Le débat sur la pénalisation des clients de la prostitution qui fait rage parallèlement aux votes par les assemblées, suite à la résolution sur " la position abolitionniste de la France" par l'Assemblée nationale, pointe une réalité dont on ne prend pas la mesure : une forte population de prostituées travaille dans des conditions d'assujetissement et d'exploitation économique peu compatibles avec les idéaux républicains ; ce n'est pas être archéo que de s'en aviser, voire de s'en inquiéter. Les lois contre le proxénétisme et le racolage passif ont eu pour effet une migration des centres, débarrassés aussi désormais de leurs mendiants, vers diverses périphéries, rase campagne comprise.
Il aura donc fallu s'habituer à voir des estafettes garées ici ou là, en bord de champ, dans les environs des grandes villes : quel progrès ! On imagine les conditions de sécurité et d'hygiène qui accompagnent ce redéploiement de la main d'oeuvre. Dans le pays des droits de l'homme, on consomme de la femme sans coup férir, sans vergogne, quel que soit l'emballage. Assez du tropisme français en la matière! Pas assez conséquent pour tolérer des établissements ayant pignon sur rue (Espagne, Belgique, Pays-Bas...), pas assez puritain pour interdire ( pays nordiques). À défaut de penser, ou simplement de gérer, on réaffirme les principes (la prostitution est un mal) comme déni de la réalité ( les clients seront sanctionnés... Réalisable ? ).
Ce qu'il faudrait faire ? Donner la parole aux intéressé(e)s. La commission parlementaire qui a rendu son rapport en avril a entendu une quinzaine de prostituées... À coup sûr, responsabiliser le client, à défaut d'interdire toujours. Cela fait appel au prudentiel, au bon sens, au sens intuitif du bon père de famille idéal. Et sanctionner ceux qui font appel à des femmes en situation manifeste d'assujetissement, ou de boucherie, autrement dit. En attendant un vrai débat sur la règlementation de lieux qui permettraient la chose en la contrôlant. Pas facile, dans un miroclimat latin où sens de la norme et complaisance pour une virilité sabre au clair s'entrechoquent.