HUMAN RIGHTS WATC - juillet 2018
rapport - 83 p
« C’est la loterie »
Traitement arbitraire des enfants migrants non accompagnés à Paris
Durant une nuit type, environ 200 enfants migrants non accompagnés dormiraient dans les rues de Paris. La plupart d’entre eux sont sans-abri à cause de procédures arbitraires et de retards excessifs dans la détermination de leur statut de mineur, première étape d’une prise en charge par le système de protection de l’enfance.
Mandatée par le département de Paris, la Croix-Rouge française est chargée d’évaluer l’âge des enfants non accompagnés à Paris, et a établi une structure à cet effet : le Dispositif d’évaluation des mineurs isolés étrangers (DEMIE). Or, de nombreux enfants demandant une reconnaissance légale de leur âge affirment avoir été refusés à l’entrée du DEMIE par le personnel de sécurité. D’autres subissent un bref entretien d’environ cinq minutes, suivi d’un refus verbal expéditif. Ce traitement ne répond pas aux exigences de la loi française et constitue une violation des normes internationales. En outre, les enfants ainsi rejetés sont livrés à eux-mêmes ou contraints de se tourner vers des organisations non gouvernementales pour trouver un abri, de la nourriture et toute autre assistance de première nécessité.
Ceux qui ont la chance de passer des entretiens complets reçoivent une décision officielle rendue par la Direction de l’action sociale, de l’enfance et de la santé (DASES), l’agence du département de Paris notamment chargée de la protection de l’enfance, qui s’appuie sur les évaluations du DEMIE. Ces jeunes essuient régulièrement un refus lorsqu’ils ne disposent pas de documents d’identité, alors que les normes internationales et la réglementation française reconnaissent que de tels documents – susceptibles d’être perdus lors de difficiles périples migratoires – ne sont pas requis et que l’âge approximatif peut être déterminé dans le cadre d’un entretien. Et ceux qui ont des documents en leur possession se voient eux-aussi souvent rejetés : les services de protection de l’enfance et les tribunaux français remettent régulièrement en question la validité des actes de naissance, passeports et autres documents d’identité, parfois même lorsqu’ils sont certifiés par des ambassades.
Plusieurs cas examinés par Human Rights Watch révèlent également d’autres motifs arbitraires sur lesquels se basent les services de la protection de l’enfance pour décider.
HUMAN RIGHTS WATCH | JUILLET 2018