Je croise Martial tous les jours en allant chez mon Kiné.
Nous sommes ainsi devenus bons amis. Il a posé un paillasson rouge sur le trottoir et demande parfois aux passants de retirer leurs chaussures afin de ne pas salir le parquet de son salon. Il m'a invitée à venir m'asseoir sur son canapé pour parler un peu. Il avait une histoire à me raconter.
Hier me dit-il je me suis retrouvé nez à nez avec une personne qui me connaît. C'est le commandant des pompiers.
"mais Martial qu'est-ce que tu fais là ! c'est pas possible !"
je voulais me cacher mais je n'ai pas eu le temps
m'enfin, Martial, pourquoi tu voulais t' cacher ?
j'avais honte, essaye de comprendre j'avais honte
je n'ose plus dire un mot, j'ai les boules
Tu comprends, j'ai été pompier volontaire
je suis interloquée
Avant j'étais pas comme ça,dit-il en tirant son t-shirt, je faisais beaucoup de sport. J'ai perdu 17 kilos. Je suis dans la rue depuis novembre 2012, la rue ça use
Je regarde Martial, il est grand, il n'est effectivement pas épais, il a le visage d'un gamin, des yeux clairs, des cheveux blonds coupés courts. La rue n'a pas encore eu le temps de poser ses Stigmates sur son visage et son corps. Je pense à la phrase de SEMPRUN. Quand tu vas dans un camp de concentration, il vaut mieux être jeune, en bonne santé et parler allemand. Et d'un seul coup, je comprends bordel, je comprends le compte à rebours est commencé pour lui, combien de temps va-t-il tenir ? Pourra-t-il tenir jusqu'à.......
l'arrivée des pompiers, Bordel, il y a le feu !!! où sont les pompiers ?!!!!
Aujourd'hui j'ai fixé un rendez-vous à Gavroche, nous nous verrons mardi à 11h00 à la sortie des Galeries Lafayettes. Il ne sait pas qu'ici nous parlons de lui et de ses frères, de nos frères. Je lui transmettrai vos messages si vous en avez, car j'ai décidé d'être une Passeuse entre la sous-france et la France encore Libre
je sais déjà celui que je lui donnerai :
Tiens bon, n'aie pas le rouge au front, le front rouge arrive