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Billet de blog 18 août 2017

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"Atomic Blonde": l’esthétisation de la chute du mur de Berlin

Entre film d’action et thriller d’espionnage, Atomic Blonde a pour toile de fond le Berlin de la fin des années 1980, quelques jours avant la chute du mur de Berlin.

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Espionne du MI6, l’agent Lorraine Broughton (Charlize Theron) est chargée d’une mission pour enquêter sur le meurtre de l’agent James Gasciogne (Sam Hargrave) à Berlin. Elle doit également mettre la main sur la liste de noms d’agents du monde entier qui se trouve quelque part dans cette ville. Elle raconte cette mission à ses supérieurs (Toby Jones et John Goodman) lors d’un débriefing à Londres, ce qui donne un récit en va-et-vient entre l’interrogatoire de l’agent Broughton à Londres et les événements qu’elle a vécu à Berlin, les flashbacks constituent alors la majeure partie du film.

Pour cette adaptation du roman graphique The Coldest City d’Antony Johnston, le réalisateur, David Leitch, revisite les codes esthétiques des eighties, par la présence d’images d’archive, de néons flashy dignes d’un clip de musique new wave et d’un décor vintage, en les actualisant avec des couleurs saturées et l’alternance entre longueurs et montage rapide. L’action est rythmée par la musique new wave-electro pop de l’époque immergeant dans l’ambiance de cet événement historique majeur. La bande originale du film contribue également à la chorégraphie des combats.

Illustration 1

Le jeu de contraste entre les lumières sombres et vives exalte l’effervescence liée à cet événement tout en ramenant à sa dureté socio-politique et en faisant référence au thriller d’espionnage, il évoque le climat d’instabilité de la ville de Berlin à cet instant. Le film joue aussi sur le contraste entre la froideur apparente de son héroïne et la violence furieuse qu’elle dégage pendant les combats. Atomic Blonde pourrait être qualifié de film d’espionnage survolté.   

La première séquence du film commence par le discours du Président Reagan en juin 1987 où il demande la destruction du mur de Berlin, suivi d’une inscription qui signale la chute du mur le 9 novembre 1989 qui est ensuite barrée par un tag  indiquant que les événements ne se sont pas vraiment déroulés ainsi, comme un clin d’œil à deux mythes très répandus à propos de la chute du mur de Berlin : celui selon lequel ce serait le discours de Reagan qui serait responsable de la suppression du mur de Berlin, alors qu’en fait ce sont surtout les réformes de Gorbatchev en URSS et les actions militantes des citoyens d’Allemagne de l’Est qui en sont responsables, et celui de penser que le mur a été majoritairement détruit dans la nuit du 9 au 10 novembre 1989, alors qu’en fait seulement quelques petites portions du mur furent détruites à coup de marteaux et de burins par des citoyens cette nuit-là. Deux mythes qui perdurent jusqu’aux jours actuels, surtout en raison des images sensationnalistes qui ont été véhiculées par les médias autour de ces événements. Cette séquence apparaît comme le premier indice d’un film qui parle de cette époque tout en prenant du recul et de la distance avec elle.  Sous ses airs de divertissement, Atomic Blonde fait un bilan historique des vingt-huit ans d’existence du mur de Berlin et pousse à s’interroger sur l’héritage que sa chute a laissé au monde vingt-huit ans après (la mythique chute du mur de Berlin fêtera son vingt-huitième anniversaire le 9 novembre 2017).

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