Erica Farges

Abonné·e de Mediapart

50 Billets

0 Édition

Billet de blog 2 février 2018

Erica Farges

Abonné·e de Mediapart

« Comme nos parents » : mutation transmise

Comme nos parents (Como Nossos Pais) de Laís Bodanzky sortira dans les salles de cinéma françaises le mercredi 7 février.

Erica Farges

Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Comme nos parents est le quatrième long-métrage de Laís Bodanzky, réalisatrice qui dresse souvent dans ses films un portrait de la classe moyenne pauliste. Le titre du film fait référence à la chanson de la célèbre chanteuse populaire brésilienne Elis Regina, Como Nossos Pais.

Rosa (Maria Ribeiro), est une jeune femme de trente-huit ans vivant à São Paulo, submergée par ses conflits personnels et professionnels. Sa vie basculera définitivement lorsque sa mère, Clarice (Clarisse Abujamra), révèlera, après avoir un peu trop bu lors d’un repas de famille dominical, que Homero (Jorge Mautner), l’homme que Rosa considérait comme son père, n’est en fait pas son père biologique. Cette révélation remet en cause la structure familiale et les relations de l’héroïne.

Illustration 1

Dans Comme nos parents, les objets véhiculent souvent les souvenirs et les émotions des personnages, surtout ceux de Rosa, le récit filmique se déroulant de son point de vue. La protagoniste est étouffée par les tâches quotidiennes, dont l’accumulation est palpable, comme quand certains dialogues sont soudainement interrompus par d’autres personnages, ce qui donne un certain réalisme aux situations.

Les conflits présents dans le film sont très actuels, tout en trouvant leurs racines dans les traditions transmises par la société et famille. Les personnages évoluent dans un milieu individualiste où les idéaux deviennent plus importants que la famille, tout en étant dans l’impossibilité de se détacher totalement de leurs origines, ce qui cause des tensions dans les rapports interpersonnels et une incertitude concernant l’identité individuelle. D’ailleurs, le film semble dire que tout le monde porte un masque, la vie devient une grande pièce de théâtre où chacun joue plusieurs rôles contradictoires. Les références au théâtre dans Comme nos parents sont nombreuses.

Si la première tension relationnelle présentée par le film dès la séquence d’ouverture est celle de Rosa avec sa mère, les conflits que l’héroïne vit dans sa relation de couple apparaitront assez vite. En effet, le mari de Rosa, Dado (Paulo Vilhena), semble penser que son travail est plus important que celui de sa femme, même si c’est elle qui fait vivre financièrement la famille, il reproche aussi à Rosa de ne pas être assez disponible pour lui, alors qu’elle doit assumer la majorité des tâches du foyer, ne recevant que très peu d’aide de la part de son mari, tout ceci est dissimulé sous les discours et les principes humanistes de cet homme, assez représentatif d’un certain machisme passif actuel, différent de celui qui était majoritaire dans les esprits il y a encore quelques décennies, celui qui est dénoncé par la pièce de théâtre, mentionnée dans Comme nos parents, Une maison de poupée de Henrik Ibsen, où le mari était incontestablement le patriarche de la famille et où les femmes n’avaient pas le droit d’avoir des opinions, des libertés…

Comme nos parents montre comment les conflits et contradictions dans l’intimité des personnages sont caractéristiques de la société brésilienne actuelle, car c’est une société en mutation perpétuelle, qui cherche de nouvelles normes et de nouveaux repères tout en étant attachée à ses traditions.  

Erica Farges

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.