’autres. Que dans ce brouillard ou chacun va à tâtons, manipule des armes dont il ne contrôle pas le fonctionnement (les réseaux sociaux), il jette en plus le mot haine, est extrêmement coupable. La haine c’est la haine, il faut en faire quelque chose, l’encourager est toujours un délit. C’est pourquoi l’assemblée nationale devrait s’autosaisir et lever l’immunité parlementaire de ce député. Je suppose qu’elle ne le peut pas, c’est une proposition pour rire. Pour rire…

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.