Par Etienne CHERON

Ce qui est formidable lorsque l'on couche par écrit et au fil de l'eau ses impressions sur la politique, c'est qu'un point de vue à un moment donné peut assez rapidement apparaître absurde pour ne pas dire ridicule.
Il y a deux jours, j'écrivais un article que j'avais finement intitulé "la remontada de Manuel Valls" "https://blogs.mediapart.fr/etienne-cheron/blog/090517/la-remontada-de-manuel-valls. J'étais pas peu fier de ce titre, qui depuis la vraie remontada du Barça, a probablement du servir un bon millier de fois, du compte rendu d'un match de foot de district au reportage d'investigation sur la partie de loto organisée par un club du 3e âge.
Les réations suscitées par la démarche de notre ex Premier Ministre ont été vives ! fin de non recevoir de la République en Marche (attention aux chevilles qui enflent !), menaces de sanctions de la part du PS (un bon procès stalinien pour faire oublier la déroute), humiliations par tous les éditorialistes (l'odeur du sang fait toujours naître un peu d'excitation).
Donc, mardi dernier, j'estimais que Manuel Valls venait de marquer le premier but de "sa remontada à lui". On ne peut que constater que ses adversaires viennent d'égaliser.
J'ai fait partie de ceux qui l'ont trouvé agaçant, parfois arrogant et brutal alors qu'il était notre Premier Ministre ; son obcession pour les questions de voile, de laïcité m'ont même parfois fait ne plus supporter le seul terme de République ; son 49-3, sa déchéance de nationalité, sa loi travail, tout cela j'étais contre. La trahison de son engagement à soutenir le vainqueur des primaires m'a choqué... bref comme toute personne de gauche, j'avais et j'ai toujours de nombreuses raisons de ne pas me reconnaître pleinement dans ses options et dans son style.
Mais il faut se souvenir que Manuel Valls a vécu une des primatures parmi les plus compliquées de ces dernières décennies. Comment peut-on oublier les attentats, la France en guerre au Mali ou en Syrie, le travail au côté d'un joueur de flûte du niveau de François Hollande ?
Son bilan politique est donc mitigé (comme tous les bilans d'ailleurs). Mais mérite-t-il réellement ce déchainement médiatique, ces sarcasmes, l'humiliation. Je ne le crois pas mais je connais trop bien la meute ainsi lâchée.
Donc les adversaires de Manuel Valls (en fait à peu près tout le monde), aujourd'hui courageux, audacieux et visionnaires se ruent sur lui. Ils ont donc clairement égalisé. 1-1.
Jeune salarié, un de mes mentors m'avait appris que "dans la vie il ne fallait jamais humilier". J'y crois plus que jamais. Toucher l'orgueil d'une personne fait d'elle votre adversaire le plus redoutable, le plus déterminé. Et lorsque celle-ci est fière comme Manuel Valls semble l'être (gros cliché du fier ibérique là mais je n'ai pas pu résister), les dégâts peuvent être sérieux, n'en doutons pas.
Manuel Valls est surement plus isolé depuis quelques temps, c'est logique. Son offre de service était probablement trop rapide. Elle a surtout été incomprise. Imagine-t-on sérieusement un seul instant qu'il a besoin d'une investiture pour s'imposer à Evry ? Manuel Valls vient du terrain, il le connaît, il a du correctement le labourer depuis 3 mois et il gagnera même assez largement au mois de juin ; cette victoire sera d'autant plus valeureuse que l'adversité sera massive.
Je ne crois donc absolument pas en sa "mort politique", bien loin de là. Le scénario d'une réelle remontada est en train de se mettre en place. Je persiste et je signe.
Etienne CHERON