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Pour les Libyens, les noirs c’est de l’argent

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SOS Méditerranée - Acquarius - journal de bord 

Texte : Sarah Hammerl, Traduction : Mathilde Auvillain 

2 mai 2017

 Mamadou a été secouru par l’Aquarius le 5 avril 2017. A 28 ans, ce jeune gambien retenu un an dans des prisons et camps en Libye est finalement parvenu à s’échapper, par la mer. Sarah Hammerl, volontaire de SOS MEDITERRANEE a recueilli son témoignage.

"Je m’appelle Mamadou, je viens de Gambie. Mon père et ma mère sont morts quand j’étais encore enfant. Mes frères, mes sœurs et moi avons été élevés par ma grand-mère. C’est pour ma famille que j’ai fait ce voyage. Au pays, ce  n’est pas facile, à la fin du mois il n’y a pas toujours assez à manger. Je suis un homme, je sais que je peux aider. Mais je ne pouvais pas le faire si je restais en Gambie."

Alors j’ai quitté ma ville d’origine le 17 juillet 2015, en quête d’un avenir meilleur. C’était le jour de la fin du Ramadan. Je n’oublierai jamais ce jour là. J’ai quitté mon pays. J’ai quitté ma famille. Pendant un an et huit mois je ne leur ai pas parlé, parce que je ne voulais pas qu’ils sachent dans quelles conditions je vivais. Cela les ferait trop souffrir, je sais qu’ils m’aiment.

D’abord, je suis allé au Sénégal, puis du Sénégal au Mali, du Mali au Burkina Faso, puis au Niger. J’ai essayé de trouver du travail à Agadez, mais il n’y avait pas de travail. J’ai rencontré un homme qui m’a dit qu’il m’emmènerait à Sabha, en Libye, pour y travailler si je lui donnais de l’argent. J’ai emprunté une grosse somme à un ami de ma famille, et il m’a emmené à Sabha.

A Sabha, j’ai trouvé du travail mais c’était très dangereux. Les gens sont kidnappés, vendus et assassinés. J’ai perdu un ami là-bas. Ils l’ont kidnappé et torturé. Quand tu marches dans la rue, tu as l’air d’un fou, tu as toujours l’impression d’être suivi. Dès que tu entends un bruit, tu te mets à courir. J’ai été là-bas pendant cinq mois. C’est long, cinq mois dans cet endroit. Je vivais dans un camp appelé Abukafi. Là-bas, il n’y a que Dieu qui peut te sauver. Il n’y a rien à manger, pas d’eau. Souvent, il y a des attaques de Libyens. Si tu as de la chance, tu arrives à t’échapper. Sinon, ils t’attrapent et s’ils t’attrapent, ils te demandent de l’argent. Si tu n’as pas d’argent, ils te tuent.

Pour les Libyens, les noirs c’est de l’argent. En Libye, il y a l’esclavage. Vous pensiez que l’esclavage avait été aboli il y a longtemps, mais en Libye il existe toujours. On vous force à travailler. On vous traite de déchet, on vous insulte, on vous fouette. On vous dit que vous n’êtes rien.

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