Dix ans que ta plume d’ange ne vole plus en escadron de syllabes détachées sur ta note bleue , toi le sy-lla-beau--logue, le si-la-bo-phile –osophe, le si-la-bo-ratoire des mots. Dans cet azur conquérant d’aujourd’hui, loin des claquettes de pluie et des miasmes politiques , je me fredonnais « Tu verras, tu verras » , une vraie sonate de printemps poussée en 1978 , quand les couleurs du Brésil donnaient le ton dans ta vie et teintaient ta musique, bossa encore nova pour moi à l’époque, tu avais syllabricolé ton vieux Français pour nous le faire chalouper comme du Brésilien, j’ai adoré ton Brésil, que Chico Buarque me pardonne , on peut aimer l’original et savourer la copie : « Brésilien mon frère d’âme… »
Je suis descendue sur l’année 79 , tout de suite « Marcia, martienne »m’est apparue sur la langue , me la chanter aurait nuit à mon plaisir ,le CD m’a donné toute satisfaction. Cette chanson est pour moi la rencontre miraculeuse d’une mélodie, d’un texte et d’une voix, un moment de grâce intemporel qui reprend chaque fois l’amour à la place où il est resté en suspend, battement du palpitant sur tempo de mélancolie.
Ces trois minutes de délectation « mots-roses » me sont toujours le plus court chemin entre l’émotion à fleur de ma peau d’avant et son souvenir attendri par le temps. Retrouver ces délicieux instants où pleurer l’amour blessé était déjà l’attente de son retour, où fuir le corps infidèle était l’appel qui le faisait revenir chargé des promesses d’un bonheur en un lendemain qui chanterait plus juste.
Apprendre à déchanter ses rêves usés sans mal au cœur occupe l’autre moitié du chemin, c’est « doux-lourd-heureux » souvent , c’est remettre au lendemain le malheur d’aujourd’hui, c’est écouter ton chant d « ’outre-nos tombes ».
J’arrive encore à lever la tête de bas en haut, je t’entends cinq sur cinq : « L’amour est toujours plus loin que l’amour… »